Chaque hiver, une épidémie de grippe fait son apparition et touche plusieurs millions de personnes en France, parfois avec des complications graves. Une récente étude s’est penchée sur le rôle étonnant de la progestérone, hormone retrouvée dans les pilules contraceptives, au cours de l’infection par le virus de la grippe.
Progestérone et régulation du système immunitaire
La progestérone et ses dérivés sont des traitements très utilisés pour diverses indications thérapeutiques (pilules contraceptives, traitements hormonaux de substitution après la ménopause, traitements de certains cancers chez l’homme et la femme, …).
Des études in vitro, chez l’animal et chez l’homme ont déjà suggéré que la progestérone serait capable de réguler le système immunitaire et de provoquer des réponses anti–inflammatoires dans l’organisme. Ces effets de la progestérone et de ses dérivés ont été étudiés au cours d’infections virales affectant les voies génitales (par exemple le VIH et les virus herpétiques). Une récente étude s’est intéressée aux effets de la progestérone sur l’infection par le virus de la grippe, qui affecte principalement les voies respiratoires.
A savoir ! La progestérone est une hormone produite par les ovaires au cours du cycle ovulatoire. Sa concentration varie au cours du cycle et devient maximale au cours de la phase lutéale (comprise entre le 14ème et le 28ème jour). En dehors des cycles ovulatoires, les concentrations de progestérone sont très élevées au cours de la grossesse et chutent après la ménopause. Des dérivés de progestérone sont présents dans différents types de pilules contraceptives.
L’influence de la progestérone sur l’infection par le virus de la grippe
Dans cette étude, un groupe de souris femelles, incapables de produire de la progestérone suite à une ablation des ovaires, a reçu un traitement de progestérone à des concentrations équivalentes à celles de la phase lutéale du cycle ovulatoire. Un second groupe de souris (groupe placebo) n’a pas reçu de traitement de progestérone. Après 3 semaines de traitement, toutes les souris ont été infectées par le virus de la grippe. L’évolution de l’infection grippale a été analysée au sein des deux groupes de souris.
La progestérone ne permet pas aux souris d’éviter l’infection ni la réplication du virus grippal. En revanche, l’administration de progestérone semble améliorer la tolérance à l’infection. Le virus de la grippe infecte les cellules qui recouvrent les voies respiratoires (appelées cellules épithéliales respiratoires) et provoque la synthèse de molécules pro-inflammatoires. L’inflammation locale ainsi engendrée entraîne la mobilisation de différentes cellules immunitaires. Les chercheurs ont mis en évidence que la progestérone administrée aux souris diminue l’inflammation au niveau des poumons et accentue la réparation des tissus lésés.
L’action de la progestérone au cours de la grippe serait associée à une protéine, l’amphiréguline. L’amphiréguline est un facteur de croissance, principalement produit par des cellules épithéliales et des cellules immunitaires. Elle est impliquée dans la réparation des tissus recouvrant les organes digestifs, pulmonaires et génitaux. In vitro, la progestérone est capable de provoquer la production d’amphiréguline par des cellules épithéliales. Chez la souris, la progestérone stimulerait la production de ce facteur La progestérone via son action sur l’amphiréguline permettrait ainsi une protection des souris contre les complications graves de la grippe et une guérison accélérée des souris traitées par rapport au groupe placebo.
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La progestérone pourrait-elle devenir un traitement contre les infections ?
Cette étude met en évidence une action de la progestérone sur la réparation des tissus pulmonaires suite à l’infection grippale chez la souris. L’exposition aux hormones sexuelles pourrait ainsi protéger contre les complications de certaines maladies infectieuses d’origine non génitale et faciliter leur guérison. Les traitements progestatifs ou œstro-progestatifs, dont les plus couramment utilisés sont les pilules contraceptives et les traitements hormonaux de substitution, pourraient avoir des effets bénéfiques dans la prise en charge de certaines infections en réduisant l’inflammation et en facilitant la réparation tissulaire. Les auteurs de l’étude suggèrent également que les hormones sexuelles pourraient jouer un rôle dans l’évolution de certaines maladies auto-immunes.
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Estelle B., Docteur en Pharmacie
Source
Hall OJ, et al. Progesterone-Based Therapy Protects Against Influenza by Promoting Lung Repair and Recovery in Females. 2016. PLoS Pathog. 12(9): e1005840. doi:10.1371/journal.ppat.1005840