La prothèse la plus attendue du monde, un cœur artificiel, affiche une expérience de seulement 21 mois de fonctionnement sur 4 patients, tous décédés. Considérer cette expérience comme un échec ? Certainement pas : la société française Carmat a déjà annoncé la fin de son essai de faisabilité et la préparation d’un essai clinique pivot.
Qu’est-il arrivé aux patients implantés ?
Les annonces successives de patients décédés à la suite d’une implantation de prothèse ne cessent d’attiser la curiosité des médias. Mais le premier objectif fixé par l’Agence Nationale de la Santé et du Médicament (ANSM), à savoir une survie prolongée chez les patients en insuffisance cardiaque terminale, est désormais acquis.
- Le premier patient volontaire, opéré en 2013, est décédé 74 jours après son implantation à l’âge de 76 ans. L’objectif de survie était alors de 30 jours ;
- Le deuxième patient, opéré en 2014, est décédé 9 mois après son implantation à l’âge de 68 ans. Mieux encore, ce patient a pu retourner à son domicile pendant 4 mois ;
- Le troisième patient, opéré début 2015, est décédé 8 mois après son implantation à l’âge de 74 ans. Celui-ci a été victime d’un arrêt respiratoire fulgurant en lien avec son hypertension rénale ;
- Le quatrième et dernier patient, opéré fin 2015, est décédé moins de 1 mois après son implantation à l’âge de 58 ans. Le Professeur Pascal Leprince assure néanmoins que le patient est décédé de complications médicales qui ne sont pas en lien avec la prothèse.
Les quatre patients bénévoles pour ces premières implantations souffraient tous de pathologies cardiaques graves avec un pronostic vital altéré. Pour les deux premiers, des dysfonctionnements de la prothèse ont été pointés du doigt, conduisant les équipes de recherche à procéder à d’importantes mises à jour du système. Il serait bien prématuré d’affirmer que ces travaux auraient porté leur fruit, mais une marge d’amélioration existe bel et bien.
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Le projet du cœur artificiel Carmat se poursuit
L’enjeu est colossal : 20 millions de patients seraient concernés par l’insuffisance cardiaque à travers l’Europe et les Etats-Unis. Parmi eux, plusieurs dizaines de milliers sont en phase terminale. Poussée par la sédentarité et l’évolution des comportements alimentaires, la maladie est reconnue comme la première cause de mortalité mondiale.
Au-delà du défi médical, ce projet répond à un enjeu sanitaire majeur. La liste d’attente de greffes d’organe s’allonge d’année en année, et les risques de rejet sont maîtrisés au prix de traitements lourds pour les receveurs. Aussi, ses applications peuvent dépasser l’insuffisance cardiaque pour s’étendre à l’ensemble des maladies cardiaques graves.
La société a donc décidé, en accord avec les autorités de santé, de poursuivre ses travaux avec un essai clinique pivot. Cette seconde phase aura pour but de mesurer l’efficacité du dispositif chez 20 malades et de multiplier les centres d’implantation à l’international.
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Hadrien V. Pharmacien
Sources :
Information sur l’essai clinique de faisabilité du cœur artificiel bio-prothéique Carmat, Communiqué de presse, Carmat SA, 21 janvier 2016
Mort du troisième patient greffé du cœur artificiel de Carmat, Le Monde avec l’AFP Le Monde, 22 décembre 2015