Les spécialistes estiment que 2 femmes sur 1 000 sont porteuses d’une mutation sur l’un des gènes du cancer du sein. Véritable épée de Damoclès, ces femmes savent qu’elles peuvent transmettre ces anomalies à leur descendance. A moins que la Science ne soit capable d’éradiquer cette mutation génétique…
Cancer du sein et gènes BRCA
Entre 5 et 10 % des cancers du sein sont héréditaires, c’est-à-dire liés à une mutation génétique, qui se transmet de génération en génération. Les recherches ont permis d’identifier plusieurs anomalies génétiques, favorisant la survenue d’un cancer du sein. La plupart concernent les gènes BRCA 1 et 2 (BReast CAncer), même si d’autres gènes sont plus rarement impliqués.
Pour une femme, être porteuse d’une mutation génétique sur l’un de ces gènes ne signifie pas systématiquement qu’elle aura un jour un cancer du sein, mais qu’elle présente un risque accru :
- De développer un cancer du sein à un âge jeune, avant la ménopause (risque entre 40 et 80 % contre 10 % dans la population générale) ;
- D’avoir un cancer dans les deux seins (forme bilatérale) ;
- D’avoir un cancer de l’ovaire à partir de 40 ans (risque entre 10 et 63 % contre 1 % dans la population générale).
Lorsqu’une telle mutation est découverte, une consultation avec un spécialiste en oncologie génétique est proposée, pour évaluer le risque génétique et mettre en place une surveillance adaptée.
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Rompre la transmission génétique
Récemment, une gynécologue américaine a raconté son expérience personnelle dans un article scientifique. A l’âge de 24 ans, elle découvre qu’elle est porteuse d’une mutation sur l’un des gènes du cancer du sein. Le verdict tombe : elle présente un risque élevé de développer un cancer du sein et/ou de l’ovaire. La seule solution pour prévenir ces risques consiste à retirer ses organes féminins, les uns après les autres.
Elle subit d’abord une double mastectomie (ablation des seins) à 24 ans et les médecins programment une double ovariectomie (ablation des ovaires) vers l’âge de 35 ans. Avec son mari, elle souhaite avoir des enfants, mais se refuse à leur transmettre sa mutation génétique et les conséquences qui en découlent. Elle va alors avoir recours à une technologie récente, le diagnostic préimplantatoire (DPI). Associé à la fécondation in vitro (FIV), il permet de sélectionner des embryons sur des critères génétiques et ainsi d’implanter dans l’utérus de la mère ceux qui sont dépourvus de l’anomalie sur le gène du cancer du sein.
Après l’échec d’une première tentative, ce médecin a pu donner naissance à un petit garçon en bonne santé. Elle sait que son enfant n’est pas porteur de la mutation génétique et ne pourra ainsi pas la transmettre à ses enfants, ses petits-enfants, etc. Elle met en avant dans son article les atouts de cette technique novatrice, qui pourrait, selon elle, éradiquer les mutations génétiques du cancer du sein.
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Le diagnostic préimplantatoire en France
Un tel scénario est-il envisageable en France ? Le diagnostic préimplantatoire (DPI) est autorisé en France depuis 1999. En 2013, 161 enfants sont nés suite à une FIV couplée à un DPI. Cette technique est très étroitement encadrée par la loi de bioéthique du 6 août 2004, modifiée le 7 juillet 2011, et sa pratique est réglementée par l’Agence de Biomédecine.
Le diagnostic préimplantatoire n’est proposé en France qu’aux couples, qui risquent de transmettre à leur enfant une maladie héréditaire, très grave et incurable à ce jour. Actuellement, près de 180 anomalies ou maladies génétiques entrent dans le cadre légal du DPI. Les caractéristiques génétiques des maladies doivent être parfaitement identifiées et mises en évidence chez l’un ou les deux parents. A titre d’exemple, on peut citer l’adrénoleucodystrophie, la chorée de Huntington ou les hémophilies.
La prédisposition génétique à un cancer de l’adulte ne rentre ainsi pas dans le cadre du diagnostic préimplantatoire en France. Cette technologie offre la possibilité à des couples de procréer sans transmettre à leur enfant une maladie génétique incurable. Mais, elle est souvent controversée, en raison des risques de dérive qu’elle présente : il devient en théorie possible de sélectionner des embryons en fonction de leur sexe ou de critères anatomiques.
L’histoire de la gynécologue américaine ne pourrait ainsi pas se reproduire en France à l’heure actuelle. En revanche, le DPI offre bel et bien l’espoir de voir disparaître définitivement certaines mutations génétiques et les maladies qui en résultent.
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Estelle B. / Docteur en Pharmacie
Sources :
Le diagnostic préimplantatoire et vous. Haute Autorité de Santé. Actualisation suite au vote du 7 juillet 2011.
Sackeim, M.G. Eradicating a GeneticMutation. JAMA 28 Volume 317 : Number 8. 2017
Les prédispositions génétiques au cancer du sein. Institut National du Cancer. Consulté le 13 mars 2017.
L article n est pas tout à fait exact car un DPI sur une femme porteuse de la mutation à été réalisé dans le sud de la France l année dernière. Les c omissions au Dpi statuent egalement en fonction de la sévérité du gène au sein de la famille.
Bonjour Stéph.C,
D’une manière générale, les mutations sur le gène BRCA ne constituent pas un motif suffisant pour bénéficier d’un DPI. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas possible d’en bénéficier, mais le DPI reste réservé à des cas très précis, notamment chez des femmes qui ont cette mutation mais aussi de nombreux antécédents familiaux de cancers. Souvent, il y a aussi d’autres des risques d’autres cancers familiaux, par exemple comme le cancer colorectal. Toutes les femmes porteuses d’une mutation sur les gènes BRCA ne peuvent pas solliciter un DPI. Le médecin spécialiste est là pour conseiller les patientes et leur indiquer si elles peuvent ou non prétendre à un DPI, avant même la constitution du dossier pour le passage en commission.
Bonne journée.
Cordialement,
Estelle B., Pharmacienne.
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