Sclérose en plaques : l’espoir d’anticiper les poussées
Dans la sclérose en plaques, la découverte récente d’un sous type précis de cellules immunitaires impliquée dans la neuroinflammation suscite l’espoir pour mieux prendre en charge la maladie. Focus sur les résultats de cette étude et ses potentielles applications cliniques.

Les poussées dans la sclérose en plaques
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie auto-immune dans laquelle le système immunitaire attaque le système nerveux central, le cerveau et la moelle épinière. Ce dysfonctionnement du système de défense de l’organisme entraîne l’altération et la destruction de la myéline, une gaine protectrice qui entoure les nerfs du cerveau et de la moelle épinière.
Les symptômes de la SEP varient d’une personne à l’autre et dépendent de l’emplacement et de la gravité des lésions des fibres nerveuses. Ils comprennent souvent des problèmes de vision, de la fatigue et des problèmes de locomotion (difficultés à marcher et à garder l’équilibre, faiblesse et engourdissement dans les membres).
Plus de 8 personnes sur 10 atteintes de SEP sont initialement diagnostiquées avec la forme « rémittente-récurrente » ou RR de la maladie. Ici, les symptômes se manifestent pendant un moment, puis disparaissent. Les patients vivent des épisodes intermittents d’apparition de symptômes (poussées), suivis par des périodes plus ou moins longues d’absence de crises (rémissions).
Mais comment anticiper ces poussées ou réduire leur intensité et leur fréquence ?
Actuellement, le traitement repose sur des perfusions de corticoïdes (médicaments réduisant une inflammation dans l’organisme) permettant de réduire la durée de la poussée et de faciliter la récupération. Un traitement de fond est aussi indispensable pour retarder la survenue d’une nouvelle poussée et donc l’évolution de la maladie.
Plusieurs traitements de fond sont disponibles : immunomodulateurs, immunosuppresseurs, biothérapies, immunosuppresseurs sélectifs et mitoxantrone.
En parallèle des traitements de fond, qui ciblent les mécanismes mêmes de la SEP, des traitements symptomatiques sont mis en place en fonction des symptômes et des séquelles des poussées de SEP.
Lien entre présence cellulaire et neuroinflammation
L’étude, menée par les chercheurs du laboratoire Infinity (Institut toulousain des maladies infectieuses et inflammatoires), commun à l’Inserm, au CNRS et à l’université de Toulouse, est basée sur les analyses sanguines de patients atteints de SEP.
Les scientifiques ont observé que lors des poussées, les patients présentent une augmentation de population de lymphocytes T folliculaires régulateurs Tfr, des cellules immunitaires connues pour inhiber des pathologies auto-immunes,
Comme l’explique au Quotidien du médecin Nicolas Fazilleau, directeur de recherche Inserm et dernier auteur de l’étude : « Mais, dans la SEP, ces cellules participent à la pathologie. Elles favorisent la migration des cellules B mémoire vers le cerveau, un mécanisme à l’origine de la neuro-inflammation. Leur présence contribue à la sévérité de la maladie ».
Un suivi sur un temps plus long d’une centaine de patients est venu confirmer ce résultat. « La fréquence de ces cellules régulatrices dans le sang des patients était parfaitement corrélée à la neuro-inflammation », poursuit-il.
Pour aller plus loin, les chercheurs ont procédé à des expérimentations sur le modèle murin. Ainsi chez des souris atteintes de SEP, mais ne possédant pas de cellules Tfr, ils ont observé une moindre migration de cellules B vers le cerveau en comparaison avec un modèle murin doté de Tfr.
Conclusion : sans l’activité des cellules Tfr, les animaux sont atteints d’une forme plus légère de la maladie, avec moins de poussées inflammatoires.
Un espoir pour anticiper la rechute
Les chercheurs espèrent maintenant pouvoir utiliser le dosage et le suivi des cellules Tfr dans le sang comme outil de prédiction des poussées. En fonction de ces résultats, il serait possible d’administrer temporairement au patient un traitement pour empêcher l’entrée des lymphocytes, et notamment les cellules B, dans le cerveau.
« Détecter une rechute avant la survenue de signes cliniques permettrait de traiter les patients en amont. C’est important, car les séquelles des rechutes sont irréversibles » précise le directeur de recherche dans les colonnes du Quotidien du médecin.
« Cette étude apporte de nouvelles connaissances sur les mécanismes en jeu dans le retournement contre soi du système immunitaire dans la SEP. Pour la première fois, nous avons identifié le rôle pro-inflammatoire des lymphocytes Tfr qui semblent favoriser l’inflammation en aidant les cellules B à atteindre le cerveau, où elles aggravent la maladie. Ces résultats apportent un éclairage nouveau sur le rôle de ces cellules et pourraient ouvrir la voie à de nouvelles approches thérapeutiques ciblant leur action » explique, à l’INSERM, Meryem Aloulou, co-dernière autrice de cette étude.
Ces travaux ouvrent le chemin vers deux applications clefs : utiliser le Tfr comme biomarqueur pour anticiper la survenue d’une poussée et mettre au point une nouvelle thérapie en bloquant l’action de ces cellules Tfr ou en régulant leur action sur les cellules B.
– Follicular regulatory T cells promote experimental autoimmune encephalomyelitis by supporting B cell egress from germinal centers. www.science.org. Consulté le 9 septembre 2025.
– Sclérose en plaques : de nouveaux éléments pour comprendre le retournement contre soi du système immunitaire. presse.inserm.fr. Consulté le 9 septembre 2025.
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