Au sein des sociétés savantes internationales, il n’existe pas aujourd’hui de consensus sur le suivi cardiologique des fœtus conçus grâce à une Procréation Médicalement Assistée (PMA). Partant de ce constat, des chercheurs italiens ont passé en revue des études traitant du le lien éventuel entre cardiopathie à la naissance et type de fécondation réalisée. Retour sur cette étude qui montre que les nouveau-nés issus d’une fécondation in-vitro avec micro-injection ont un risque de développer une malformation du cœur plus important par rapport à ceux issus d’une grossesse spontanée.
Fécondation in-vitro : un risque de malformation cardiaque augmenté de 50%
Dans un premier temps, l’équipe de chercheurs, encadrée par Paolo Cavoretto du département d’obstétrique et de gynécologie de l’hôpital San Raffaele de Milan, ont passé en revue l’ensemble des études cliniques traitant des malformations congénitales survenues dans le cadre d’une Procréation Médicalement Assistée.
À savoir ! L’assistance médicale à la procréation (AMP) ou procréation médicalement assistée (PMA) consiste à manipuler, en laboratoire, les gamètes mâles et femelles pour procéder à une fécondation. En France, en 2015, 24 839 enfants sont nés grâce à une AMP.
Une quarantaine de travaux, réalisés entre 1996 et 2017, ont ainsi été retenus.
Ensuite, pour affiner leur recherche bibliographique, ils ont sélectionné les études cliniques analysant spécifiquement la santé cardiaque de fœtus conçus naturellement ou grâce à une fécondation in-vitro avec micro-injection.
À savoir ! La fécondation in-vitro avec micro-injection (ICSI en anglais pour IntraCytoplasmic Sperm Injection) a été mise au point en 1992. Cette technique visant à contourner certains problèmes d’infertilité consiste à injecter, en laboratoire et sous microscope, un spermatozoïde unique dans un ovocyte mature. A contrario, dans la fécondation in-vitro conventionnelle, le biologiste met en contact les spermatozoïdes les plus aptes à féconder avec l’ovocyte mature dans un milieu de culture proche des conditions naturelles à 37°C. Ici, la fécondation se fait donc naturellement. Aujourd’hui, la fécondation in-vitro avec ICSI représente plus de 60 % des FIV.
Au final, les chercheurs ont retenu quatorze études répondant notamment aussi à deux de ces critères : l’absence d’anomalies chromosomiques majeures chez le nouveau-né (comme le syndrome de Down) et l’assurance que la grossesse était arrivée à son terme.
En retenant ces travaux, les chercheurs ont réussi à obtenir les données médicales cardiaques de :
- 25 856 enfants nés grâce à la technique de fécondation in-vitro avec ICSI ;
- 287 995 enfants nés spontanément.
Qu’obtiennent les chercheurs en analysant l’ensemble de ces données ?
1,3% des enfants nés par fécondation in-vitro avec ICSI possèdent des malformations cardiaques congénitales contre 0,68% pour ceux nés naturellement.
Autrement dit, lorsqu’un enfant est conçu à l’aide d’une FIV-ISCI, le risque qu’il naisse avec une cardiopathie est 1.5 fois supérieur par rapport à un enfant conçu spontanément.
Pour aller plus loin dans ces investigations, les chercheurs ont voulu savoir quels types de malformations cardiaques étaient davantage retrouvés chez les enfants nés par FIV-ISCI. En comparant les données, ils ont trouvé que ce sont les cardiopathies mineures, comme une communication interventriculaire ou une communication inter-atriale, qui ont une prévalence plus importante dans cette population d’enfants.
À savoir ! La communication interventriculaire (CIV) est causée par un trou dans le septum (cloison) séparant les deux cavités inférieures du cœur, les ventricules. Normalement, la paroi se ferme avant la naissance du fœtus. La communication inter-atriale (CIA) est aussi une absence de fermeture complète du septum. Mais dans ce cas, c’est le septum qui sépare les deux cavités supérieures du cœur (oreillettes) qui n’est pas étanche. La CIV et la CIA peuvent représenter respectivement jusqu’à 10% des malformations cardiaques congénitales.
Lire aussi – 4ème journée nationale dédiée à l’infertilité
Perspectives d’études et recommandations
Pour les chercheurs, ces résultats sont intéressants et méritent d’être approfondis. Ainsi, ils espèrent réaliser prochainement des études qui montreront, plus en détails, les liens possibles entre les différentes procédures de PMA et les divers types de malformations cardiaques.
Ensuite, les chercheurs émettent l’hypothèse que ce risque augmenté de malformations cardiaques chez les nouveau-nés issus d’une FIV est probablement consécutif au dysfonctionnement du placenta lors du premier trimestre de grossesse. Pour confirmer cette piste de « cause à effet », d’autres investigations cliniques sont encore nécessaires.
Enfin, ils préconisent d’orienter des recherches supplémentaires sur le rôle de l’acide folique (vitamine B9) et d’autres micronutriments dans la prévention des malformations cardiaques congénitales.
Enfin, ils recommandent que toutes les grossesses issues de FIV-ICSI intègrent :
- Un suivi, par différentes techniques d’imagerie médicale (dont l’échographie cardiaque), du bon développement du cœur du fœtus ;
- Une supplémentation en acide folique chez la future maman.
Lire aussi – Malformations congénitales : lesquelles et pourquoi ?
Julie P. / Journaliste scientifique
– Dossier Assistance médicale à la procréation. Inserm. Consulté le 28 novembre 2017.