La sclérose en plaques (SEP), également nommée encéphalomyélite disséminée, est une maladie neurologique inflammatoire de type auto-immune chronique qui affecte le système nerveux central (SNC). Cette affection touche en France environ 100 000 personnes, avec jusqu’à 3000 nouveaux cas diagnostiqués chaque année.
Définition et symptômes de la sclérose en plaques
Qu’est-ce que la sclérose en plaques ?
En France, le nombre de personnes atteintes de sclérose en plaques est estimé à plus de 100 000. La répartition géographique en France est inégale avec une prévalence plus forte dans le Nord-Est que dans le Sud-ouest.
La sclérose en plaques apparaît chez les jeunes adultes entre 20 et 40 ans (pour 50% des primo-diagnostiques, les patients étaient âgés entre 25 et 35 ans) et avec une moyenne de 30 ans. La SEP est une maladie touchant davantage les femmes qui représentent 3 cas sur 4. La maladie peut également, mais dans de rares cas, apparaître dès l’enfance. Entre 3 et 10% des patients souffrant de SEP sont des enfants de moins de 18 ans.
La sclérose en plaques est caractérisée par l’apparition de plaques dites de « démyélinisation ». Il s’agit de la destruction de la myéline, substance qui recouvre les axones (prolongements des nerfs).
Pour mieux comprendre l’impact de la démyélinisation, il est nécessaire de rappeler le rôle des gaines de myéline dans la conduction du signal électrique produit et propagé par les neurones. La myéline forme des manchons répartis le long de l’axone, séparés par des portions d’axone « nu » dits nœuds de Ranvier (Figure 3). L’influx nerveux ne parcourt plus alors l’axone en continue sur toute sa longueur mais « saute » de nœuds en nœuds, augmentant la vitesse de conduction du signal à 75m/s. Sans myéline, l’axone ne permet plus de propager l’influx nerveux qu’à environ 10m/s, voire parfois allant jusqu’à l’arrêt de la transmission du signal.
Lors d’une sclérose en plaques, la démyélinisation est causée par des cellules de l’immunité : les lymphocytes T. Ces derniers sont d’ordinaire impliqués dans la défense immunitaire face aux agents pathogènes. Ils sont sélectionnés lors de leur développement afin de ne pas s’attaquer aux différentes cellules que compose l’organisme. En cas de sclérose en plaques, le processus de sélection est défaillant et des lymphocytes T dirigés contre les cellules qui constituent la myéline ne sont pas détruits et sont libérés dans l’organisme.
Après avoir atteint la zone du cerveau, ces lymphocytes T, aussi nommés « auto-réactifs » (réactifs contre les cellules du « soi »), sont à l’origine de réactions immunitaires contre les cellules composant la myéline et causent leur destruction. La myéline peut se régénérer partiellement, mais elle sera de taille plus réduite et plus sensible à une nouvelle attaque immunitaire (elle sera détruite sur une portion plus importante). Ainsi, en cas de réactions dites inflammatoires répétées sur une même zone, les neurones peuvent être endommagés au point ne plus transmettre aucun signal.
L’origine de la SEP est inconnue, mais plusieurs facteurs prédisposant ont été identifiés :
- Une prédisposition génétique. La probabilité de développer la maladie est plus importante dans les familles déjà concernées ;
- Le tabagisme actif ou passif ;
- Le climat, et plus particulièrement le manque d’ensoleillement dans les 15 premières années de vie.
À savoir ! Plusieurs études scientifiques ont été menées pour étudier le lien entre la vaccination (hépatite B et papillomavirus) et la maladie. Toutes ont la même conclusion : il n’y a aucun lien entre la vaccination et la survenue de maladie auto-immune.
Sclérose en plaques bénigne
La sclérose en plaques bénigne est constituée de poussées espacées de 10 ans ou plus avec une invalidité faible voire nulle. La récupération est complète entre chaque poussée. Ce type de SEP peut donc échapper totalement au diagnostic.
Sclérose en plaques primaire progressive (SEP-PP)
La SEP-PP se manifeste comme une forme sans poussées nettes, le patient n’a pas de phase de rémission. L’atteinte neurologique, affectant plus particulièrement la moelle épinière, et l’état du patient se dégradent de manière régulière et progressive.
Une évolution régulière et relativement rapide puis une stabilisation ou une évolution lente et continue sur de nombreuses années est possible.
Cette forme se déclare typiquement à un âge plus avancé que les autres (vers 40 ans en moyenne).
Sclérose en plaques récurrente-rémittente (SEP-RR)
Il s’agit de la forme la plus fréquente, soit 85% des cas.
Elle est constituée de poussées imprévisibles avec des phases de stabilisation ou de récupération entre chaque crise. Les poussées étant décrites comme des épisodes aigues de symptômes neurologiques persistant au moins 24h.
