Les inégalités de genre en santé mentale
La santé mentale est influencée par de nombreux facteurs biologiques, sociaux et culturels, et le genre joue un rôle déterminant dans ces dynamiques. Si les troubles mentaux touchent aussi bien les hommes que les femmes, les inégalités liées au genre font que leurs manifestations et leurs impacts diffèrent considérablement.
Les hommes et les femmes face aux troubles mentaux
Si certaines pathologies graves, comme la schizophrénie ou le trouble bipolaire, présentent une prévalence similaire entre les sexes, d’autres troubles, tels que la dépression, l’anxiété ou les conduites addictives, révèlent des disparités marquées.
Troubles psychiques prévalents chez les femmes
Dépression et troubles anxieux
Selon l’INSEE en France en 2019, les troubles dépressifs touchaient environ 12 % des femmes, contre 9 % des hommes. Cette différence est encore plus marquée chez les jeunes. Une femmes sur quatre âgée de 18 à 24 ans rapporte un épisode dépressif caractérisé au cours de l’année. Les troubles anxieux, souvent associés à la dépression, sont également plus fréquents chez les personnes du sexe féminin.
Troubles liés à la maternité
Les pathologies liées à la maternité, comme la dépression post-partum ou la psychose puerpérale, constituent une autre catégorie de troubles spécifiques. D’après Santé publique France en 2021, la dépression post-partum a touché 16,7 % des mères. De plus, cette pathologie a parfois des répercussions durables sur leur bien-être psychologique.
Pathologies psychiatriques prépondérantes chez les hommes
Conduites addictives
Les hommes sont plus susceptibles de développer des addictions, notamment à l’alcool et aux drogues. Ce phénomène peut s’expliquer par des normes de masculinité valorisant la prise de risque et par une stigmatisation plus forte des troubles émotionnels chez les hommes.
Suicide
Si les tentatives de suicide sont plus fréquentes chez les femmes (60 % des hospitalisations pour tentative de suicide concernent des femmes), les hommes sont largement surreprésentés dans les décès par suicide, représentant 75 % des suicides en France en 2019. Cette disparité souligne la difficulté des hommes à demander de l’aide ou à exprimer leur détresse.
Facteurs sociaux, culturels et professionnels aggravant les disparités
La charge mentale et les responsabilités domestiques
Les femmes assument encore la majorité des responsabilités domestiques et familiales. En France, 70 % des tâches ménagères reposent sur elles (INSEE, 2010). Cette surcharge contribue à l’épuisement émotionnel et au risque accru de troubles anxieux et dépressifs, notamment chez les femmes ayant un emploi. Les proches aidants, dont 56 % sont des femmes, subissent également un fort impact sur leur bien-être psychologique (DREES, 2021).
Les violences et leurs conséquences
Les violences sexuelles et conjugales touchent principalement les femmes. Environ 19 % des femmes en France déclarent avoir subi une agression sexuelle, contre 5 % des hommes (Baromètre 2016, Santé publique France). Ces atteintes augmentent considérablement le risque de syndrome de stress post-traumatique et de dépression à long terme.
Les hommes et la stigmatisation des troubles mentaux
Les normes culturelles valorisant la force et la maîtrise émotionnelle chez les hommes freinent leur recherche d’aide. Cette stigmatisation aboutit à une sous-évaluation et un sous-traitement de leurs troubles, en particulier la dépression. De plus, les conduites addictives, souvent perçues comme une « échappatoire », masquent parfois des souffrances psychiques profondes.
Le rôle du travail
Les inégalités de genre dans le monde du travail aggravent les disparités en santé mentale. Les femmes sont plus exposées au harcèlement sexuel et aux discriminations liées à la maternité. Ces facteurs accroissent leur stress professionnel et émotionnel.
Les hommes, quant à eux, occupent plus fréquemment des postes à haute responsabilité, associés à une pression élevée et à des comportements d’automédication, souvent sous la forme d’abus d’alcool ou de drogues.
Vers une approche plus équitable en santé mentale
Pour réduire ces inégalités et leur impact sur la santé mentale, il est essentiel de développer des stratégies adaptées aux besoins spécifiques de chaque sexe :
- Améliorer la prévention et la sensibilisation
Promouvoir une meilleure compréhension des troubles mentaux et des différences de genre peut contribuer à réduire les stéréotypes et à encourager la recherche d’aide. - Renforcer la formation des professionnels de santé
Les professionnels doivent être mieux formés pour reconnaître les troubles spécifiques aux sexes, comme la dépression post-partum ou la dépression masquée chez les hommes. - Adapter les soins aux besoins individuels
L’intégration des facteurs sociaux et culturels dans les plans de traitement est essentielle pour une prise en charge personnalisée. - Lutter contre les stéréotypes de genre
Des campagnes de sensibilisation ciblées peuvent réduire la stigmatisation et encourager les hommes à consulter en cas de besoin. - Promouvoir l’égalité dans le travail et à domicile
Une répartition plus équitable des tâches domestiques et une lutte accrue contre les discriminations au travail sont essentielles pour diminuer la surcharge mentale des femmes.
Les inégalités en santé mentale entre hommes et femmes reflètent des différences biologiques, sociales et culturelles profondes. Comprendre ces disparités est un premier pas vers une approche plus juste. En agissant sur les stéréotypes, en renforçant les stratégies de prévention et en adaptant les soins, il est possible d’améliorer la prise en charge des troubles psychiques. La santé mentale, en tant que droit fondamental, doit être accessible et équitable pour tous, indépendamment du sexe.
– Le temps domestique et parental des hommes et des femmes : quels facteurs d'évolutions en 25 ans ?. www.insee.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
– Baromètre santé 2016. Genre et sexualité. www.santepubliquefrance.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
– Des inégalités de santé persistantes entre les femmes et les hommes. www.santepubliquefrance.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
– Prévalence de la dépression, de l’anxiété et des idées suicidaires à deux mois postpartum : données de l’Enquête nationale périnatale 2021 en France hexagonale. www.santepubliquefrance.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
– La question du genre dans l'analyse des pratiques addictives à travers le Baromètre santé, France, 2005.. www.santepubliquefrance.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
– 9,3 millions de personnes déclarent apporter une aide régulière à un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie en 2021. drees.solidarites-sante.gouv.fr. Consulté le 6 janvier 2024.
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