Substances opioïdes, le tramadol et la codéine sont souvent l’objet de mésusage, de surdosage, d’abus voire de dépendance. D’où l’importance d’en sécuriser leur utilisation. C’est l’objet de la mesure annoncée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et selon laquelle les médicaments à base de tramadol ou de codéine devront être prescrits sur une ordonnance sécurisée dès le 1er décembre 2024. On fait le point.
Tramadol et codéine : des mésusages importants
Substances opioïdes, le tramadol et la codéine se retrouvent dans les spécialités médicamenteuses seuls ou associés à d’autres molécules comme le paracétamol ou l’ibuprofène. Indiqués dans le traitement des douleurs modérées à sévères ou dans le traitement des toux sèches gênantes (pour les médicaments contenant de la codéine), ces médicaments ne peuvent être délivrés que sur ordonnance.
C’est sans compter les nombreux abus dont ces médicaments font l’objet depuis de nombreuses années, entre mésusage, surdosage, voire dépendance et présentation d’ordonnances falsifiées. C’est ce que révèlent les enquêtes de pharmacodépendance et d’addictovigilance conduites sur le sujet.
Forte de ce constat, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a déjà pris diverses mesures pour tenter de réduire les risques associés à l’utilisation de ces médicaments opioïdes :
- Prescription médicale obligatoire depuis 2017 pour tous les médicaments contenant de la codéine.
- Réduction de la durée maximale de prescription des médicaments contenant du tramadol à 12 semaines depuis avril 2020.
- Demande faite aux industriels commercialisant des médicaments contenant du tramadol de proposer des boîtes avec moins de comprimés (pour des traitements de courte durée), en complément des boîtes déjà disponibles.
- Sensibilisation des prescripteurs sur la nécessité de prévenir et de traiter les troubles liés à l’usage des antalgiques opioïdes.
Une ordonnance sécurisée pour les prescriptions de tramadol et de codéine
Mais force est de constater que ces mesures n’ont pas suffi à réduire les mésusages associés à ces médicaments. D’où l’importance d’en sécuriser encore mieux leur utilisation. C’est l’objet de la mesure annoncée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) selon laquelle les médicaments à base de tramadol ou de codéine dihydrocodéine, seuls ou associés à d’autres substances, devront être prescrits sur une ordonnance sécurisée dès le 1er décembre 2024.
Pour cela, les prescripteurs devront inscrire sur l’ordonnance sécurisée en toutes lettres le dosage, la posologie et la durée de traitement. Ils devront prescrire si possible sur des durées qui soient les plus courtes possibles, ce qui correspond à 3 à 14 jours pour les douleurs aiguës et au maximum trois mois pour les douleurs chroniques. Dans tous les cas, il conviendra d’éviter un « syndrome de sevrage » en diminuant progressivement la posologie du traitement jusqu’à l’arrêt.
Autre mesure annoncée, la réduction de la durée maximale de prescription de la codéine ou dihydrocodéine à 12 semaines (trois mois), à l’instar du tramadol. Après trois mois, il faudra donc au patient une nouvelle ordonnance pour pouvoir poursuivre un traitement par codéine.
À savoir ! Vu leur capacité à réduire le seuil de crise, les opioïdes doivent être utilisés avec précaution chez les patients épileptiques.
Vers une meilleure information des patients
En pratique, si le patient dispose d’une ordonnance de médicaments contenant du tramadol ou de la codéine établie avant le 1er décembre 2024, l’ordonnance restera valable jusqu’à la fin de la durée de traitement prescrite. La prescription suivante devra se faire quant à elle sur une ordonnance sécurisée.
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a également annoncé vouloir mettre en place des mesures supplémentaires visant à mieux informer les patients sur les risques de dépendance et de surdosage liés à ces médicaments. L’une des idées avancées serait celle de demander aux laboratoires pharmaceutiques d’ajouter des mentions d’alerte sur les boîtes de médicaments contenant du tramadol ou de la codéine.
Dans cette attente, l’Agence rappelle aux patients les règles de bon usage des médicaments contenant du tramadol ou de la codéine. La première d’entre elles consiste à respecter la posologie, la durée de traitement ainsi que l’intervalle entre les prises. Il conviendra également arrêter progressivement le traitement. Le but étant d’éviter l’apparition d’effets secondaires liés à un sevrage trop brusque. Le patient devra également veiller à ne jamais proposer son traitement de tramadol ou de codéine à une personne de son entourage même si elle semble présenter des symptômes similaires aux siens.
Quant aux personnes à risque de surdosage, si elles se trouvent dans un état de somnolence, il faudra appeler les secours, leur administrer de la naloxone (antidote aux opioïdes disponible dans un kit) et les maintenir éveillées jusqu’à l’arrivée des secours.
À savoir ! En cas d’effets indésirables liés à la prise de ces traitements, le patient devra consulter son médecin traitant et déclarer les effets indésirables sur le portail des signalements. Dans le cas où un adulte ou un enfant aurait ingéré du tramadol ou de la codéine de façon accidentelle, il faudra contacter immédiatement un centre antipoison ou un service d’urgence : le 15 (Samu), le 18 (pompiers) ou le 112.
Déborah L., Dr en Pharmacie
– Tramadol et codéine : une ordonnance sécurisée obligatoire à partir du 1er décembre 2024. www.vidal.fr. Consulté le 28 septembre 2024.