Avec près de 85 000 appendicectomies réalisées en 2012 en France, le traitement chirurgical de l’appendicite est une intervention courante, surtout chez les jeunes de moins de 20 ans. Plusieurs études ont suggéré la possibilité de traiter cette infection uniquement par des antibiotiques. Une possibilité à laquelle ne semble adhérer ni les chirurgiens, ni les patients dans leur grande majorité !
Appendicite et appendicectomie
L’appendicite aigüe est une inflammation soudaine de l’appendice iléo-caecal (petit segment d’intestin en forme de diverticule) liée à une prolifération bactérienne. Depuis plus d’un siècle, le traitement de cette infection repose sur la chirurgie. L’intervention chirurgicale, appelée une appendicectomie, consiste en l’ablation de l’appendice infecté.
L’appendicectomie est réalisée selon deux techniques :
- Classiquement, avec une ouverture pratiquée au niveau de l’abdomen ;
- Par cœlioscopie, à l’aide d’une micro-caméra et de mini-instruments chirurgicaux, introduits grâce à des petites incisions dans l’abdomen.
Au cours de l’intervention chirurgicale, le patient est perfusé pour assurer son hydratation et permettre l’injection par voie intraveineuse de médicaments antalgiques (contre la douleur) et antibiotiques.
Aujourd’hui, la cœlioscopie est la technique la plus couramment employée, car elle limite les complications post-opératoires et réduit la période de convalescence du patient.
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Des antibiotiques pour traiter l’appendicite !
L’appendicite aigüe correspond à une infection de l’appendice, suite le plus souvent à l’accumulation de résidus ou de corps étrangers. Des chercheurs ont alors évoqué la possibilité de traiter l’appendicite sans intervention chirurgicale, mais uniquement avec un traitement antibiotique adapté. En 2015, un essai clinique est mené sur 530 patients, atteints d’une appendicite aigüe non compliquée, et traités par une antibiothérapie.
À savoir ! Les patients atteints d’une forme compliquée d’appendicite doivent impérativement être traités par une intervention chirurgicale.
Parmi ces patients, 73 % n’ont pas nécessité d’appendicectomie dans l’année suivant le traitement antibiotique et les 27 % restants ont été opérés suite à l’antibiothérapie, sans un risque accru de complications post-opératoires, par rapport à des patients opérés dès la découverte de l’appendicite. Ces résultats ont alors engendré un vaste débat médical.
Les chirurgiens ont largement mis l’accent sur les 27 % de patients qui au final ont nécessité une intervention chirurgicale, en concluant à l’échec de l’antibiothérapie. De plus, ils ont remis en question la méthodologie de l’essai, notamment sur deux points :
- La technique chirurgicale employée était la méthode traditionnelle, tandis qu’aujourd’hui la cœlioscopie est la technique la plus utilisée ;
- L’antibiotique utilisé, l’ertapénème, perfusé pendant 72 heures, n’est pas l’antibiotique recommandé en première intention contre l’appendicite.
Si les chirurgiens semblent opposés à l’antibiothérapie pour traiter l’appendicite, que pensent les patients d’une telle alternative ?
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Des patients qui préfèrent toujours la chirurgie
Aujourd’hui, suite aux études menées sur l’antibiothérapie contre l’appendicite, les patients pourraient se montrer tentés d’éviter une intervention chirurgicale. Pourtant, les résultats d’une enquête récente montrent qu’ils continuent à préférer la chirurgie.
Au total, 1 728 personnes ont ainsi participé à une enquête en ligne et 220 personnes ont été interrogées après avoir été informées sur l’appendicectomie, les techniques chirurgicales et le traitement antibiotique seul.
Les résultats indiquent que, pour eux-mêmes :
- 85,8 % des patients choisiraient une appendicectomie par cœlioscopie ;
- 4,9 % choisiraient l’appendicectomie classique ;
- 9,4 % choisiraient l’antibiothérapie seule.
Pour leur enfant, parmi ces mêmes patients :
- 79,4 % choisiraient l’appendicectomie par cœlioscopie ;
- 6,1 % l’appendicectomie classique ;
- 14,5 % les antibiotiques seuls.
La plupart des patients s’orientent donc, pour eux ou pour leurs enfants, vers la chirurgie. Mais près d’une personne sur 10 opterait pour les antibiotiques, un chiffre que médecins et chirurgiens ne peuvent ignorer. L’appendicite pourrait ainsi être traitée avec une approche personnalisée, établie après concertation entre le chirurgien et le patient. Une opportunité pour le chirurgien d’expliquer au patient les raisons qui motivent son choix pour la chirurgie, telles que :
- Les risques de l’antibiothérapie, notamment le développement d’une antibiorésistance ou d’infections coliques à Clostridium difficile;
- Le risque de récidive ;
- Un temps d’hospitalisation réduit grâce à la cœlioscopie.
Dans tous les cas, une excellente occasion d’améliorer le dialogue entre le patient et le chirurgien !
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Estelle B. / Docteur en Pharmacie
– Le traitement chirurgical de l’appendicite aiguë. AMELI Santé. 12 mai 2017.
– Patient Preferences for Surgery or Antibiotics for the Treatment of Acute Appendicitis. Hanson, A.L. and al. 2018. JAMA Surgery. doi:10.1001/jamasurg.2017.5310.