Au cours des décennies, l’alimentation des nourrissons s’est diversifiée de plus en plus tôt. Régulièrement les experts nationaux, européens et internationaux établissent des recommandations sur cette étape capitale, grâce à l’acquisition de nouvelles connaissances, mais aussi en fonction de l’évolution des comportements alimentaires. En Europe, les dernières recommandations dataient de 2008 et viennent d’être mises à jour.
Pas de diversification avant l’âge de 4 mois
L’ESPGHAN (European Society for Paediatric Gastroenterology Hepatology and Nutrition) est une société européenne regroupant des professionnels de l’alimentation, de la gastro-entérologie et de l’hépatologie pédiatrique. Dans une récente publication, elle dévoile ses dernières recommandations, concernant la diversification alimentaire des nourrissons grandissant en Europe.
A noter ! La diversification alimentaire correspond à l’introduction dans l’alimentation des nourrissons de tous les aliments solides ou liquides, autres que le lait maternel ou infantile.
Conformément aux recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé, l’allaitement maternel exclusif est préconisé pendant les six premiers mois de vie, car le lait maternel permet de couvrir l’ensemble des besoins nutritionnels du nourrisson sur cette période. Avant l’âge de 4 mois (soit 17 semaines), les appareils digestifs et rénaux du nourrisson ne sont pas matures et l’introduction d’aliments autres que le lait maternel ou infantile peut être nuisible à sa santé.
La diversification alimentaire ne doit pas débuter avant le début du cinquième mois et il est préférable de maintenir un allaitement prédominant jusqu’au début du septième mois (soit 26 semaines). L’idéal est de débuter la diversification vers 6 mois. La poursuite de l’allaitement durant l’introduction de l’alimentation solide est conseillée par les spécialistes.
Par ailleurs, le lait entier de vache ne doit pas devenir la boisson principale avant l’âge de 12 mois, en raison de ses apports importants en protéines et en graisses. De petites quantités peuvent néanmoins être utilisées lors de la préparation des aliments.
Lire aussi – Allaitement : où en est-on en France ?
Allergènes, gluten, régimes particuliers, …
Certains aliments sont-ils déconseillés pour les nourrissons ? La diversification alimentaire doit être principalement basée sur les légumes verts, avec un élargissement progressif du spectre alimentaire. Les nourrissons doivent notamment consommer suffisamment d’aliments riches ou enrichis en iode, afin d’éviter une carence et ses conséquences pour la santé. Les aliments destinés aux nourrissons ne doivent contenir aucun sucre ou sel ajouté, et les boissons édulcorées sont à proscrire.
Concernant les aliments potentiellement allergisants, les études ont mis en évidence que les risques de développer une allergie sont majorés si le nourrisson consomme ces aliments avant l’âge de 4 mois. En revanche, retarder au-delà de 4 à 6 mois l’introduction de ces aliments n’influence pas la survenue d’une allergie. Les aliments potentiellement allergisants peuvent ainsi être introduits dès le début de la diversification alimentaire. Pour les enfants présentant un risque élevé d’allergie à l’arachide, l’introduction de produits à base d’arachide peut être effectuée entre 4 et 11 mois, en parallèle d’un suivi par un médecin spécialiste.
Attention ! Il ne faut jamais donner de cacahuètes à un nourrisson ou un jeune enfant en raison d’un risque important de fausse route. Mais il est possible d’utiliser de l’huile d’arachide pour préparer les aliments ou de lui donner certains produits contenant de la pâte d’arachide.
Le gluten peut être introduit dans l’alimentation entre 4 et 12 mois, à condition de limiter les quantités consommées. Les nourrissons et les jeunes enfants ne doivent pas consommer de grandes quantités de gluten. Cependant, les doses optimales restent à définir.
De même, les apports en protéines doivent rester modérés. Lorsqu’ils sont importants, ils semblent accroître le risque de surpoids ou d’obésité à moyen-long terme. Ainsi, il est préconisé que ces apports soient inférieurs à l’équivalent de 15 % des apports énergétiques quotidiens.
Actuellement, les régimes végétariens, végétaliens et vegan sont en plein essor. Les parents doivent être informés que ces régimes peuvent entraîner des conséquences graves voire mortelles pour leurs enfants. Ils ne peuvent donc être entrepris dès la diversification alimentaire que dans le cadre d’un suivi médical et diététique strict et régulier. Sont notamment surveillés les apports en vitamines (B9 et B12), en iode, en zinc, en acides gras polyinsaturés, en protéines et en calcium.
Lire aussi – Contre l’allergie à l’arachide, des cacahuètes au menu de bébé ?!
Une étape cruciale dans le développement de l’enfant
La diversification alimentaire est l’occasion pour les nourrissons d’expérimenter et de goûter des aliments aux saveurs et aux textures diverses, avec un accent largement mis sur les légumes verts. Les parents doivent apprendre à satisfaire l’appétit de leur enfant mais aussi à respecter sa satiété. En aucun cas, les aliments ne doivent être utilisés comme une récompense ou une punition.
Par ailleurs, les aliments doivent être adaptés à l’âge de l’enfant, en termes de texture et de consistance. Il n’est pas utile de prolonger l’utilisation des textures lisses, les enfants étant capables de manger des morceaux fondants, dès l’âge de 8 à 10 mois. Vers 12 mois, les enfants doivent principalement boire avec une tasse (ou tasse à bec), plutôt qu’avec un biberon.
La diversification alimentaire est une étape capitale pour les nourrissons, au niveau de la nutrition et du comportement. Elle intervient au moment d’une phase de croissance et de développement rapides de l’enfant, durant laquelle il faut absolument le préserver des insuffisances ou des carences, mais aussi des excès. Leur future santé d’enfant, d’adolescent et d’adulte en dépend !
Lire aussi – Alimentation des enfants : Attention danger !
Estelle B. / Docteur en Pharmacie
– Diversification alimentaire : évolution des concepts et recommandations. Turck, D. and al. 2015. Archives de Pédiatrie 22 : 457-460.
– Complementary Feeding: A Position Paper by the European Society for Paediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition (ESPGHAN) Committee on Nutrition. Fewtrell, Mary and al. 2017. J Pediatr Gastroenterol Nutr 64:1.