Bruit au travail : un facteur de risque encore trop négligé
Pour près de 6 actifs sur 10, le bruit au travail représente une gêne au quotidien. Plus qu’un simple désagrément, les nuisances sonores professionnelles peuvent affecter la santé auditive, altérer la qualité de vie et aggraver les risques psychosociaux. Si la réglementation encadre strictement les seuils d’exposition, les efforts de prévention restent inégaux. Quels sont les effets concrets du bruit sur la santé ? Comment les prévenir efficacement ? Cet article fait le point sur un enjeu encore trop souvent relégué au second plan.

Le bruit au travail, une nuisance pour plus de la moitié des actifs
Selon l’enquête réalisée par l’IFOP en 2024 pour l’Association Nationale de l’Audition, 62 % des personnes en emploi se disent gênées par le bruit dans leur environnement de travail. Un chiffre en constante augmentation ces dernières années.
Tous les secteurs sont concernés, des chantiers de construction aux open spaces, en passant par les ateliers, les espaces de service ou les bureaux partagés. Le bruit provient de multiples sources : machines, ventilation, sonneries, conversations multiples ou encore visio-conférences simultanées. En open space, jusqu’à 74 % des personnes déclarent être gênées par le bruit sur leur lieu de travail. Il ne s’agit donc pas uniquement de niveaux sonores élevés, mais aussi de sollicitations continues qui nuisent à la concentration.
Les effets rapportés sont nombreux : fatigue, irritabilité, difficultés à se concentrer, troubles du sommeil, mais aussi douleurs auditives, acouphènes, voire surdité progressive. L’impact est également perceptible sur le moral et l’engagement professionnel, contribuant à une dégradation du bien-être global au travail, voire au burn out.
Les effets délétères du bruit sur la santé auditive et mentale
Les nuisances sonores prolongées ne se limitent pas à une gêne passagère. Le bruit est reconnu comme un facteur de stress chronique, avec des effets cumulatifs sur l’organisme. L’exposition répétée peut provoquer :
- Une altération de l’audition (surdité partielle, acouphènes, gêne auditive) ;
- Une augmentation du stress et de la charge mentale ;
- Une perturbation du sommeil et une fatigue chronique ;
- Une élévation du risque cardiovasculaire et de l’hypertension artérielle.
Selon les données de l’enquête ANA, 73 % des actifs évoquent au moins une répercussion sur leur santé liée au bruit, et près d’un sur deux, une atteinte auditive. Les travailleurs de tous les secteurs sont touchés de l’industrie, au bâtiment en passant par les services ou l’administration.
La prévention des risques liés au bruit encore trop peu appliquée
Le Code du travail encadre strictement l’exposition au bruit en entreprise. Trois seuils réglementaires sont définis :
- 80 dB(A) (valeur d’exposition inférieure déclenchant l’action) : première alerte nécessitant des mesures de prévention.
- 85 dB(A) (valeur supérieure) : déclenchement d’un plan d’action correctif.
- 87 dB(A) (valeur limite d’exposition) : seuil à ne jamais dépasser, même en tenant compte des protections auditives.
L’évaluation du niveau sonore doit être réalisée par l’employeur. Les salariés doivent être informés des risques et formés à l’usage des équipements de protection. Pourtant, seuls 31 % des actifs déclarent que des dispositifs (bouchons, casques anti-bruit) sont mis à leur disposition. Moins d’un salarié sur quatre bénéficie d’un espace pour s’isoler du bruit ou d’actions de sensibilisation spécifiques.
L’exposition sonore se mesure selon deux paramètres : le niveau d’exposition moyen sur 8 heures (Lex,8 h) et le niveau de crête pour les bruits très courts (LpC). Ces données déterminent les obligations de prévention : mise à disposition de protections, examens audiométriques, actions correctives. Même en dessous des seuils réglementaires, le bruit reste un facteur de risque avéré, notamment en cas d’exposition répétée.
Le bruit au travail n’est pas une fatalité. S’il peut sembler difficile à éviter, il existe pourtant des solutions concrètes pour le limiter et en réduire les effets : conception d’espaces plus silencieux, mise à disposition de protections adaptées, régulation des volumes sonores, prévention et suivi médical. Les nuisances sonores méritent une attention équivalente à celle portée aux autres risques professionnels. Reconnaître le bruit comme un enjeu de santé au travail, c’est protéger l’audition, mais aussi la concentration, la sérénité et la qualité de vie des salariés.
– Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). www.inrs.fr. Consulté le 15 juillet 2025.
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