Le cœur pourvoyeur de chaleur ?

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Rédigé par Deborah L. et publié le 11 octobre 2020

Et si le cœur pouvait aider l’organisme à produire de la chaleur ? C’est ce que suggère une récente étude toulousaine qui vient de découvrir un mécanisme impliqué dans la résistance au froid. Ce mécanisme stimulant les dépenses énergétiques pour produire de la chaleur pourrait s’avérer intéressant dans la lutte contre l’obésité et certains troubles métaboliques.

Coeur rouge fluorescent dans des mains

Comment l’organisme fabrique-t-il de la chaleur ?

L’organisme fabrique de la chaleur au moyen d’un mécanisme appelé « thermogénèse » qui dépend principalement de deux facteurs : la température ambiante et l’apport alimentaire. Si la température ambiante baisse, l’organisme est alors contraint de produire de la chaleur pour maintenir sa température centrale constante. Cette production de chaleur comprend :

  • La chaleur produite par le frisson thermique musculaire (contractions musculaires involontaires destinées à réchauffer le corps).
  • La « thermogénèse sans frisson » ou thermogénèse chimique qui désigne la chaleur produite indépendamment des ces contractions musculaires.

Jusqu’à présent, les scientifiques considéraient la « thermogenèse sans frisson » comme un mécanisme central, dépendant de la perception du froid par le cerveau avec :

  • Stimulation de certaines fibres du système nerveux autonome (fibres sympathiques)
  • Et production de neurotransmetteurs pour activer la thermogenèse dans le tissu graisseux.

À savoir ! La thermogenèse dans le tissu graisseux implique la dégradation des lipides stockés dans les cellules graisseuses.

Néanmoins, ce mécanisme central ne suffisait pas à expliquer la totalité de la production de chaleur par l’organisme. Conscients qu’une hormone cardiaque possédait également la capacité de dégrader des lipides, des scientifiques toulousains ont souhaité vérifier si cette hormone pouvait jouer un rôle dans la production de chaleur par l’organisme.

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Une intolérance au froid en l’absence d’hormone cardiaque ANP

C’est une équipe de chercheurs toulousains, de l’Institut des maladies métaboliques et cardiovasculaires, qui s’est particulièrement intéressée aux propriétés d’une hormone cardiaque appelée ANP (Atrial Natriuretic Peptide), impliquée dans la régulation de la pression artérielle.

Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques ont développé un modèle de souris génétiquement modifiées et dépourvues de l’hormone ANP. Les souris génétiquement modifiées et des souris témoins ont ensuite été exposées à une température de 4°C pendant plusieurs heures.  Différents paramètres reflétant la thermogenèse dans l’organisme des souris ont alors été mesurés dont la température corporelle et l’activité des cellules du tissu adipeux  (dont les adipocytes bruns, principaux producteurs de chaleur).

Les scientifiques ont pu observer les résultats suivants sur les souris dépourvues d’hormone ANP :

  • Hypothermie (abaissement de la température corporelle en dessous de la normale) en cas d’exposition au froid
  • Diminution de 50% de l’activité des cellules de leur tissu adipeux brun
  • Réduction de la concentration de triglycérides circulants
  • Diminution de la libération de glucose par le foie et réduction du taux de glucose dans le sang.

À savoir ! Les triglycérides et le glucose servent de substrat aux adipocytes bruns pour la production de chaleur.

Les résultats de ces mesures semblent ainsi confirmer l’hypothèse des chercheurs selon laquelle l’hormone ANP est nécessaire à la production de chaleur.

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L’ANP : une nouvelle piste thérapeutique pour lutter contre les troubles métaboliques

Forte des résultats précédemment observés sur les souris, l’équipe toulousaine a souhaité savoir ce qu’il en était chez l’Homme. On sait que lorsque l’organisme est soumis au froid, les vaisseaux cutanés se contractent pour limiter la perte de chaleur, ce qui propulse le sang  vers les grands vaisseaux et contribue à augmenter la pression dans le cœur. L’hormone ANP est alors libérée pour aider à réduire cette pression en stimulant la production d’urine. Pour autant, l’ANP participe-t-elle chez l’Homme à la production de chaleur comme observée chez la souris ?

Pour le vérifier, les chercheurs ont recruté des volontaires jeunes et en bonne santé qu’ils ont exposé à une température de 16°. L’exposition au froid a bien eu pour conséquence une augmentation du taux de l’hormone ANP circulante.  Les chercheurs ont ensuite prélevé des échantillons de tissus adipeux sur les volontaires. Après exposition in vitro du tissu adipeux à l’ANP, les chercheurs ont observé une augmentation de l’activité des adipocytes bruns (principaux producteurs de chaleur).

D’après les chercheurs, l’ANP active bien chez l’Homme la thermogenèse, pour favoriser le maintien de la température corporelle. Or, cette action directe de l’ANP sur les cellules adipeuses s’avère grandement intéressante car elle pourrait constituer une nouvelle piste thérapeutique: « Stimuler la thermogenèse, en particulier au niveau des adipocytes bruns, augmente les dépenses énergétiques et améliore le contrôle de l’obésité et des troubles métaboliques comme la dyslipidémie et le diabète. », explique Cédric Moro, l’un des scientifiques de l’étude.

Prochaine étape pour les chercheurs ? Trouver des molécules analogues de l’ANP qui répondent à différents critères : stabilité, dégradation rapide dans l’organisme et administration sûre car l’ANP agit sur le système cardiovasculaire, les reins, le foie et pourrait donc présenter des effets indésirables. Un analogue de l’ANP étant déjà autorisé en Asie dans l’insuffisance cardiaque, tous les espoirs sont donc permis !

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Déborah L., Docteur en Pharmacie

Source

– Une hormone cardiaque aide à lutter contre le froid. Inserm. Consulté le 1er octobre 2020.

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