Chaque année en France, près de 3 000 nouveaux cas de cancer du col de l’utérus sont diagnostiqués et environ 1 000 femmes en décèdent. La prévention repose sur la vaccination contre les infections à Papillomavirus recommandée chez toutes les jeunes filles avant le début de la vie sexuelle. À ce jour, la couverture vaccinale reste modeste en France. Parmi les explications possibles, une récente étude suggère le rôle crucial du médecin.
Vaccination et cancer du col de l’utérus
Environ 8 femmes sur 10 sont exposées aux Papillomavirus humains au cours de leur vie et dans plus de la moitié des cas, l’infection survient au début de la vie sexuelle. Le plus souvent, ces infections passent inaperçues, car elles n’entraînent aucun symptôme et n’ont aucune conséquence sur la santé. Mais dans moins de 10 % des cas, elles provoquent des lésions précancéreuses au niveau du col de l’utérus. Pour les Papillomavirus dits à haut risque, ces lésions peuvent évoluer vers un cancer du col de l’utérus après 10 à 20 ans.
Les Papillomavirus humains à haut risque sont principalement les HPV 16 et 18, qui sont responsables :
- De près de 75 % des cancers du col de l’utérus ;
- Du cancer du vagin et de la vulve chez les femmes ;
- Du cancer de l’anus dans les deux sexes.
La prévention du cancer du col de l’utérus repose deux méthodes :
- La détection des lésions précancéreuses par les frottis de dépistage, qui doivent être effectués régulièrement par un médecin généraliste, un gynécologue ou une sage-femme ;
- La vaccination contre les infections à Papillomavirus humains à haut risque.
Deux vaccins sont actuellement disponibles en France :
- Le vaccin Gardasil protège contre les Papillomavirus humains à haut risque (HPV 16 et 18) et contre les deux Papillomavirus responsables d’environ 90 % des verrues génitales ;
- Le vaccin Cervarix protège contre les HPV 16 et 18.
Ces vaccins ne protègent pas contre tous les Papillomavirus, et la réalisation des frottis reste recommandée jusqu’à 65 ans.
En France, la vaccination contre les infections à Papillomavirus est recommandée dans les situations suivantes :
- Toutes les jeunes filles de 11 à 14 ans, avec un rattrapage vaccinal entre 15 et 19 ans en fonction du début de la vie sexuelle ;
- Jusqu’à l’âge de 19 ans chez les hommes ayant reçu une greffe et les hommes séropositifs ;
- Jusqu’à l’âge de 26 ans pour les hommes ayant ou ayant eu des relations sexuelles avec d’autres hommes.
Effectuée avant le début de la vie sexuelle, la vaccination procure une protection de 100 % contre les Papillomavirus à haut risque.
À savoir ! Les vaccins contre les infections à Papillomavirus sont pris en charge à 65 % par l’Assurance Maladie, lorsqu’ils sont prescrits par un médecin dans le cadre des recommandations vaccinales en vigueur.
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Une couverture vaccinale à la traîne en France
Au Royaume-Uni, au Portugal et en Espagne, la vaccination est réalisée en milieu scolaire, ce qui permet d’obtenir une forte couverture vaccinale. Dans certains pays où la couverture vaccinale est importante, comme en Australie et en Angleterre, les cas de lésions précancéreuses et de verrues génitales ont nettement régressé au cours des 10 dernières années.
Depuis 10 ans, plus de 200 millions de doses de vaccins ont été administrées dans 132 pays. Sur cette période, aucun effet indésirable susceptible de remettre en cause l’intérêt de cette vaccination n’a été notifié. De même, le nombre de maladies auto-immunes chez les jeunes filles vaccinées est similaire à celui des jeunes filles non vaccinées.
La vaccination contre les infections à Papillomavirus a été introduite en France en 2007, mais la couverture vaccinale y reste faible, autour de 20 % contre 80 à 90 % dans plusieurs pays industrialisés.
À savoir ! Dans certains pays, filles et garçons sont systématiquement vaccinés, afin de limiter la circulation des Papillomavirus dans la population et de réduire les conséquences de ces infections pour les deux sexes.
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Le rôle clé du médecin face au Papillomavirus
La faible couverture vaccinale contre les infections à Papillomavirus est une particularité française. Quelles sont les raisons d’une telle différence ? La plupart du temps, les raisons avancées sont le coût du vaccin, des réticences culturelles ou sociales, mais surtout la défiance d’une partie de la population envers la vaccination, suite aux différentes campagnes anti-vaccins menées au fil des années. Mais les médecins influenceraient également le taux de vaccination, selon une récente étude.
Un échantillon représentatif de 16 médecins (généralistes, gynécologues, pédiatres, internistes) a été sélectionné pour mieux cerner leur rôle dans cette vaccination. Les médecins ont déploré une insuffisance d’informations fiables et accessibles, à la fois pour les professionnels de santé et pour le grand public. Ils ont indiqué ne pas mentionner systématiquement l’existence de ce vaccin, notamment par manque de temps.
Par ailleurs, le sujet de la vaccination contre les infections à Papillomavirus est étroitement lié à la sexualité des patients, un sujet qui reste selon eux tabou dans la société française et donc difficile à aborder avec de jeunes patientes et/ou avec leurs parents.
Certains médecins se positionnent contre ce vaccin, d’autres indiquent seulement ne pas le proposer. Les parents se retrouvent souvent face à un dilemme entre la crainte d’effets secondaires et le souhait de protéger leur enfant. Le discours du médecin est alors capital dans la décision du patient d’accepter ou non la vaccination.
Une information détaillée et une formation plus poussée des médecins sur les questions de sexualité pourraient leur permettre de convaincre leurs patients de l’intérêt du vaccin contre les infections à Papillomavirus. Un levier possible pour améliorer la couverture vaccinale.
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Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Le vaccin contre les infections à Papillomavirus humains. Vaccination Info Service. Mis à jour le 19 octobre 2017.
– HPV vaccination rate in French adolescent girls: an example of vaccine distrust. Lefèvre, H. and al. 2017. Arch Dis Child. Dec 8. pii.