Syndrome de Noonan


Rédigé par Nadege LB. et publié le 17 janvier 2018

Le syndrome de Noonan est une maladie rare d’origine génétique caractérisée par un aspect particulier des traits du visage (dysmorphie faciale), des anomalies cardiaques congénitales et une petite taille. Il existe parfois un déficit intellectuel ainsi qu’un retard d’acquisition du langage.

brin d'ADN

Qu’est-ce que le syndrome de Noonan ?

Décrit en 1963 par la cardiopédiatre Jacqueline Noonan, le syndrome de Noonan a une incidence proche de 1/2000 naissances. C’est un syndrome d’origine génétique qui survient de façon sporadique dans plus de 80% des cas ou selon une transmission autosomique dominante avec une expression variable.

À savoir ! Chaque être humain possède dans ses cellules (sauf les cellules sexuelles) 23 paires de chromosomes dont 22 paires d’autosomes et 1 paire de chromosomes sexuels (XX pour les femmes ou XY pour les hommes), soit 46 chromosomes par cellule. Chaque paire est ainsi composée d’une copie héritée du père et d’une copie héritée de la mère. Lorsque l’on parle de transmission autosomique dominante, le terme « autosomique » indique que le gène en cause dans la maladie n’est pas situé sur les chromosomes sexuels mais sur l’un des 22 autres chromosomes : les « autosomes ». La maladie peut donc apparaître aussi bien chez un garçon que chez une fille. Le terme « dominante » signifie qu’une seule copie altérée (mutée) du gène est suffisante pour que la maladie se déclare.

Ce syndrome résulte d’un dérèglement de la voie de signalisation intracellulaire RAS/MAPK et par conséquent d’un dérèglement au niveau des cellules de notre organisme et du processus de croissance de nouveaux vaisseaux sanguins (angiogenèse). Dans 40 à 50% des cas, le syndrome de Noonan est dû à une mutation du gène appelé PTPN11 localisé sur le chromosome 12. Ce gène permet la fabrication de la protéine tyrosine phosphatase SHP-2 qui est présente en grande quantité dans l’organisme. Elle joue un rôle dans la régulation des informations échangées entre les cellules et intervient dans de nombreuses fonctions de l’organisme.

À savoir ! D’autres syndromes, dont le phénotype est proche du syndrome de Noonan, ont été décrits par la suite : le syndrome LEOPARD ou syndrome de Noonan avec lentigines multiples (tâches pigmentées sur la peau), le syndrome cardio-facio-cutané et le syndrome de Costello. L’ensemble de ces syndromes sont liés à un dérèglement de la voie de signalisation RAS/MAPK d’où l’utilisation récente du terme « RASopathies » pour les désigner.

Les nouveau-nés atteints du syndrome de Noonan ont en général une taille, un poids et un périmètre crânien dans les limites de la normale. Le diagnostic à la naissance repose sur la combinaison d’une dysmorphie faciale, d’un cou court avec un excès de peau, d’anomalies cardiaques et, plus rarement, lymphatiques. Cependant, ces symptômes sont inconstants et peuvent être discrets, comme en témoigne un âge moyen au diagnostic de 9 ans. La dysmorphie faciale du syndrome de Noonan est assez caractéristique, néanmoins, les traits du visage sont variables dans le temps et la dysmorphie évolue avec l’âge.

À savoir ! L’ensemble des signes cliniques du syndrome de Noonan peut évoquer le syndrome de Turner. Néanmoins, ce dernier touche exclusivement les femmes car il est dû à une anomalie affectant le chromosome X.

Symptômes

L’expression et la gravité du syndrome du Noonan sont très variables d’un individu à l’autre.

Dysmorphie faciale

La région orbitaire et les oreilles sont les plus caractéristiques. Ainsi, on observe des yeux écartés (hypertélorisme) (75%), des paupières supérieures tombantes (ptosis) et les fentes des paupières dirigées vers le bas et le dehors. Les oreilles sont bas implantées, épaisses, inclinées en arrière, avec un lobe protubérant. Les piliers du philtrum (fossette qui se situe entre le nez et la lèvre supérieure) sont très marqués (95%). On peut également observer une micrognathie (développement insuffisant des os de la mâchoire) (50%) et un palais haut et arqué (45%). De plus, le cou est court avec un excès de peau (55%) et les cheveux ont une implantation basse.

