Cancer : polémique sur les dépistages

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Rédigé par Isabelle V. et publié le 27 mars 2017

Le dépistage organisé de la maladie fait partie de la lutte contre le cancer. Cependant, dans le corps médical, des voix s’élèvent contre ces pratiques systématiques. Elles seraient la cause de surdiagnostic, voire dangereuses, et ne diminueraient pas la mortalité. Qu’en est-il réellement ? Le 1er mars, l’Académie Nationale de Médecine a organisé un débat public pour faire le point. Santé sur le Net vous fait part de ses recommandations.

cancer depistages

Cancers du côlon et du col de l’utérus

Pour ces deux cancers, le bénéfice du dépistage organisé est incontestable. La technique est simple et peu invasive :

  • Frottis cervical chez le gynécologue pour le cancer du col de l’utérus ;
  • Kit de dépistage sur les selles donné par le médecin traitant pour le cancer colorectal.

Cependant, seulement 48 % des femmes et 40 % des sujets de plus de 50 ans se font dépister pour ces deux types de cancer. Regrettable, lorsqu’on sait que ces dépistages permettent de repérer des lésions précancéreuses.

L’Académie Nationale de Médecine précise que le dépistage du cancer du côlon permet de diminuer la mortalité de 15 à 18 % chez les plus de 50 ans.

A savoir ! L’Académie Nationale de Médecine est un panel de médecins, pharmaciens et scientifiques reconnus pour leurs travaux. Depuis sa fondation au XVIIIème siècle, elle a compté en son sein 11 prix Nobel. Sa caractéristique est son indépendance. Elle peut être saisie (par les pouvoirs publics) ou s’auto saisir de demandes d’avis dans le domaine médical.

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Cancer du sein : des doutes persistent

Le dépistage du cancer du sein passe par la mammographie (radios des seins sous différentes incidences). En France, cet examen est préconisé et gratuit tous les deux ans après 50 ans et jusqu’à 75 ans.

La mammographie est accusée d’entraîner des surdiagnostics : c’est-à-dire que l’on détecte chez certaines femmes des lésions précancéreuses qui n’auraient jamais évolué. Selon l’INCa (Institut National du Cancer), ce surdiagnotic serait de 10 à 20 %, soit 2 à 3 cas pour un décès évité. Cependant, ce taux varie selon les enquêtes de 0 à 60 % …

Avant 50 ans, la mammographie serait responsable de plus d’inconvénients que de bénéfices. Pourtant, en France, 77 % des femmes ont déjà subi plusieurs mammographies avant cet âge.

A savoir ! De nombreuses techniques d’imagerie médicale utilisent les rayons X (comme la mammographie). Cependant, ceux-ci ne sont pas dénués d’un certain effet cancérogène. Chez les femmes de plus de 50 ans, les cancers induits par la mammographie seraient responsables de 1 à 5 décès pour 100 000 patientes ayant subi l’examen. Le risque est plus élevé avant cet âge, les seins étant plus denses et l’examen nécessitant alors des doses plus fortes de rayons X. C’est pourquoi, le dépistage n’est pas conseillé avant 50 ans.

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Cancer de la prostate : une explosion de diagnostics due au dépistage

Malgré l’avis défavorable de nombreuses instances de santé, le dépistage du cancer de la prostate par PSA est quasi-systématique chez les plus de 50 ans. Le PSA (prostate specific antigen) est une protéine de la prostate que l’on retrouve dans le sang. Son augmentation est signe de souffrance prostatique, quelle qu’en soit l’origine. Parallèlement à l’augmentation des prises de sang, le nombre de malades a explosé, passant de 10 000 en 1980 à 54 000 en 2011. Or, d’après l’avis de l’Académie Nationale de Médecine, la moitié des cancers prostatiques chez les hommes âgés de 55 à 67 ans détectés après 4 dosages de PSA seraient restés latent (inactif) toute leur vie.

A savoir ! Ce problème de surdiagnostic semble également concerner le cancer de la thyroïde. Le nombre de nouveaux cas par an a grimpé de 3 500 dans les années 1980 à 10 000 aujourd’hui. L’augmentation de la prescription d’échographies de routine serait en cause. Or, de nombreux cancers seraient restés latents toute la vie de la personne et n’auraient jamais fait parler d’eux sans ce dépistage.

Face aux enjeux individuels et collectifs en cause, la sagesse de l’Académie Nationale de Médecine sera-t-elle entendue ?

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Isabelle V., Journaliste scientifique


Sources :
Cancers. Dépistage, l’Académie revient sur les controverses. Le médecin généraliste. Dr Isabelle Leroy. Vendredi 24 mars 2017.
Le dépistage organisé du cancer du sein. L’exposition au rayon X. Institut National Du Cancer e-cancer. Consulté le 27 mars 2017.

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