Fer et maladie de Parkinson : bon ou mauvais côté de la force ?

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Rédigé par Hadrien V. et publié le 3 mai 2016

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L’implication du fer dans la maladie de Parkinson fait débat. Si une majorité de chercheurs pense qu’il pourrait être toxique lorsqu’il est en trop grande quantité, une poignée de scientifiques affirme que cette thèse est illusoire. Santé sur le Net décrypte le phénomène.

Fer et dopamine, un « couple toxique » pour la maladie de Parkinson ?

Le fer est un élément indispensable à la production de l’ATP, une molécule capable de stocker et délivrer l’énergie cellulaire. En produisant l’ATP, des radicaux libres hautement réactifs sont libérés. Ceux-ci ont la capacité d’interagir avec les composants cellulaires ou l’ADN en entraînant des dégâts irréversibles.

A savoir ! De nombreux produits se vantent d’avoir un pouvoir antioxydant. Leur action réside justement dans leur capacité à piéger les radicaux libres, souvent assimilés au vieillissement tissulaire.

Mais selon Dominic Hare, neurochimiste de l’Université de Sidney, le fer devient véritablement dangereux quand il rencontre la dopamine. Le chercheur parle de « couple toxique » aboutissant à la formation du 6-hydroxydopamine, un composé hautement neurotoxique. Cette propriété expliquerait l’endommagement de la substantia nigra dans la maladie de Parkinson, partie du cerveau riche en dopamine et qui pourrait être altérée lorsqu’elle est surchargée en fer.

La myéline touchée

D’autres chercheurs, tels que Tineke Steiger de l’Université de Lübeck, ont montré que des niveaux élevés en fer – courant chez les personnes âgées – pourraient être associés à la détérioration de la myéline et la baisse de performance de la mémoire.

A savoir ! La myéline est la matière isolante des cellules nerveuses, capable de multiplier par 50 la vitesse de conduction des influx nerveux. Sa grande concentration dans les parties profondes du cerveau donne la célèbre couleur claire de la « substance blanche ».

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Un problème peut-être mal ciblé

Tracay Rouault alerte : « Nos yeux nous trompent ». Pour la chercheuse du National Institutes of Health (NIH), les personnes ne souffrant pas de la maladie de Parkinson ont également des concentrations élevées en fer dans la substantia nigra.

Des travaux menés sur la souris ont notamment montré que l’absence d’une protéine chargée de transporter le fer conduisait les neurones dopaminergiques à une mort cellulaire lente. La neurobiologiste chargée de cette étude, Nancy Andrews, pense que la surcharge de fer n’est pas impliquée dans la mort cellulaire. Celle-ci s’appuie entre autres sur une étude montrant que les personnes ayant donné leur sang régulièrement sur une période de 5 ans – et donc régulièrement en carence – ont un risque plus élevé de développer la maladie de Parkinson. Un argument, il faut l’avouer, plutôt approximatif.

Le fer : de quel côté de la force ?

Malgré les alertes, le professeur David Devos de l’Université de Lille a engagé un essai de la défériprone, une molécule capable de traiter les surcharges en fer, sur des patients parkinsoniens. Les premiers résultats sont encourageants : une légère amélioration a été observée dans le mouvement de ces patients. Même s’il serait précoce de tirer des conclusions d’un essai pilote, le professeur espère montrer que cette médication permettrait de protéger les neurones vulnérables.

Dominic Hare rappelle que ce type de conflit fait partie de l’histoire de la recherche. Une histoire où chaque partie essaye « de réfuter les théories des autres » pour enrichir le débat scientifique.

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Hadrien V. Pharmacien


Source
L. Sander. « Evidence conflicts on iron’s role in Parkinson’s disease ». ScienceNews. 02/05/2016