On les savait attentifs et intuitifs face à leur environnement, capables de décrypter les hiérarchies sociales ou encore doués de différentes formes de communications mais, ces bébés, âgés de 12 à 18 mois, peuvent-ils aussi faire preuve de logique ? Leur mental possède-t-il déjà certaines bases de raisonnements ? A en croire l’expérience menée par une équipe de chercheurs espagnols, polonais et hongrois, les bambins sont tout à fait capables de raisonner avec cohérence et même, avant l’apparition du langage. Focus sur l’étude parue dans la revue Science.
Des déductions logiques dès l’âge d’un an
Les chercheurs, dirigés par le professeur Luca Bonatti du centre de recherche sur le cerveau et la cognition de l’université Pompeu Fabra de Barcelone, ont mis en évidence que les enfants âgés de 12 à 19 mois sont capables de raisonner.
Cette découverte montre donc, une nouvelle fois, que l’acquisition du langage n’est pas une condition sine qua non pour faire preuve de logique.
Afin de réaliser ce travail, les chercheurs ont constitué deux groupes de volontaires constitués chacun par 24 enfants. Le premier groupe était formé par les enfants âgés d’un an tandis que le deuxième regroupait ceux étant âgés de 19 mois.
Tout en étant accompagné d’un de leurs parents, les enfants ont visionné des petites animations vidéo de moins de deux minutes où deux objets colorés (ballons, serpents, fleurs etc… et présentant une partie identique) apparaissaient à l’écran, puis disparaissaient car cachés par un cube noir ou un chaudron pour enfin, réapparaitre.
Certaines de ces vidéos semblaient logiques, tandis que d’autres, au contraire, allaient à l’encontre de la raison. Par exemple, un personnage réapparaissait deux fois au lieu d’une.
Comme les enfants ne pouvaient pas communiquer, les chercheurs ont filmé leurs yeux pendant le déroulement des vidéos.
Grâce à l’observation de leurs mouvements oculaires, les chercheurs ont pu mesurer leur niveau d’étonnement ou de confusion en fonction du temps qu’ils mettaient à fixer le personnage qui réapparaissait de manière illogique.
A ce moment, qualifiée de « déduction potentielle », les pupilles des bébés se dilataient et leurs yeux fixaient plus longtemps l’objet incohérent.
Un comportement que l’on retrouve également chez des adultes surpris par le dénouement absurde d’une situation !
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Mieux comprendre le mental des bébés
Il existe différentes formes de raisonnements logiques et ici les enfants ont répondu à une logique nommée type « syllogisme disjonctif ».
Ce raisonnement permet de dire : « si A ou B est vraie, alors si A est faux, c’est que B est vraie ».
Selon Luca Bonatti, les enfants font preuve de déduction probabiliste grâce à un « modèle interne » de la logique inscrite dans la situation observée.
Cette construction mentale consistant à réaliser des simulations probabilistes s’appuyant sur des principes de compréhension du monde physique et sur l’idée de la continuité spatio-temporelle des objets physiques.
Cette hypothèse émise par le chercheur principal de l’étude expliquerait d’ailleurs les compétences des bébés sur :
- Le sens des probabilités ;
- Le concept d’objet ;
- La compréhension de la hiérarchie sociale ;
- Le sens du nombre.
Pour les chercheurs, ce test pourrait être mis en place pour mesurer la capacité cognitive de logique chez les nourrissons et repérer précocement des troubles de raisonnement.
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Julie P. Journaliste scientifique
– Le sens des probabilités chez l’enfant. Stanislas Dehaene. College de France. Consulté le 26 mars 2018.
Merci Julie pour cet article très intéressant !
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