Vivre proche des zones viticoles : quels niveaux d’exposition aux pesticides ?
La menace des pesticides sur la santé et l’environnement inquiète, à juste titre, de plus en plus les citoyens. Dans une étude récente, PestiRiv, Santé Publique France et l’agence nationale santé environnement (ANSES) ont qualifié et quantifié, dans six régions viticoles françaises, le niveau de contamination aux pesticides de l’environnement et l’imprégnation des riverains. Focus sur les principales conclusions de cette étude menée de 2021 à 2022.

Cadre de l’étude PestiRiv
Inédite, l’étude PestiRiv, dont le coût avoisine les 11 millions d’euros, évalue les répercussions d’une exposition aux produits phytosanitaires comme les fongicides, les herbicides ou encore les insecticides.
Au total, ce sont 265 sites répartis dans 6 régions viticoles qui sont inclus dans l’étude dont Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Les échantillons prélevés, sur une quinzaine de jours, concernent 1 946 adultes de 18 à 79 ans et 742 enfants de 3 à 17 ans vivant proche des vignes (à moins de 500 mètres) ou vivant éloignés des vignes (à plus de 1 kilomètre).
Tous ces volontaires ont accueilli les scientifiques de l’étude qui ont procédé à des échantillonnages environnementaux et biologiques couvrant ainsi l’air ambiant et l’air intérieur, les poussières, les urines, les cheveux et les aliments autoproduits.
Au total, ce sont 56 pesticides qui ont été recherchés dans ces milieux biologiques et environnementaux.
L’exposition concerne aussi bien des substances très spécifiques de la vigne (par exemple le folpel ou le métirame) que des substances plus généralistes (comme le cuivre, le glyphosate, le fosétyl-aluminium, la spiroxamine).
Toutes ces données récoltées ont pour but de mesurer l’impact de l’exposition aux pesticides des personnes vivant proche des vignes et de celles vivant loin de toute culture.
D’autres questions pourront également trouver des éléments de réponses : quels sont les facteurs comportementaux et environnementaux qui influencent les niveaux d’exposition ? Comment recouper les données biologiques entre elles ? Observe-t-on des fluctuations d’une région à une autre et d’une temporalité à une autre (météo et périodes ou non de traitements des vignes) ?
Une population logiquement plus exposée
Les résultats de l’étude montrent que :
- Les riverains des zones viticoles sont plus exposés aux pesticides appliqués sur ces cultures que les personnes éloignées de toutes cultures ;
- L’exposition aux pesticides est plus aigüe en période de traitement, notamment de mars à aout ;
- L’imprégnation biologique en zones viticoles est observée à la fois chez les adultes et les enfants.
L’imprégnation urinaire est supérieure de 15 à 45% et l’augmentation de la contamination des poussières est dix fois plus élevée, celle de l’air ambiant 12 fois supérieure.
Et logiquement, deux facteurs d’exposition sont mis en évidence : les quantités de produits utilisés et la proximité des habitations avec les vignes. D’autres facteurs augmentent l’exposition comme le temps passé à l’extérieur et le fait d’aérer longuement son logement.
Les comportements associés à une diminution du niveau d’exposition sont :
- Enlever ses chaussures avant de rentrer dans le logement ;
- Nettoyer son logement avec une serpillière ou un aspirateur au moins une fois par semaine ;
- Faire sécher son linge à l’intérieur plutôt qu’à l’extérieur ;
- Disposer d’une ventilation mécanique (VMC) ;
- Éplucher les fruits du jardin et limiter la consommation d’œufs de poulaillers domestiques.
Appliquer le principe de précaution en attendant des études plus précises
Les riverains de zones viticoles ne sont pas plus imprégnés de pyréthrinoïdes, de cuivre ou de glyphosate que la population générale, mais présentent des traces plus importantes de folpel (un fongicide utilisé contre le mildiou) ou de metiram (un fongicide également, interdit en 2024).
« Les niveaux d’imprégnation mesurés chez les personnes vivant en zones viticoles sont globalement du même ordre de grandeur que ceux observés en population générale en France ou à l’étranger lorsque des données sont disponibles (ETU, cuivre, glyphosate, AMPA et métabolites de pyréthrinoïdes) » lit-on dans le compte rendu sur l’imprégnation biologique de l’ANSES.
Retenons donc que les données traduisent une exposition réelle, mais les niveaux mesurés restent faibles en valeur absolue. Les niveaux mesurés dans l’étude restent très largement en deçà des seuils réglementaires associés à un risque sanitaire (métabolite du mancozèbe, du glyphosate et de certains pyréthrinoïdes).
Cependant, cette étude ne fait pas le lien entre niveaux d’imprégnation et impacts sur la santé.
Les investigations ne font que commencer et il est nécessaire de continuer à travailler sur :
- Les analyses des risques ;
- La détermination des valeurs seuils des produits ;
- La présence ou non de conséquences biologiques liées à la coexposition et aux cumuls.
En attendant ces futures études indispensables pour mieux comprendre les effets sanitaires d’une telle exposition aux pesticides en zones viticoles, les responsables de PestiRiv recommandent de limiter le recours aux produits phytosanitaires comme stipulé dans la stratégie Ecophyto 2030.
Aussi, une campagne d’information systématique auprès des riverains sur les périodes de traitement devra être mise en place afin qu’ils puissent modifier leurs comportements et habitudes de vie (fermeture ouvertures de la maison et lavage plus assidu des sols et surfaces).
– PestiRiv-Tome 2 – Résultats d’imprégnation biologique. ANSES.. www.anses.fr. Consulté le 24 septembre 2025.
– Pestiriv : une étude d'ampleur confirme l'exposition plus élevée des populations riveraines de cultures. www.actu-environnement.com. Consulté le 24 septembre 2025.
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