Au début de la maladie, la fréquence des poussées est estimée en moyenne à 2 ou 2,5 par an. Au fil des années, elle diminue progressivement.
Sclérose en plaques secondairement progressive (SEP-SP)
La SEP-SP constitue l’évolution de la SEP-RR dans la moitié des cas, après 10 à 15 ans d’évolution. L’évolution est semblable à celle de la SEP-PP, soit une aggravation progressive et continue des symptômes. Le passage de la forme SEP-RR vers SEP-SP est difficile à prévoir.
Pour résumé, une SEP peut être rémittente (majorité des cas) ou progressive (avec ou sans poussée) au début. Une forme rémittente au début peut le rester ou elle peut évoluer en forme progressive avec ou sans poussée.
Quels symptômes ?
Affectant directement le SNC, la SEP peut engendrer des symptômes sur tout le corps : troubles physiques, physiologiques, psychiques, psychotiques.
Au début de l’affection, les symptômes sont généralement passagers et varient beaucoup d’un patient à un autre. Ils dépendent de la localisation des lésions :
- Troubles moteurs comme une faiblesse musculaire, une paralysie partielle, des mouvements anormaux, etc. ;
- Troubles de l’équilibre ;
- Troubles visuels comme une diminution rapide de l’acuité visuelle ou d’une vision double ;
- Troubles sensitifs, par exemple des engourdissements, une perte de sensibilité, des fourmillements, une sensation de décharges électriques, etc. ;
- Une grande fatigue ;
- Troubles cognitifs (de l’attention et de la mémoire) ;
- Troubles urinaires ;
- Troubles digestifs, souvent une constipation ;
- Troubles sexuels ;
- Troubles de l’humeur ;
- Paralysie de la face.
À savoir ! Les symptômes cités précédemment ne sont pas spécifiques de la SEP, d’autres pathologies peuvent les causer également.
Les premiers symptômes régressent à la fin de la première poussées et la récupération est dans la plupart des cas complète. Dans 15% des cas, les symptômes ne régressent pas mais s’aggravent progressivement : c’est la SEP primaire progressive.
Diagnostic et traitement de la sclérose en plaques
Quel diagnostic ?
A cause de la variabilité des symptômes, des formes et de la rapidité d’évolution, le diagnostic de la SEP est rendu difficile. Au début, l’apparition de symptômes non spécifiques à la sclérose en plaques et leur guérison spontanée peuvent passer inaperçus, aussi bien pour le patient que son médecin. Il peut donc s’écouler un délai plus ou moins important entre le début de la maladie et la conduite d’un diagnostic.
Le diagnostic de la SEP ne repose donc pas sur un seul et unique test, il nécessite de corréler plusieurs résultats : biologiques, cliniques et radiologiques.
Examen clinique
Le médecin observe les symptômes du patient et leur évolution :
- Existence de deux épisodes de la maladie, dans les cas de SEP évoluant par poussées ;
- Évolution progressive sur 6 mois, pour les SEP à forme progressive ;
- Les lésions concernent plusieurs zones du système nerveux.
Examen neurologique
Cet examen est réalisé par un neurologue pour rechercher des indices neurologiques de la maladie.
A noter ! Si cet examen ne permet pas d’établir la cause des symptômes, il élimine cependant les maladies autres donnant des symptômes similaires.
Examen électro-physiologique
L’examen électrophysiologique, aussi appelé « test des potentiels évoqués » permet de mesurer le temps nécessaire à la transmission d’un signal visuel, auditif ou sensoriel vers le cerveau.
En cas de plaques de démyélinisation, l’examen met en évidence des ralentissements des influx nerveux. Ce test est non invasif, non douloureux et ne nécessite pas d’hospitalisation.
Imagerie par résonnance magnétique (IRM)
L’IRM est l’outil le plus performant pour détecter des lésions de démyélinisation dues à la sclérose en plaques.
Toutefois, cet examen reste peu spécifique et ne permet pas, à lui seul, d’associer les lésions observées à une sclérose en plaques.
Ponction lombaire
La ponction lombaire consiste à prélever du liquide céphalo-rachidien, le liquide dans lequel baignent le cerveau et la moelle épinière, pour l’analyser en laboratoire.
Cet examen médical nécessite une hospitalisation d’au moins 6 heures après le prélèvement. Il n’est pas sans risques ni effets secondaires (maux de têtes fréquents).
Quel traitement ?
Il n’existe aucun traitement capable de définitivement guérir la SEP.
La prise en charge de la maladie comporte différents objectifs :
- Agir sur la réaction auto-immune et les inflammations liées, c’est le traitement de la crise ;
- Réparer les lésions et favoriser la remyélinisation tout en tentant d’espacer les rechutes. C’est le traitement de fond.
- Corriger ou compenser les symptômes liés aux troubles moteurs par la rééducation afin de conserver au maximum la qualité de vie des patients atteints.
