Contention et isolement en psychiatrie : la mise en garde de l’HAS

Actualités Psychiatrie

Rédigé par Charline D. et publié le 21 mars 2017

Le 20 mars dernier, la Haute Autorité de Santé (HAS) publiait ses recommandations concernant certaines pratiques en recrudescence, telles que la contention, l’isolement et les soins sans consentement en psychiatrie.

psychiatrie internement violences

La contention et l’isolement en hausse

L’isolement est l’action de séparer un patient des autres en l’enfermant dans un espace adapté. La contention mécanique est l’utilisation de divers moyens, méthodes, matériels ou vêtements dont le but est de restreindre ou bloquer les capacités de mouvements volontaires du patient.

Le contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, incitait déjà en mai dernier les professionnels de la psychiatrie à remettre en cause leurs pratiques, en dénonçant la banalisation de la contention et de l’isolement. Elle appuyait notamment sur le fait qu’aucune étude scientifique n’avait prouvé l’efficacité de ces pratiques jusqu’à maintenant. Elle présentait ainsi, dans son rapport sur le sujet, le recours à l’isolement ou la contention comme étant une « seconde privation de liberté », la première étant l’hospitalisation sans consentement.

Le constat d’Adeline Hazan est fondé sur la visite de près de 121 établissements de psychiatrie, à savoir 40 % de l’ensemble des 284 centres recensés. Elle précise pour le quotidien du médecin qu’ « il est rare que les établissements n’y recourent jamais. Partout, nous avons constaté au moins une chambre d’isolement ». La contention étant normalement une mesure de dernier recours, la CGPL dénonçait également en mai dernier, la banalisation, notamment dans la chambre des patients, de la contention avant même d’avoir recherché d’autres alternatives. L’atteinte à l’intimité et à la dignité des patients (seau hygiénique, vidéo-surveillance, port du pyjama, etc.) a aussi été mentionnée par Adeline Hazan dans son rapport.

A savoir ! Selon l’HAS, il n’y a que les patients suivant des soins psychiatriques sans consentement (hospitalisation forcée) qui peuvent être isolés. De plus, la contention mécanique n’est autorisée que dans le cadre d’un isolement.

Ainsi, selon l’IRDS (Institut Régional de Développement du Sport) on constate plus qu’un doublement du recours à l’isolement en 12 ans, avec 13 000 patients concernés en 2003 contre au minimum 28 000 en 2016. À noter, qu’il existe des disparités importantes sur le territoire français avec des recours à cette pratique allant de 5 % à 30 % (le cas du Jura ou de la Corrèze par exemple). Les soins sans consentements ont quant à eux, subi une augmentation de 15.9 % entre 2011 et 2015.

Lire aussiSchizophrénie et violence, quel risque ?

Contention et isolement : les recommandations de bonne pratique

C’est dans ce contexte que la Haute Autorité de Santé publie ses recommandations. Donc, tout recours à la contention ou à l’isolement doit rester, normalement, exceptionnel compte tenu des restrictions en termes de liberté individuelle qu’elle impose. Elles doivent dans tous les cas être effectuées dans le respect du patient (dignité et sécurité) et doivent faire l’objet d’une surveillance clinique adaptée.

Ainsi, l’HAS précise que ces pratiques peuvent être envisagées, lorsque des arguments cliniques les justifient, que dans le cas où des mesures moins restrictives ont échoués. L’objectif de ces mesures est d’anticiper ou de gérer un comportement violent impossible à contrôler représentant un risque grave pour le patient lui-même ou pour autrui. L’instauration de l’isolement ou de la contention ne se fait pas sans évaluation du patient au préalable.

Le recours à ces mesures doit être d’une durée limitée, et effectué de manière adaptée et proportionnée au risque. Ainsi, seul un psychiatre, après une concertation pluri professionnelle, est en mesure de prendre la décision de placer un patient en isolement ou sous contention.

A savoir ! De telles méthodes doivent faire l’objet d’une démarche thérapeutique uniquement. Ainsi, elles ne doivent pas être une punition ou utilisées pour résoudre un problème administratif ou organisationnel.

La Haute Autorité de Santé précise qu’il est essentiel, d’expliquer au patient les raisons qui motive la mise en place de ces mesures, leur déroulement ainsi que les critères permettant leur arrêt. À l’application de la contention ou de l’isolement, une fiche de prescription du suivi doit figurer dans le dossier patient.

Lire aussiSchizophrénie : un héritage de l’enfance

Charline D., Pharmacienne

Sources
– Isolement & contention – Pratiques de dernier recours. has-sante.fr.