Movember – Santé des hommes : comment parler de ses émotions quand on a appris à « être fort » ? 

Chaque mois de novembre, la campagne Movember met la santé des hommes sur le devant de la scène : prévention des cancers, santé cardiovasculaire… et santé mentale. Pendant longtemps, beaucoup d’hommes ont grandi avec l’idée qu’il fallait rester fort, ne pas se plaindre et garder ses émotions pour soi. Mais comment parler de ce qu’on ressent quand on n’a jamais appris à le faire ? Pourquoi est-ce si difficile, et surtout, par où commencer ? Découvrez comment exprimer ses émotions pour préserver sa santé mentale.

Émotions et masculinité : l’impact de l’éducation 

Les émotions sont des réactions naturelles de l’organisme face à un événement : joie, colère, tristesse, peur, surprise, dégoût… Elles jouent un rôle fondamental : elles nous informent, nous protègent et favorisent le lien avec les autres. 
Mais dans de nombreux contextes culturels, les garçons ont longtemps été encouragés à contrôler leurs émotions, surtout la peur et la tristesse, alors que les filles étaient davantage autorisées à les exprimer. 

Cette différence d’éducation émotionnelle a des conséquences durables. Chez les hommes, la tendance à réprimer ce qu’ils ressentent peut se traduire par : 

• Davantage de colère ou d’irritabilité ; 

• Des tensions physiques ; 

• Des comportements d’évitement (travail excessif, consommation d’alcool, isolement). 

Des études montrent aussi que cette inhibition émotionnelle chronique augmente la charge de stress, fragilise les relations et peut retarder la demande d’aide en cas de mal-être ou de trouble anxio-dépressif. 

Apprendre à reconnaître et exprimer ses émotions n’enlève rien à la force ou à la dignité. Au contraire : c’est une forme de lucidité et de courage, essentielle pour préserver sa santé physique et psychique. 

Apprendre à écouter et à nommer ses émotions 

Savoir ce qu’on ressent ne va pas toujours de soi, surtout lorsqu’on a passé des années à “tenir bon”. Mais, comme toute compétence, cela s’apprend et se renforce. 

Développer ses compétences émotionnelles fait partie des compétences psychosociales, ces aptitudes qui aident à mieux se connaître, réguler le stress et faire face à l’adversité. 

Enrichir son vocabulaire émotionnel 

Trouver le mot juste permet de mieux comprendre ce que l’on vit. “Je suis énervé” ne dit pas la même chose que “je me sens frustré” ou “déçu”. 
Identifier précisément une émotion aide à clarifier le besoin sous-jacent (besoin de respect, de reconnaissance, de repos, de sécurité). 
Des outils comme la roue des émotions ou les cartes de vocabulaire émotionnel peuvent aider à mettre des mots sur ce que l’on ressent. 

Observer avant d’agir 

Trois minutes, plusieurs fois par jour, suffisent pour faire une pause consciente : 

• Qu’est-ce que je ressens physiquement (tension, lourdeur, chaleur) ? 

• Quelles pensées me traversent ? 

• Quelle émotion domine ? 

• De quoi ai-je besoin à ce moment précis ? 
   

Cet instant d’observation crée un espace entre l’émotion et la réaction. Il permet d’éviter les automatismes, tels que la colère, le repli ou la fuite, et de poser des choix plus ajustés. 

Relier situation, émotion et besoin 

Quand une émotion se manifeste, elle porte un message. Un moyen simple de le décoder est de noter : 

1. la situation (les faits, sans interprétation) ; 

2. l’émotion ressentie ; 

3. le besoin associé. 

Par exemple : 

“Quand la réunion s’est terminée sans qu’on évoque mon projet, je me suis senti frustré. J’avais besoin de reconnaissance et de clarté.” 

Ce type d’exercice, inspiré de la communication non violente, aide à comprendre ce qui se joue, plutôt que de rester prisonnier d’un ressenti flou. 

La campagne Movember est l’occasion de mettre en lumière les enjeux spécifiques à la santé des hommes et de rappeler que certaines normes de genre peuvent freiner l’accès aux soins et à la prévention. Les combattre, c’est permettre à chacun d’accéder à un accompagnement adapté, notamment en matière de santé mentale masculine.