Une « vieille » cellule immunitaire fait son come back

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Rédigé par Estelle B. et publié le 14 mars 2017

La lutte contre les infections et les cancers mobilise de nombreuses équipes de recherche à travers le monde et constitue un enjeu majeur de santé publique. Mieux comprendre les capacités du système immunitaire représente l’un des principaux axes de recherche actuels. Récemment, des chercheurs ont mis en évidence de nouvelles fonctionnalités d’une cellule immunitaire, pourtant connue de longue date.

cellule immunite cancer

Des cellules immunitaires remises au goût du jour

Les cellules immunitaires ou globules blancs rassemblent un très grand nombre de types de cellules, dont les rôles sont essentiels dans la réponse aux infections et la cancérogenèse (développement d’un cancer). Parmi ces cellules, les lymphocytes T gamma delta ont été caractérisés depuis de nombreuses années.

Leur mécanisme d’action repose sur une protéine particulière, située à la surface des cellules, qui reconnaît spécifiquement les particules étrangères (bactéries, virus) ou anormales (tumorales). Les lymphocytes T gamma delta interviennent dans la réponse immédiate de l’organisme au stress, avant que la réaction immunitaire classique ne se mette en place.

Jusque-là, les travaux effectués sur ces globules blancs les associaient au système immunitaire inné, en raison de leur capacité à détecter quasi-instantanément toute cellule anormale. Les chercheurs pensaient, par exemple, que chaque être humain naissait avec un lot de lymphocytes T gamma delta capables dès la naissance de reconnaître les cellules anormales, et que tous les individus possédaient des lymphocytes T gamma delta très proches.

A savoir ! Le système immunitaire inné est celui dont l’organisme dispose dès la naissance, tandis que le système immunitaire acquis se développe au fur et à mesure des infections et/ou des vaccinations.

Récemment, des chercheurs européens et russes ont étudié la variabilité génétique des lymphocytes T gamma delta et ont ainsi découverts de nouvelles potentialités pour ces cellules immunitaires.

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De l’inné à l’adaptatif

Les résultats de cette étude ont montré que les lymphocytes T gamma delta seraient différents d’un individu à l’autre, et ce, en lien avec ses antécédents infectieux (en particulier viraux) et cancérologiques. Ainsi, au lieu d’être matures dès la naissance, déjà capables de reconnaître les cellules anormales, ces globules blancs évolueraient et s’adapteraient progressivement au cours de la vie. A chaque exposition à un agent pathogène (viral, bactérien) ou à des cellules précancéreuses, ils conserveraient l’information et généreraient une mémoire immunologique, spécifique pour chaque individu.

Par ailleurs, ces cellules agissent selon un mécanisme d’action différent de celui des autres globules blancs. Leur action viendrait s’ajouter aux effets des autres cellules immunitaires, renforçant ainsi la réponse de l’organisme à l’agression. Cette fonctionnalité est intéressante pour deux raisons : d’une part, elle offre une possibilité d’optimiser la réaction immunitaire, et d’autre part, elle limite le risque que les cellules anormales échappent au contrôle du système immunitaire.

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Des applications dans la prise en charge des infections et des cancers

Les lymphocytes T gamma delta, connus depuis longtemps, livrent aujourd’hui une autre partie de leurs secrets, qui pourraient s’avérer très utiles pour le développement de nouvelles thérapies anti-infectieuses et anti-tumorales.

Le phénomène de mémoire immunologique est à la base du concept actuel de la vaccination. Mais, dans les vaccins disponibles aujourd’hui, le mécanisme d’action employé est celui de l’immunité acquise. L’immunité adaptative des lymphocytes T gamma delta représente une piste intéressante pour concevoir des vaccins de nouvelle génération.

Dans la lutte contre les cancers, les résultats de cette étude ouvrent des perspectives sur le renforcement du système immunitaire, pour lutter contre la cancérogenèse, une thématique très en vogue actuellement. En effet, une tumeur ne se développe, que si elle échappe au contrôle du système immunitaire, sensé détecter et détruire les cellules précancéreuses. Mieux comprendre quelles cellules sont impliquées dans cette reconnaissance et par quels mécanismes, est donc une étape importante pour limiter le développement des cellules cancéreuses.

Des travaux complémentaires restent nécessaires pour déterminer comment les lymphocytes T gamma delta mémorisent les informations de reconnaissance des cellules anormales. Mais, cette étude pourrait représenter le point de départ de nouvelles thérapies innovantes contre les infections virales et les cancers.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie


Sources :
Catros, V. et al. Lymphocytes Tgd en cancérologie : Des lymphocytes tueurs non conventionnels. MEDECINE/SCIENCES 26 : 185-91.. 2010.
Davey, M.S. et al. Clonal selection in the human Vd1 T cell repertoire indicates gd TCR-dependent adaptive immune surveillance. 2017. Nature Communications. 9 : 14760. DOI: 10.1038/ncomms14760.

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