1967, date d’autorisation de la pilule contraceptive en France, est synonyme de progrès et de libération pour beaucoup de Françaises de l’époque. Aujourd’hui, après de nombreux scandales, la situation s’inverse, la contraception, quelle que soit sa forme, suscite un sentiment de défiance chez de nombreuses patientes.
De la défiance vis-à-vis de la contraception
Le Dr Pia de Reilhac est présidente de la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM). Elle s’est exprimée via une interview dans le Journal International de Médecine sur la problématique qui touche actuellement la contraception.
Le Dr Pia de Reilhac explique dès les premières minutes de son interview que la contraception est perçue de nos jours comme une « dangerosité ». Cette mauvaise presse tiendrait son origine d’une part des médias, mais aussi des réseaux sociaux sur lesquels n’importe quel individu est libre d’exprimer son opinion et ses ressentis qu’ils soient justifiés ou non, sans aucun contrôle médical de l’information.
La société « hyper connectée » actuelle et l’ensemble des médias extrêmement présents contribuent donc à une sorte de « diabolisation » de la contraception. Cependant, il faut l’admettre, cet acharnement médiatique n’est pas sans fondements. En effet, nombreux sont les exemples de scandales sanitaires. Le Dr Pia de Reilhac démêle le vrai du faux et fait une remise au point.
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Quelques scandales sanitaires
L’affaire Essure et Mirena
Essure est une méthode contraceptive définitive et une avancée considérable dans le domaine lorsqu’elle est apparue. L’objectif est de boucher les trompes par l’introduction de ces petits dispositifs Essure au niveau des trompes provoquant alors la prolifération de tissus venant progressivement obturer les trompes et empêcher le passage des ovocytes pour la fécondation.
Récemment, suite à la déclaration d’effets indésirables (saignements, douleurs, fatigue, dépression, allergies, etc.) chez certaines femmes, l’ANSM a choisi de suspendre pendant 3 mois sa mise sur le marché et demande par mesure de précaution de ne plus implanter ce type de dispositif pendant leur délai de réflexion.
Faut-il pour autant extrapoler les recommandations de l’ANSM et retirer ces dispositifs ? Absolument pas selon le Dr Pia de Reilhac. Retirer le matériel implique une anesthésie générale (cœlioscopie) avec les risques que ça peut impliquer chez des patientes qui ne déclarent pas d’effets indésirables ou de gêne. Par ailleurs, l’ANSM a rendu très récemment des conclusions montrant un bénéfice supérieur du dispositif par rapport aux risques reprochés.
Pour Mirena (stérilet), c’est un autre problème. L’absence de règles éventuels ou encore le syndrome prémenstruel en cause dans la polémique sont des effets secondaires rares, mais possibles, décrits dans le livret du dispositif. Ainsi, pour les patientes qui n’ont pas de problème avec ce type de contraception, il est absurde de retirer Mirena seulement parce que certaines femmes ont déclaré des effets secondaires. La seule chose à faire est de rassurer les patientes porteuses du dispositif et de bien informer les femmes des potentiels effets secondaires d’un tel traitement avant son implantation.
Les pilules de 3ème génération
La diabolisation des pilules de 3ème génération a été une surprise pour les professionnels de santé. Cette même polémique avait déjà eu lieu une dizaine d’années auparavant en Angleterre, pour laquelle l’avis des gynécologues français avait été sollicité. A l’époque, les tutelles avaient interrogé un certain nombre de sociétés savantes qui avaient déclaré l’utilisation de ces pilules sécurisées à partir du moment où : la connaissance des antécédents de la patiente est suffisamment approfondie et l’absence de risques démontrée (sachant que le risque zéro n’existe pas) et que les conditions d’utilisation de la pilule sont respectées.
Le Dr Pia de Reilhac reconnaît cependant l’augmentation des problèmes cardiovasculaires (phlébite et embolie plus particulièrement) avec les pilules de 3ème et 4ème génération. Elle précise également que les pilules de 2ème génération sont quant à elles beaucoup plus androgéniques (masculinisantes) que celles de 3ème génération. Environ 25% des patientes déclaraient ces effets androgéniques et étaient au contraire très bien sous les pilules de 3ème génération. Il est finalement dommage que certains médecins n’osent plus les prescrire par peur, alors que correctement investigué et conduit, ce traitement est très bien toléré par une majorité des femmes.
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Charline D., Pharmacien