Et si la paresse était inscrite dans nos gènes…

Santé au quotidien (maux quotidiens)

Rédigé par Julie P. et publié le 4 avril 2018

Démotivé(e) pour aller faire du sport, lasse de faire aujourd’hui ce qui pourrait être fait demain, catalogué(e) par sa famille et ses amis comme le ou la champion(ne) du moindre effort… La paresse peut prendre différentes formes dans notre quotidien et, finalement, être un véritable frein dans notre accomplissement personnel. Mais, existe-t-il une prédisposition génétique à cet enclin pour l’oisiveté ? Retour sur une étude qui tend à montrer que cette tendance à la paresse serait naturelle car inscrite dans notre patrimoine génétique.

paresse

La paresse : une question de neurones ?

Pour tester les probables origines génétiques de la paresse, des chercheurs de l’université du Missouri ont réalisé des expériences sur des rats.

Ces chercheurs ont placé une cinquantaine de rats dans des cages a munies de roues tournantes. En observant le– taux d’activité de ces rats sur la roue (temps, vitesse, longueur parcourue) pendant une semaine, ils ont pu les diviser en deux groupes. Le premier groupe était qualifié de rats actifs tandis que l’autre était plutôt considéré comme le groupe des flemmards.

Ensuite, les chercheurs ont procédé à des accouplements à l’intérieur d’un même groupe sur 10 générations.

Contre toutes attentes, la progéniture des 26 rats les plus actifs était plus motivée à s’activer sur la roue que les descendants des rats paresseux. Pour preuve : les descendants des actifs passaient 10 fois plus de temps dans la journée sur la roue que ceux ayant des ancêtres fainéants ! Et avec une vitesse de course plus importante aussi !

Après ces résultats montrant une « héritabilité » de la tendance à la paresse, les chercheurs ont étudié une de leurs zones cérébrales nommée circuit de la récompense.

À savoir ! Le circuit de la récompense, fondamentale pour la survie, oriente nos comportements liés à nos besoins fondamentaux (manger, boire, se reproduire) mais aussi, d’autres comportements nous procurant un sentiment de satisfaction. Il est complexe et composé, dans chaque hémisphère cérébral, de connections nerveuses reliant deux petits groupes de neurones particuliers. Le premier groupe se situe dans l’aire tegmentale ventrale (ou ATV) et l’autre, dans le noyau accumbens. Le neurotransmetteur principal qui assure la communication entre ces neurones est la dopamine ou « molécule du plaisir ». C’est dans ce circuit de la récompense que la plupart des drogues agissent pour produire une dépendance.

Les observations les plus notables ? Les rats actifs présentaient une croissance plus rapide des voies neuronales de ce circuit de récompense comparativement aux rats démotivés pour l’activité physique.

Sur le plan de la génétique, les chercheurs ont identifié 36 gènes sur 17 000 gènes qui pourraient jouer un rôle dans la prédisposition à la motivation ou démotivation à s’activer physiquement.

Les chercheurs envisagent, avant de réussir à prouver que cette origine génétique de la paresse existe bel et bien chez l’homme, de décrypter, toujours chez le rat, le rôle individuel des gènes impliqués.

Loin de vouloir excuser les paresseux, ces travaux ont pour objectif de mieux comprendre les origines génétiques de la paresse afin de mieux la combattre !

En effet, il ne faut pas perdre de vue que redonner le goût à l’activité physiqueest un défi de santé publique.

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Les implications de cette découverte

Frank Booth du département des sciences biomédicales du collège de médecine vétérinaire de l’université du Missouri, qui a réalisé cette étude chez le rat, met en garde la population sur la menace que constitue le manque d’activité physique dans les sociétés modernes.

Parallèlement- à ses propres projets de recherche, il a – passé ses 40 dernières années à examiner et synthétiser les données sur l’exercice physique et le lien entre le manque d’activité- physique et la maladie.

Bilan : l’inactivité physique constitue un danger pour la santé publique puisqu’elle est à l’origine de l’obésité, du diabète de type 2 ou encore de la stéatose hépatique (maladie du « foie gras »). Le chercheur a d’ailleurs montré que l’inactivité pouvait entrainer jusqu’à 35 types de conséquences délétères pour la -santé.

L’OMS appelle d’ailleurs, dans un rapport d’octobre 2017, l’industrie agroalimentaire à proposer des produits moins gras, moins sucrés et moins salés. D’un autre côté, elle recommande, à titre individuel de :

  • Limiter l’apport énergétique provenant des lipides et du sucre ;
  • Consommer davantage de fruits et légumes, de céréales complètes et de noix ;
  • Pratiquer 60 minutes de sport par jour pour un enfant et 150 minutes par semaine pour un adulte.

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Julie P., Journaliste scientifique

– Le circuit de la récompense. Université McGill. Consulté le 30 mars 2018.
– Couch Potatoes May Be Genetically Predisposed to Being Lazy, MU Study Finds. Université du Missouri. Consulté le 30 mars 2018.
– Phenotypic and molecular differences between rats selectively bred to voluntarily run high vs. low nightly distances. American Journal of Physiology: Regulatory, Integrative and Comparative Physiology M.D Roberts et al. Consulté le 30 mars 2018.
– Obésité et surpoids. OMS. Consulté le 30 mars 2018