Le silence se définit comme l’absence de bruit dans un lieu calme. Mais l’absence de bruit ne veut-il pas dire absence de son ? Le silence est-il un son ? Est-il perçu comme un son ou déduit de l’absence de sons ? Une récente étude publiée dans la revue scientifique PNAS s’est penchée sur ces questions. Et voici les réponses.
Le silence est-il une absence de sons ?
L’ouïe nous permet d’entendre les sons, ces ondes vibratoires qui parviennent à nos oreilles, les oreilles qui sont ensuite capables de transmettre l’information au cerveau sous la forme d’un influx nerveux. L’oreille humaine n’est d’ailleurs pas capable de percevoir toutes les fréquences. Le champ auditif humain ne comprend que les vibrations acoustiques dont la fréquence est comprise entre 20 Hz (sons les plus graves) et 20 000 Hz (sons les plus aigus). En dehors de cette zone, les vibrations acoustiques ne sont plus considérées comme des sons, puisque l’oreille humaine n’est plus capable de les entendre.
À savoir ! En dessous de la fréquence de 20 Hz, c’est le champ des infrasons, que sont capables de percevoir les éléphants ou les taupes. Au-delà de 20 000 Hz, c’est le domaine des ultrasons que perçoivent les chats, les chiens, mais aussi les dauphins ou les chauve-souris.
Et le silence dans tout ça ? Comment le cerveau perçoit-il cette absence de sons ? Si la question peut surprendre, elle a fait l’objet d’une récente étude, très sérieuse. Dans les activités de la vie quotidienne, nous décrivons le silence comme une absence de sons, par exemple, un moment de calme absolu, le silence entre deux coups de tonnerre ou le silence après un concert de musique. Le cerveau perçoit-il réellement le silence ou seulement une absence de sons qu’il catégorise comme un silence ?
Le silence, une absence de sons que le cerveau perçoit comme un son
La question du silence agite le débat scientifique et philosophique depuis de longues années, sans qu’une réponse claire et définitive n’ait été encore apportée. Dans cette étude récente, les chercheurs ont utilisé une approche empirique pour démontrer que le silence est réellement perçu par le cerveau et pas simplement déduit à partir de l’absence de sons.
Les chercheurs ont développé sept expériences, basées sur trois « illusions de silence ». Les participants de l’étude étaient soumis à des séquences sonores continues ou entrecoupées de phases de silence et inversement. Ils ont observé des distorsions temporelles dans la perception de la durée respective des phases de sons et de silence, en fonction des séquences écoutées. Ainsi, les participants ne percevaient pas la durée d’un son de la même manière, s’il était continu ou entrecoupé de silence.
De la perception du silence à la perception de l’absence !
D’après les données recueillies, il semblerait que le cerveau humain perçoive réellement le silence, de la même manière qu’il le fait pour un son. Le silence ne serait pas simplement déduit par le cerveau sur la base de l’absence de sons. Ces preuves d’une véritable perception du silence viennent résoudre un vieux débat sur le silence. Elles pourraient aussi contribuer à alimenter l’ensemble des travaux menés sur la perception de l’absence.
Dans un autre registre, certaines douleurs sont perçues par le cerveau en l’absence de stimuli douloureux (douleurs neuropathiques) ou en présence de stimuli habituellement non douloureux (allodynie). Si le silence est perçu par le cerveau, ces douleurs le sont aussi, même en l’absence d’un signal sonore ou douloureux. Reste désormais à comprendre quels mécanismes physiologiques sont à l’origine de cette perception de l’absence, longtemps décrite comme une simple déduction logique.
Estelle B., Docteur en Pharmacie
– The perception of silence. www.pnas.org. Consulté le 19 juillet 2023