Traitement des poussées aiguës
Les poussées sont caractérisées par une apparition fulgurante de troubles neurologiques persistant au moins 24h sans fièvre ou signe d’infection.
Les principaux produits utilisés sont des corticoïdes administrés par voie IV en perfusion.
Traitement de fond
Les thérapies de fond interviennent dans la prévention des poussées et le ralentissement de la détérioration de l’état du patient atteint. Le choix du traitement de fond est fonction du patient et du mode d’évolution de la SEP.
Immunomodulateurs en première intention
Les immunomodulateurs permettent de compenser le dérèglement immunitaire généralement en cause dans la SEP, et plus largement les maladies auto-immunes.
Les interférons bêta
Les IFNβ sont des médiateurs naturellement présents dans la régulation de la réponse immunitaire. Ils agissent en inactivant les fonctions des lymphocytes T. Ils sont également capables de réduire la capacité des lymphocytes T activés à traverser la barrière hémato-encéphalique et donc les empêchent d’atteinte les neurones au niveau du cerveau.
Actuellement, les IFNβ constituent un traitement de première intention pour les patients présentant une SEP-RR avec au moins deux poussées lors des deux années précédentes. La première prescription et le renouvellement sont exclusivement réservés aux neurologues.
Les effets indésirables notables avec ces traitements sont des syndromes pseudo-grippaux (fièvre, frissons, myalgies, céphalées, malaise) qui affectent 52% des patients sous IFNβ-1b. Des réactions locales, au niveau du point d’injection sont également rencontrées pour 85% des patients sous IFNβ-1b.
L’acétate de glatiramère
Ce traitement permet de réduire de manière significative le nombre de poussées sur une période prolongée (au moins six ans).
Le glatiramère est prescrit aux patients intolérants aux interférons ou pour lesquels son utilisation est contre-indiquée (épilepsie non contrôlée, hypersensibilité).
L’efficacitéglatiramène est la même que celle de l’IFNβ sur la prévention et le délai entre chaque nouvelle poussée. Ce médicament est également prescrit exclusivement par un neurologue et sous surveillance étroite.
Certains effets indésirables sont fréquents après l’injection (bouffée vasomotrice, sensation d’oppression et de douleur thoraciques, dyspnée, palpitations, tachycardie). Comme avec les interférons, des réactions locales (érythème, douleur, œdème, inflammation et hypersensitivité) peuvent être observées. Enfin, des arthralgies, des rashs, des œdèmes périphériques et des tremblements peuvent survenir à plus long terme.
Le diméthyl fumarate (Tecfidera)
Le diméthyl fumarate est indiqué dans les formes de SEP intermittentes du jeune adulte. Son administration est sous-cutanée ou intramusculaire.
Les effets indésirables les plus rencontrés sont digestifs, par exemple : des diarrhées, nausées, douleurs abdominales.
Le tériflunomide (Aubagio)
Le tériflunomide est un immunomodulateur disponible sous forme de comprimés et indiqué dans les formes rémittentes.
A noter ! Le mécanisme d’action exact de ce médicament sur la SEP est encore mal connu.
Les anticorps monoclonaux
Ces anticorps ont pour rôle d’empêcher les lymphocytes T de traverser la barrière hémato-encéphalique. Ils permettent d’obtenir une réduction de 68% du nombre de poussées et réduit de moitié la progression de la maladie pour un traitement d’au moins deux ans.
Ce traitement est utilisé seul pour des formes SEP-RR sévères à évolution rapide ou des formes agressives insensibles aux interférons bêta. Il est contre-indiqué chez l’enfant et la personne âgée.
L’ocrelizumab (Ocrevus) est prescrit pour les formes de SEP d’emblée progressive.
A noter ! Le développement de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) est l’effet indésirable le plus craint avec les anticorps monoclonaux d’où une surveillance renforcée. Une LEMP est une atteinte cérébrale d’origine infectieuse. Elle est provoquée par la réactivation d’un virus gardé latent par le système immunitaire et dont les premiers signes cliniques sont similaires aux poussées de SEP.
Immunosuppresseurs en seconde intention
Les immunosuppresseurs (mitoxantrone, natazilumab, fingolimod) ne sont plus utilisés en première intention mais réservés aux cas de formes sévères (SEP-SP agressives) en raison de leur efficacité variable couplée à une cardiotoxicité élevée et une hématotoxicité (diminution de la production de plaquettes et de cellules sanguines par la moelle osseuse).
À savoir ! La SEP fait partie des pathologies reconnues en affection de longue durée ou ALD. Ainsi, tous les examens ou soins en rapport avec la maladie sont pris en charge à 100%.
Publié le 23 mai 2016. Mis à jour par Charline D., Docteur en pharmacie, le 5 juillet 2021.