Femme enceinte, prise d’antidépresseurs et épilepsie chez l’enfant

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Rédigé par Estelle B. et publié le 4 octobre 2016

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Suite aux récents débats sur la question de l’allaitement maternel, Santé Sur le Net, souligne les risques liés à la prise de certains médicaments de façon concomitante à la grossesse, ou à l’allaitement.
Sachant que la grossesse provoque fréquemment des troubles anxieux ou dépressifs chez les futures mères : la prise d’un traitement antidépresseur pourrait-elle être synonyme de risques pour l’enfant à naître ?

Grossesse et troubles dépressifs

Les troubles anxieux et/ou dépressifs sont fréquents au cours de la grossesse, que les femmes aient déjà présenté des épisodes dépressifs ou non. Ces troubles doivent impérativement être pris en charge, car leurs conséquences peuvent être néfastes pour la mère et pour l’enfant au cours de la grossesse, lors de l’accouchement, ou après la naissance. Les traitements antidépresseurs sont ainsi couramment prescrits chez les femmes enceintes et en constante augmentation depuis quelques années.

Des recommandations générales de prescription sont disponibles pour les professionnels de santé. Les antidépresseurs les mieux tolérés et les plus connus au cours de la grossesse sont privilégiés. En effet, ces antidépresseurs passent dans la circulation sanguine du fœtus qui est ainsi exposé au médicament tout au long du traitement.
A savoir ! La plupart des antidépresseurs passent dans le lait maternel. La mise en place de l’allaitement en cas de poursuite du traitement antidépresseur après la grossesse doit être discuté avec l’équipe médicale. Les bénéfices et les risques de l’allaitement maternel dans ce contexte seront ainsi étudiés au cas par cas.

Antidépresseurs et répercussions pour l’enfant

Plusieurs études ont déjà été menées sur les effets des antidépresseurs sur le développement cérébral du fœtus et les problèmes de santé chez l’enfant. La survenue de troubles du spectre de l’autisme a notamment fait l’objet d’une attention particulière. Mais à ce jour, aucune d’elles ne permet d’affirmer avec certitude que les traitements antidépresseurs pris au cours de la grossesse ont des répercussions sur l’enfant.

Le CRAT, ou Centre de Référence sur les Agents Tératogènes (substances susceptibles de provoquer des malformations chez l’enfant à naitre) indique que la plupart des antidépresseurs peuvent être prescrits quel que soit le trimestre de grossesse. Le CRAT mentionne les antidépresseurs à privilégier pour chaque catégorie d’antidépresseurs et les mesures de surveillance des troubles néonataux à mettre en œuvre suite à leur utilisation. Dans les jours qui suivent la naissance, l’exposition de l’enfant aux médicaments antidépresseurs cesse soudainement, ce qui équivaut à un arrêt brutal de traitement. L’enfant peut alors présenter des symptômes de sevrage variables selon le médicament.

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Un risque accru d’épilepsie ?

Récemment, une équipe danoise s’est penchée sur le lien entre la prise d’un traitement antidépresseur pendant la grossesse et la survenue d’une épilepsie chez l’enfant. Une cohorte de 734 237 enfants nés au Danemark entre 1997 et 2008 a été étudiée. Parmi ces enfants, 12 438 sont nés d’une mère qui a pris des antidépresseurs au cours de la grossesse, ou du mois la précédant. Près de la moitié des mères avaient été traitées dans les 30 jours avant la grossesse ou au cours du premier trimestre. Au total, 5 829 enfants (exposés ou non) ont présenté une épilepsie, l’un des troubles neurologiques les plus fréquents. Les enfants exposés aux antidépresseurs présentaient un risque d’épilepsie plus élevé (+ 27 %) que les enfants non exposés. Ceux dont les mères avaient pris des antidépresseurs au cours du mois précédant la grossesse ou durant le premier trimestre étaient particulièrement concernés.

Le risque d’épilepsie semblait par ailleurs étroitement lié à la sévérité de la dépression. Le risque était particulièrement augmenté chez les mères diagnostiquées pour dépression à l’hôpital au cours de la grossesse ou dans les 6 mois précédents. La prise d’un traitement antidépresseur uniquement dans les mois précédant la grossesse mais pas au cours de la grossesse augmentait également le risque d’épilepsie chez l’enfant.

L’exposition in utero aux antidépresseurs semble ainsi associée à un risque accru d’épilepsie chez l’enfant. Des facteurs maternels comme la sévérité de la dépression seraient également en cause. Des études complémentaires sont cependant nécessaires pour confirmer ces résultats et prendre en compte d’autres facteurs tels que les différents types d’épilepsie ou l’éventuelle association avec de l’alcool ou des drogues. Néanmoins, la prise d’antidépresseurs reste indispensable en cas de troubles dépressifs et aucun traitement antidépresseur ne doit être stoppé sans un avis médical.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie


Sources

Mao Y et al. Prenatal exposure to antidepressants and risk of epilepsy in childhood. Pharmacoepidemiol Drug Saf., 2016. Doi: 10.1002/pds.4072.
AFSSAPS. Bon usage des médicaments antidépresseurs dans le traitement des troubles dépressifs et des troubles anxieux de l’adulte. Recommandations. Octobre 2006. 19 pages.
CRAT. Site internet (http://www.lecrat.fr). Consulté le 3 octobre 2016.

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