Nouveau-nés : mieux évaluer leur douleur

Actualités Douleur et fièvre (enfant)

Rédigé par Julie P. et publié le 11 août 2017

Pour améliorer la qualité des soins apportés aux nouveau-nés prématurés ou non, il est important de savoir évaluer finement leur douleur physique. Pour compléter les grilles d’évaluation de la douleur basée sur l’observation du comportement de l’enfant, des nouvelles technologies se développent.

Evaluation de la douleur du bébé

Douleur infantile : les limites des techniques actuelles

Dans le cadre médical, savoir évaluer la douleur des nouveau-nés est essentiel pour poser un diagnostic précis, mais aussi pour réaliser au mieux les procédures médicales douloureuses (intubation, piqûres) liées à leur prise en charge hospitalière et nécessitant un traitement analgésique. La tâche est d’autant plus compliquée car, contrairement aux enfants et aux adultes, ils ne peuvent pas utiliser des mots ou des échelles numériques pour décrire leur souffrance physique.

Même s’il est difficile d’évaluer avec précision leur mal-être physique, une évaluation fine de la douleur aiguë ou prolongée reste nécessaire compte tenu des risques de toxicité de certains médicaments analgésiques.

Pour jauger cette douleur infantile, les professionnels de santé s’appuient sur des mesures physiologiques comme la fréquence cardiaque ou respiratoire mais ils analysent aussi le comportement des nourrissons et se réfèrent à des échelles d’évaluation validées.

Parmi elles, figure l’échelle EDIN (Echelle de Douleur et d’Inconfort du Nouveau-né) qui évalue la douleur prolongée et l’inconfort du nouveau-né (à terme ou prématuré) jusqu’à l’âge de 3 mois.

On distingue 5 items (éléments) qui sont évalués sur une échelle de 0 à 3. 3 étant le score maximal pour lequel des signes d’inconfort sont observés :

  1. Visage : détendu (0) à crispation permanente ou visage prostré, figé ou violacé (3) ;
  2. Corps : détendu (0) à agitation permanente, crispation des extrémités et raideur des membres ou motricité très pauvre et limitée avec corps figé (3) ;
  3. Sommeil : s’endort facilement (0) à pas de sommeil (3) ;
  4. Relation : sourire aux anges, sourire réponse, attentif à l’écoute (0) à refuse le contact, aucune relation possible, hurlement ou gémissement sans la moindre stimulation (3) ;
  5. Réconfort : n’a pas besoin de réconfort (0) à inconsolable, succion désespérée (3).

Au-dessus d’un score total de 5, la douleur est probable. En deçà, on parle davantage d’inconfort que de douleur.

Même si elles restent fiables dans la majorité des cas, ces grilles d’évaluation de la douleur infantile, basée sur l’observation des comportements, comportent quelques limites.

Parmi elles, on distingue majoritairement : une variabilité des résultats compte tenu de la subjectivité des observateurs. De plus, l’enfant en si bas âge peut présenter un sommeil instable et ses interactions avec le monde qui l’entoure restent, dans une certaine mesure, difficiles à évaluer.

Sans oublier également que cette méthode nécessite beaucoup de temps et une surveillance continue des enfants par le personnel hospitalier.

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Vers des mesures plus objectives

Afin de faciliter cette évaluation de la douleur infantile, des chercheurs de l’Université d’Oxford ont établi un lien entre l’activité cérébrale de certaines zones du cerveau et l’intensité de la douleur ressentie à partir d’enregistrements électroencéphalographiques (EEG) réalisés chez des nouveau-nés prématurés.

A savoir ! L’EEG ou électroencéphalographie est un examen qui permet l’enregistrement de l’activité électrique du cerveau. Des électrodes sont placées sur le cuir chevelu et reliées à un moniteur ou une imprimante.

Après avoir disposé des électrodes sur leur petit crâne, les chercheurs ont réalisé des EEG sur des nouveau-nés subissant au même moment une piqûre pour réaliser un test sanguin.

Les résultats obtenus sont très encourageants, car ils montrent que l’on peut observer, en réponse à la douleur de la piqûre, une activité cérébrale spécifique bien distincte de celles enregistrées lors de stimulations non douloureuses comme l’éclairage de la pièce, une caresse sur le visage ou l’écoute d’une musique douce.

C’est comme si les chercheurs avaient repéré une signature de la douleur au niveau du cerveau.

Pour aller plus loin dans leurs démarches, les scientifiques ont observé que cette activité cérébrale était réduite lorsqu’une anesthésie locale était appliquée au niveau de la zone de la piqûre.

Avec ces premières données très prometteuses, les chercheurs ambitionnent de mettre au point un système d’évaluation et de surveillance de la douleur basé sur la mesure de l’activité cérébrale des nouveau-nés en continu.

Autre utilisation possible de cette technologie : tester l’efficacité des analgésiques dans la population infantile.

Récemment, un autre moyen de mesurer objectivement la douleur du nourrisson vient d’être mis en place grâce à un programme de l’ANR (Agence Nationale de la Recherche) baptisé Néodoloris. Le CHRU (Centre Hospitalier Régionale et Universitaire) de Lille, en coopération avec la société Mdoloris Medical Systems, a développé la technologie de monitoring NIPE (Newborn Infant parasympathetic Evaluation).

NIPE permet l’évaluation de la composante parasympathique du système nerveux de l’enfant qui reflète elle-même l’inconfort ou le bien-être de l’enfant.

A savoir ! Le système nerveux parasympathique est autonome et responsable des activités involontaires des organes, glandes et vaisseaux sanguins en coopération avec le système nerveux sympathique.

En un seul dispositif médical, le moniteur NIPE évalue le stress et/ou la douleur prolongée et la réponse à un stimulus de douleur aiguë. Il offre aussi la possibilité de mesurer l’augmentation du bien-être généré par les soins du développement comme les caresses ou le portage peau à peau.

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Julie P., Journaliste scientifique

Sources
– Nociceptive brain activity as a measure of analgesic efficacy in infants. science.org.