La dysmorphie faciale évolue avec l’âge et devient moins caractéristique :

  1. Le visage s’allonge et devient triangulaire ;
  2. Le cou s’allonge également, rendant le ptérygium (malformation caractérisée par un cou palmé/des trapèzes proéminents) plus évident ;
  3. Les traits s’épaississent avec une accentuation des plis nasogéniens (plis allant des ailes du nez à la commissure des lèvres).

Croissance, nutrition et puberté

La croissance est souvent altérée dans le syndrome de Noonan, mais une taille normale n’exclut pas ce diagnostic.

Plus de la moitié des enfants présentent des difficultés alimentaires précoces conduisant à un retard de la croissance en taille et en poids dans la première année. Habituellement, les troubles alimentaires se résolvent spontanément dans l’enfance. Néanmoins, même en l’absence de difficultés alimentaires, le retard statural est présent chez plus de 50% des malades. Un déficit en hormone de croissance est parfois retrouvé, mais le bilan hormonal est généralement normal. La puberté et la maturation osseuse, fréquemment retardées, permettent un certain degré de « rattrapage » statural en fin d’adolescence. La taille adulte moyenne se situe autour de 162 cm chez l’homme et 152 cm chez la femme.

La puberté est retardée de 2 ans en moyenne mais reste spontanée le plus souvent. Chez les garçons, une cryptorchidie est commune (60%) c’est-à-dire que les testicules peuvent rester en position abdominale au lieu de descendre dans les bourses. Certains hommes peuvent présenter une infertilité même sans cryptorchidie. Chez les filles, l’âge moyen des premières menstruations est de 14 ans et la fertilité est normale.

Cardiologie et pathologies vasculaires

Les anomalies cardiaques sont très fréquentes (65 à 80%). Les plus caractéristiques sont une dysplasie de la valve pulmonaire et/ou une sténose pulmonaire supra-valvulaire. Cela se traduit notamment par un trouble du développement des valves pulmonaires. De très nombreuses autres malformations cardiaques peuvent être présentes, en particulier une communication interventriculaire (CIV) ou inter-auriculaire (CIA). Une cardiomyopathie hypertrophique (épaississement du muscle cardiaque) survient dans 20% des cas. Cet épaississement peut être présent dès la naissance ou se constituer avec l’âge.

Neurologie et développement

Des difficultés d’apprentissage sont fréquentes (30 à 40%) chez les enfants atteints du syndrome de Noonan. Ainsi, un retard d’acquisition du langage s’observe chez 20% des enfants et la plupart d’entre eux conservent un déficit relatif des performances verbales et des difficultés articulatoires (72%). Une déficience intellectuelle (QI < 70) peut également être observée (20%) mais elle est rarement sévère. L’apprentissage de la lecture peut être difficile, surtout chez les enfants ayant eu un retard de langage oral. De plus, une diminution du tonus musculaire (hypotonie) est fréquente dans l’enfance et est généralement associée à un retard moteur (25%).

Différents troubles cognitifs ou psychopathologiques peuvent être observés :

  • Un déficit de l’attention et des fonctions exécutives ;
  • Un déficit de la mémoire auditivo-verbale et visuelle ;
  • Une altération des capacités d’interaction sociale avec difficultés de reconnaissance des émotions chez autrui (alexithymie) ;
  • Des troubles de l’humeur et de la régulation émotionnelle.

Dermatologie

La peau est habituellement sèche, avec une kératose pilaire (maladie de peau se caractérisant par une sécheresse importante et la présence de squames très fines). Une hyperkeratose des paumes est souvent observée, entrainant la formation de « coussinets » due à l’épaississement anormal de la couche superficielle de la peau.

Des anomalies de la pigmentation de la peau sont fréquemment observées incluant des naevi pigmentés (grains de beauté) (25%), des tâches café-au-Iait (10%) et des lentigines (3%). La présence de ces dernières permet de définir un variant clinique du syndrome de Noonan : le syndrome de Noonan avec lentigines multiples (NS-ML).

