Maladies cardio-vasculaires, diabète, pathologies auto-immunes… Mieux comprendre les causes d’apparition de ces maladies inflammatoires est un enjeu actuel de santé publique. Une équipe de chercheurs de l’Université Northwestern vient d’observer, chez plus de 400 jeunes adultes, les interactions entre leurs conditions environnementales à l’enfance et le niveau actuel d’expression de leurs gènes impliqués dans l’inflammation.
L’environnement modifie l’activité des gènes
Alors que la génétique correspond à l’étude des gènes, l’épigénétique s’intéresse aux changements de leurs activités. N’entraînant pas de mutations dans la séquence d’ADN, les modifications épigénétiques de l’ADN sont provoquées par l’environnement social et physique dans lequel nous évoluons. Les comportements, l’hygiène de vie et les conditions socio-affectives sont, par exemple, des paramètres qui peuvent moduler l’expression de nos gènes.
Ces modifications de l’ADN, nommées modifications épigénétiques, sont transmissibles au cours des divisions cellulaires et réversibles dans la plupart des cas.
A savoir ! Les modifications épigénétiques sont des marques chimiques sur la séquence d’ADN. La plus commune est la méthylation de l’ADN, c’est-à-dire l’ajout d’un groupement méthyle (CH3). L’ADN se retrouve ainsi davantage compacté entraînant une baisse d’activité des gènes concernés.
Dans cette étude menée, sur 494 jeunes adultes âgés de 20 à 22 ans, les chercheurs ont testé une hypothèse de départ : le niveau de méthylation des gènes responsables de la régulation de l’inflammation serait dépendant d’un ensemble de facteurs environnementaux qui ont structuré leur développement dès la naissance.
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Enquête sur le passé, analyse du génome au présent
Dans un premier temps, chaque participant a répondu à un ensemble de questions permettant de retracer précisément le cadre de vie de leur enfance. La manière dont ils ont été nourris, leur fréquence d’exposition à des agents microbiens et leurs conditions psychosociales sont des paramètres qui ont été évalués.
Une fois la collecte de ces informations terminée, l’équipe de l’Université Northwestern a séquencé, c’est-à-dire déterminé l’ordre d’enchaînement des éléments de base de l’ADN (adénine, cytosine, guanine, thymine) et analysé, chez chacun des volontaires, 114 gènes cibles impliqués dans la régulation des mécanismes de l’inflammation.
A savoir ! Une maladie inflammatoire désigne la présence d’une inflammation pouvant toucher la plupart des organes et des tissus. Elle se divise en trois catégories : les maladies auto-inflammatoires, les maladies auto-immunes systémiques et localisées et enfin, les affections inflammatoires d’origine indéterminée.
Résultats ? Parmi eux, 9 gènes, permettaient de prédire, en fonction de leur degré de méthylation, les conditions environnementales dans lesquelles s’était développé l’individu.
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Plus de soins dès l’enfance, moins de maladies inflammatoires à l’âge adulte
En règle générale, plus le degré de méthylation de l’ADN était important, plus la probabilité que l’individu ait vécu dans un environnement défavorable pour sa santé était grande.
Par exemple, les chercheurs ont montré que naître avec un faible poids ou être allaité sur une durée assez courte entraînaient des méthylations de l’ADN sur les 9 gènes. Tout comme le fait d’avoir vécu une absence prolongée d’un parent ou de naître dans une famille avec un statut socio-économique très bas.
Pour aller au bout de leur démarche scientifique et tester la validité de leur hypothèse de départ, l’équipe de chercheurs a mesuré dans le plasma sanguin des participants la concentration en inflammatoires. Autrement dit, les molécules dont la présence ou la concentration anormale signalent l’apparition d’un mécanisme d’inflammation.
A savoir ! Dans le domaine médical, un biomarqueur se définit souvent comme une protéine ou une molécule de façon générale et dont l’expression est soit augmentée, soit absente.
Finalement, leur travail a montré qu’un niveau élevé de méthylation sur 4 gènes entraînait une concentration importante de molécules inflammatoires dans l’organisme et donc, un risque plus important de développer, au fil du temps, une pathologie associée.
Ce mécanisme génétique montre, une fois de plus, que le génome n’est pas figé et que sous la pression de certaines conditions environnementales, l’ADN enregistre l’expérience vécue via les modifications épigénétiques.
Prendre soin de l’environnement dans lequel grandit un enfant apparaît donc comme étant un facteur important pour réduire ses risques de développer une maladie inflammatoire à l’âge adulte !
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Julie P., Journaliste scientifique