L’addiction au café, génétique ?

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Rédigé par Estelle B. et publié le 23 septembre 2016

addiction au café génétique

A l’occasion de la journée mondiale du café, Santé sur le Net vous rappelle que le café fait partie des trois boissons les plus consommées dans le monde et représente la première source de caféine. Il suscite un grand intérêt pour les recherches scientifiques et notamment depuis deux décennies sur le lien entre la consommation de café et la génétique. De récentes études ont identifié plusieurs gènes impliqués dans la régulation du taux de caféine dans l’organisme et de la consommation de café.

La consommation de café

Le café est l’une des boissons les plus consommées au monde. Il renferme plusieurs molécules bioactives (caféine, polyphénols, vitamine B3, …). Compte-tenu de son importance économique, une multitude d’études scientifiques se sont penchées depuis plusieurs décennies sur les effets bénéfiques et néfastes du café, ainsi que de la caféine sur l’organisme.

La consommation de café et ses effets sur l’organisme sont très variables selon les individus. Pour ressentir les mêmes effets de la caféine, les individus peuvent boire des quantités de café très différentes. Ainsi, certains peuvent boire un café le soir sans souffrir d’insomnie la nuit, d’autres ne dorment plus s’ils prennent un café après 15h. Quelle est l’origine de ces variabilités inter-individuelles ?

L’avènement de la génétique permet aujourd’hui aux chercheurs d’étudier les liens possibles entre la consommation de café, la concentration de caféine dans le sang et les gènes.

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Des gènes régulant la consommation de café

En 2006, une étude génétique a été menée au Costa Rica sur 2 014 patients ayant présenté un infarctus du myocarde et 2 014 personnes en bonne santé. La présence de certaines variantes du gène codant pour le CYP1A2 (enzyme impliquée dans la dégradation de la caféine dans l’organisme) est associée à un métabolisme ralenti de la caféine, à une consommation accrue de café et à une augmentation du risque d’infarctus du myocarde. Cette étude met en évidence le lien entre un gène, la consommation de café et le risque d’infarctus du myocarde.

En 2015, le consortium international de génétique sur le café et la caféine a réalisé une étude sur une population de 120 000 américains de différentes origines ethniques. Cette étude a identifié 8 gènes, dont 6 nouveaux, associés à la régulation de la consommation de café. Six de ces gènes sont impliqués dans le métabolisme de la caféine et certaines variantes de ces gènes sont associées à une plus forte consommation de café. Cette étude confirme le rôle des gènes dans la variabilité inter-individuelle de consommation de caféine et de café.

Enfin, en 2016, trois équipes scientifiques européennes (italienne, écossaise et néerlandaise) ont publié une étude dans Scientific Reports. Dans une population de 1 207 italiens et 1 731 néerlandais, la consommation quotidienne de café a été étudiée et des marqueurs génétiques recherchés. Ont été exclus de l’étude les très gros consommateurs de café (plus de 9 tasses par jour pour les Néerlandais, plus de 20 pour les Italiens). Le gène PDSS2 a été identifié comme associé à la consommation de café. Les personnes consommant moins de café exprimaient plus fortement le gène PDSS2. Le gène PDSS2 diminue l’expression des gènes impliqués dans le métabolisme de la caféine. Une forte expression de ce gène entraînerait une dégradation plus lente de la caféine. Les effets de la caféine perdureraient ainsi plus longtemps, incitant à une plus faible consommation de café. A l’inverse, les personnes présentant une faible expression du gène PDSS2 auraient besoin de boire plus de café pour ressentir les mêmes effets de la caféine.

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Cinq tasses de café par jour ?

Les études scientifiques démontrent bel et bien un lien entre les gènes et la consommation de café. Cependant, comme pour le tabac et l’alcool, la génétique ne pourrait expliquer qu’une infime partie de la consommation de café. D’autres facteurs entrent en ligne de compte, le goût, les habitudes, la recherche d’un effet psychostimulant, etc. L’addiction au café n’est donc pas directement conditionnée par la génétique. En revanche, les recommandations officielles incitant à modérer la consommation de café – 4 à 5 tasses de café maximum par jour – ne prennent pas en compte ces variabilités individuelles liées à la génétique.

Estelle B., Docteur en Pharmacie


Sources :

Cornelis, M.C. et al. Coffee, CYP1A2 Genotype, and Risk of Myocardial Infarction. JAMA. 2006. 295(10):pp1135-1141.

The Coffee and Caffeine Genetics Consortium. Cornelis et al. Genome-wide meta-analysis identifies six novel loci associated with habitual coffee consumption. Molecular Psychiatry 20. 2015. pp647-656.

Pirastu, N. et al. 2016. Non-additive genome-wide association scan reveals a new gene associated with habitual coffee consumption. Sci. Rep. 6. 2016. pp31590.