Les cheveux sont bouclés, cassants et parfois épars. Les sourcils sont le plus souvent peu fournis.

Vision et audition

Des anomalies ophtalmologiques touchent plus de 90% des patients et regroupent principalement un strabisme (48 à 63%), des troubles de réfraction (61%) notamment la myopie et une amblyopie (absence de développement de la vision d’un œil) (33%).

Une perte auditive liée à des otites chroniques est une complication fréquente du syndrome de Noonan (15 à 40%). La surdité de perception ou surdité neurosensorielle est moins fréquente (10%).

Orthopédie

Le syndrome de Noonan s’accompagne souvent d’anomalies thoraciques caractéristiques qui se manifestent par un pectus carinatum supérieur et un pectus excavatum inférieur (70 à 95%) : le thorax est large, en forme de pyramide inversée et l’écart inter-mamelonnaire est augmenté.

Une scoliose est parfois retrouvée (25%) et survient surtout à l’adolescence.

À la naissance, on peut observer des pieds bots (5%) ou une contracture des doigts.

Hématologie, immunologie et coagulation

Un tiers des personnes atteintes du syndrome de Noonan présente des troubles de la coagulation d’intensité variable mais pouvant se révéler lors de chirurgies potentiellement hémorragiques. L’anomalie la plus commune est un déficit en facteur XI. Ces déficits en facteur de coagulation n’exposent pas à un risque hémorragique majeur mais sont responsables d’une prédisposition aux ecchymoses, aux saignements de nez et saignements post-opératoires.

Des anomalies plaquettaires telles que des thrombopénies (diminution anormale du nombre de plaquettes dans le sang) et des thrombopathies (maladies résultant d’une altération de la qualité des plaquettes sanguines) ont également été rapportées.

Des manifestations auto-immunes sont fréquentes (30% d’auto-anticorps antithyroïdiens), avec un risque d’hypothyroïdie tardive de 5%.

Cancérologie

Chez les personnes atteintes du syndrome de Noonan, il existe une prédisposition au développement de myélodysplasies et de leucémies, en particulier la leucémie myélomonocytaire juvénile (LMMJ), qui survient avant 2 ans, et la leucémie aiguë lymphoblastique.

À savoir ! La myélodysplasie est une maladie qui touche la moelle osseuse où sont produits les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes. Ainsi, outre la production de cellules sanguines anormales, la moelle osseuse ne peut plus produire suffisamment de cellules sanguines normales.

D’autres tumeurs ont également été rapportées telles que le rhabdomyosarcome, le neuroblastome, ( tumeurs neurologiques) le lymphangiome et le carcinome testiculaire. Le risque cumulé à 20 ans est de l’ordre de 4%.

D’autres malformations ou anomalies peuvent être observées comme des malformations uro-rénales (10%), une hépato-splénomégalie (augmentation du volume du foie et de la rate) sans origine cardiaque ou des tumeurs des gaines nerveuses

Diagnostic

Le diagnostic du syndrome de Noonan est avant tout clinique. Il peut être confirmé par un test génétique dans 70 à 80% des cas. Au vu de la sensibilité actuelle du génotypage, ce dernier ne permet malheureusement pas d’exclure une suspicion diagnostique en cas de test génétique négatif.

Traitement

Il n’y a malheureusement pas de traitement spécifique pour le syndrome de Noonan. En effet, une prise en charge pluridisciplinaire est conseillée ou requise. Les traitements, dits symptomatiques, dépendent des anomalies et de l’organe impliqué.

– Protocole National de Diagnostic et de Soins (PNDS) / RASopathies : Syndromes de Noonan, cardio-facio-cutané et apparentés – www.has-sante.fr – Octobre 2016
– Syndrome de Noonan et apparentés / Étude clinique et moléculaire de 51 enfants et adultes pris en charge au centre de référence « anomalies de développement » de Nancy – Thèse de Juliette PRIARD – Université Henri-Poincaré Nancy 1 – 02 Octobre 2009
– Le syndrome de Noonan – orpha.net – Juillet 2006

Nadège LB., Biologiste


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