Attention à l’automédication !

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Rédigé par Deborah L. et publié le 19 octobre 2020

Face à l’engouement croissant des Français pour les produits d’automédication, la revue 60 millions de consommateurs a enquêté sur les dangers éventuels liés à leur consommation. 132 produits ont ainsi été examinés parmi lesquels des médicaments vendus sans ordonnance et des compléments alimentaires. Et les résultats présentés suscitent l’inquiétude.

Client prenant une boite de médicament sur une étagère d'une pharmacie

Des produits d’automédication pas si anodins

Profitant d’une image d’efficacité et d’innocuité, souvent véhiculée par la publicité, les médicaments vendus sans ordonnance et les compléments alimentaires séduisent toujours plus les Français. Mais c’est sans compter les risques de mésusages, d’interactions médicamenteuses ou d’effets indésirables liés à l’utilisation de ces produits d’automédication.

Dans ce contexte, la revue 60 millions de consommateurs a enquêté sur les dangers liés à la consommation de ces produits d’automédication à travers l’analyse de 132 références en vente libre en pharmacie ou dans certains magasins. Les résultats de cette investigation ont été publiés dans le dernier hors-série de 60 Millions de consommateurs intitulé « Médicaments sans ordonnance : nos experts vous alertent ». 

Pour mener à bien son enquête, la revue a sélectionné 60 médicaments sans ordonnance et 72 compléments alimentaires fréquemment consommés pour aider à soulager les maux du quotidien, surtout en période hivernale :

  • Rhume;
  • Etat grippal;
  • Douleurs et fièvre;
  • Baisse des défenses immunitaires;
  • Maux de gorge et toux;
  • Troubles anxieux;
  • Troubles du sommeil;
  • Douleurs abdominales.

Ces 132 produits ont été soumis à un « système de notation » défini en collaboration avec la revue Prescrire (pour l’étude des médicaments) et le médecin nutritionniste Jacques Fricker (pour l’étude des compléments alimentaires). Cette analyse a permis de mettre en évidence un ou plusieurs éléments problématiques (présence de substances dangereuses, risques d’effets secondaires, interactions, dosages excessifs, absence de mention signalant des risques, manque de clarté de la notice etc…).

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90 % des médicaments sans ordonnance seraient à éviter

D’après les critères de 60 millions de consommateurs, un grand nombre de médicaments en vente libre et de compléments alimentaires présenteraient une balance bénéfices/risques défavorable. Ainsi, seuls 10 % des médicaments sans ordonnance étudiés par la revue resteraient à privilégier en automédication.

L’étude a mis en évidence notamment les risques de problèmes d’atteinte hépatique ou de problèmes cardiovasculaires. Beaucoup de substances aux effets secondaires non négligeables sont en effet souvent présentes. Certaines substances actives sont ainsi pointées du doigt comme le paracétamol, qui « pris en excès (au-delà de 3 à 4 g par jour pour les adultes, selon les cas) ou associé avec de l’alcool, peut nuire au foie », la pseudo-éphédrine, « destinée à atténuer des symptômes du rhume, qui peut entraîner parfois des problèmes cardiovasculaires » ou encore l’oxomémazine «utilisée pour soulager la toux qui peut entraîner des convulsions ou des risques de somnolence ».

À savoir ! En France, la surdose de paracétamol représente la première cause de greffe hépatique d’origine médicamenteuse.

Cette enquête a par ailleurs mis en évidence la présence d’excipients problématiques de par leurs effets possiblement cancérogènes ou perturbateurs endocriniens (comme l’antioxydant E320 classé cancérogène possible et l’excipient E218, possiblement perturbateur endocrinien).

La revue déplore enfin la présence d’additifs tels que le sucre, les édulcorants ou encore le sel, parfois en quantités importantes et non forcément spécifiés de manière claire sur les notices de produits d’automédication.

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Seuls 20% des compléments alimentaires conseillés

S’agissant des compléments alimentaires, après enquête, seuls 20 % sont conseillés par la revue, et 55 % seraient à proscrire. Comme pour les médicaments, de nombreuses substances entrant dans la composition des compléments alimentaires et en apparence « anodines » peuvent être responsables d’effets indésirables. La mélatonine en est un exemple. Très fréquemment utilisée dans les compléments alimentaires « sommeil », elle peut « nuire au rythme circadien ou provoquer des nausées, des vertiges et parfois des convulsions ».

Par ailleurs, certaines plantes présentes dans les compléments alimentaires peuvent réduire l’effet de certains médicaments et être à l’origine de problèmes non négligeables (comme des irritations du colon avec la rhubarbe, le séné, ou l’aloès, du fait de leurs effets laxatifs).

Autre interaction médicamenteuse notable : celle des extraits de pépins de pamplemousse avec les statines (médicaments antihypertenseurs) et certains traitements de chimiothérapie.

Enfin, la revue met en garde contre les  surdosages éventuels de vitamines, comme la vitamine D chez les enfants déjà supplémentés par leur pédiatre. Un apport supplémentaire peut donc s’avérer excessif et provoquer des troubles digestifs.

D’une façon générale, les résultats de cette enquête sont l’occasion pour 60 millions de consommateurs de réclamer des changements de réglementation afin de clarifier l’information destinée au grand public. Parmi les revendications de la revue figurent :

  • La clarification des notices sur les boîtes des produits d’automédication.
  • La présence des logos « interdit aux femmes enceintes » ou « interdit aux enfants » sur les emballages et notices.
  • La mention explicite et lisible des interactions et des effets secondaires des plantes.
  • La mention des excès de vitamines dans les notices des compléments alimentaires.
  • La mention systématique et en caractères gras d’huiles essentielles dans les notices, avec mention des risques associés à leur prise.

En attendant, on ne saurait que trop conseiller aux consommateurs de s’informer de façon sérieuse en lisant les notices avec attention et en demandant conseil en pharmacie si besoin. Car on ne le répétera jamais assez : automédication ne signifie pas forcément sans danger !

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Déborah L., Docteur en Pharmacie

Sources
– Médicaments en vente libre, mais pas sans danger ! 60 millions de consommateurs. Consulté le 15 octobre 2020.
– « 60 millions de consommateurs » : une étude à charge sur les produits d’automédication. Le quotidien du pharmacien. Consulté le 15 octobre 2020.