Maladie d’Alzheimer : un espoir de traitement nommé caspase

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Rédigé par Julie P. et publié le 9 octobre 2018

La maladie d’Alzheimer , qui touche presque 5 millions de personnes dans le monde, est une pathologie dans laquelle le déclin cognitif et la démence évoluent progressivement. L’un des enjeux majeurs de la Recherche est de trouver des traitements médicamenteux qui ne vont pas uniquement ralentir la progression des symptômes de la maladie mais, au contraire les inverser durablement. Récemment, une équipe de chercheurs de l’université McGill et de l’Institut Lady Davis (ILD) de Montréal a montré chez la souris, modèle de référence de la maladie, que l’administration d’un médicament, le VX-765, inverse les troubles de la mémoire et diminue l’inflammation des tissus cérébraux.

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Les caspases : des enzymes clefs dans les processus de déclin cognitif (Alzheimer)

Andréa LeBlanc, professeure en neurologie et neurochirurgie à l’université McGill, travaille depuis plusieurs décennies sur les processus cellulaires et moléculaires à l’origine de la survenue de la neuro-dégénération comme la perte de mémoire liée à l’âge.

Dès 2006, elle a réussi à découvrir une enzyme, la Caspase 6, qui avait la particularité d’être très activée dans les lésions cérébrales associées à la maladie d’Alzheimer (MA) tout en ayant un rôle dans la perte de mémoire.

Comme il n’existait pas d’inhibiteur de cette enzyme, la chercheuse québécoise s’est intéressée à déchiffrer le mécanisme de fabrication de cette enzyme.

En amont des étapes de formation de la Capsase 6, elle a découvert l’enzyme Caspase 1, responsable de l’activation de la Caspase 6.

« C’était une découverte importante parce que des inhibiteurs de la caspase -1 ont été mis au point pour traiter les maladies inflammatoires » explique Andréa LeBlanc dans un communiqué de presse de l’université McGill.

À savoir ! Le VX-765 est un inhibiteur de la caspase-1 prescrit pour soigner des épilepsies chroniques qui ne répondent pas aux médicaments antiépileptiques classiques.

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VX-765 : des premiers résultats très prometteurs sur le modèle animal de la MA

Dans ces travaux menés sur des souris atteintes de la MA, l’équipe de chercheurs s’est rendu compte que l’administration de VX-765, un inhibiteur de la caspase-1, entraînait, dans un délai de trois mois :

  • Une inversion de la perte de mémoire (mémoire spatiale et mémoire de travail) ;
  • Une élimination de l’inflammation au niveau des tissus cérébraux ;
  • Une diminution de l’accumulation des peptides amyloïdes associée à la maladie d’Alzheimer dans le cerveau ;
  • Un retour à la normale des niveaux de protéines : la synaptophysine (une protéine impliquée dans la communication entre les neurones) dans l’hippocampe (structure cérébrale impliquée dans la mémoire à court terme).

À savoir ! Le peptide bêta-amyloïde est une petite protéine présente de manière naturelle dans le cerveau, mais aussi, dans la circulation sanguine. Il est montré que sa présence baisse la fluidité de la communication entre certains neurones (les neurones cholinergiques) au niveau de leur point de jonction, appelé synapse. Au cours de la maladie, cette petite protéine va s’accumuler à l’extérieur des neurones et former des amas, toxiques pour les cellules nerveuses, appelés plaques amyloïdes ou plaques séniles. La présence de ces plaques additionnées de la présence de la protéine Tau phosphorylée aboutirait à la dégénérescence des neurones chez le malade.

Inversement, l’arrêt de l’administration de VX-765 a provoqué, dans un délai d’un mois, la réapparition de déficits de mémoire chez les souris.

Ensuite, en modifiant génétiquement une souris pour qu’elle n’exprime pas la protéine Caspase-1, les chercheurs ont constaté que cette dernière était davantage protégée contre les déficits de mémoire, la neuroinflammation et l’accumulation de peptides béta-amyloïdes.

Pris dans leur ensemble, ces résultats fournissent la preuve in vivo de l’intérêt d’inhiber la Caspase-1 pour prévenir mais aussi, pour lutter contre les déficits cognitifs liés à l’âge et la MA.

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Des essais sur l’homme très prochainement

Comme ce médicament s’est déjà montré non toxique chez l’humain dans un contexte clinique, il pourrait faire rapidement l’objet d’essais cliniques dans un contexte lié à la recherche sur la maladie d’Alzheimer et sur les troubles de la mémoire liés à l’âge.

Autre fait rassurant : le VX-765 semble sans danger pour l’homme quand il est utilisé à des doses relativement élevées pendant de longues périodes.

« Il est probable qu’un traitement efficace contre la MA nécessitera un traitement très précoce pour prévenir la dégénérescence neuronale. À l’instar des médicaments antihypertenseurs ou anti-cholestérol qui protègent contre les accidents vasculaires cérébraux ou les infarctus cardiaques, nous pensons que le cerveau nécessite des traitements préventifs précoces avant que des lésions graves ne surviennent » précise les auteurs de l’étude dans leurs travaux publiés dans la revue Nature communications.

 

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Julie P., Journaliste scientifique

– Caspase-1 inhibition alleviates cognitive impairment and neuropathology in an Alzheimer’s disease mouse model. J.Flores et al. Nature Communications..Consulté le 2 octobre 2018.