L’intérêt des scientifiques pour la vitamine C ne date pas d’hier, en effet depuis les années 70, les chercheurs sont convaincus de son effet protecteur sur certaines tumeurs. De nouvelles recherches démontrant le potentiel de la vitamine C à stopper la multiplication des cellules cancéreuses dans la leucémie viennent relancer le débat.
Leucémie et enzyme TET2
L’efficacité de la vitamine C dans le traitement des cancers a toujours était controversée. Plusieurs études ont déjà montré son intérêt dans divers cancers comme le cancer du pancréas, du rein, ou encore du colon ou de l’ovaire. Tandis que d’autres auteurs ont suggéré que la vitamine C diminuait l’efficacité de la chimiothérapie. Dans ce contexte, des chercheurs de l’université de New-York reviennent sur le rôle de la vitamine dans certains cancers appelés hémopathies malignes. Leurs résultats publiés dans le fameux journal Cell, laissent entrevoir de nouvelles possibilités thérapeutiques.
Une enzyme appelée TET2 (ou Tet methylcytosine dioxygenase 2) est connue pour être impliquée dans la différenciation des cellules souches. Ces dernières sont des cellules capables d’une part de s’auto-renouveler et d’autre part de se différencier en cellules spécialisées (par exemple du foie, de la peau, etc.). On parle de « différenciation cellulaire » lorsque la cellule souche immature se transforme en cellule mature spécialisée.
Dans les cancers du sang ou leucémies, c’est précisément ce mécanisme de différenciation cellulaire qui est impacté. En effet, les cellules souches sanguines ne se différencient plus, elles se régénèrent en permanence et se multiplient à l’infini. Cette accumulation de cellules immatures (non différenciées) va bloquer la production de cellules sanguines saines, notamment celle des globules blancs (ou leucocytes) nécessaire à la défense de notre organisme contre les infections.
Les scientifiques estiment qu’un dysfonctionnement de l’enzyme TET2 serait en cause chez 30% des patients souffrant de syndrome myélodysplasique (ensembles de maladies caractérisées par une production insuffisante de cellules sanguines saines), et 50% des patients atteints de leucémie. Forts de toutes ces observations, les chercheurs ont recherché le moyen de stimuler génétiquement cette enzyme afin de rétablir le processus de différenciation cellulaire chez ces patients. La vitamine C serait-elle la clé ?
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La vitamine C, une nouvelle option thérapeutique
Les cancers du sang ou leucémies impliquent un dysfonctionnement de l’enzyme TET2 par une altération du gène la pilotant. Une anomalie sur une seule des deux copies du gène suffit à provoquer le trouble. Les auteurs de l’étude ont émis l’hypothèse que l’administration intraveineuse à haute dose de vitamine C pourrait amplifier l’action du gène sain codant pour TET2 et donc compenser la copie altérée.
Pour leurs recherches et afin de vérifier leur hypothèse, les scientifiques de l’université de New-York ont utilisé des souris génétiquement modifiées avec une absence totale ou partielle d’enzyme TET2. Ils ont ensuite injecté aux souris des cellules leucémiques humaines. Résultat, en injectant des doses élevées de vitamine C aux rongeurs dépourvus d’enzyme TET2, ils ont pu bloquer la progression de la leucémie.
L’hypothèse des auteurs de l’étude est donc vérifiée, la vitamine C à forte dose permet de restaurer les fonctionnalités de l’enzyme TET2. La vitamine C permet, en effet, de stimuler un mécanisme génétique appelé « déméthylation de l’ADN » dont le but est d’ordonner aux cellules de devenir matures puis de mourir.
Par ailleurs, les chercheurs ont également démontré l’efficacité de la vitamine C à forte dose pour booster l’action d’un anticancéreux de la classe des inhibiteurs de PARP (mécanisme d’action basé sur la réparation de l’ADN), déjà approuvé dans le traitement de certains cancers de l’ovaire.
Les résultats obtenus suggèrent donc que la vitamine C à forte dose, seule ou en association, pourrait avoir d’importants bénéfices sur la prise en charge des cancers du sang. Cependant, les résultats ont été obtenus sur des animaux, il est donc nécessaire à présent de vérifier leur exactitude chez l’Homme via un essai clinique.
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Charline D., Pharmacien