Eczéma du nourrisson : une origine prénatale ?
Et si pour l’eczéma du nourrisson, tout se jouait avant la naissance ? C’est ce que suggère une récente étude selon laquelle une hausse du taux de l’hormone du stress chez la femme enceinte pourrait être à l’origine d’un dérèglement du système immunitaire de l’enfant. Zoom sur ces résultats surprenants et inédits.
Eczéma du nourrisson : des causes à éclaircir
Par « eczéma du nourrisson », on entend une maladie inflammatoire de la peau qui survient généralement chez l’enfant entre 3 mois et 2 ans et provoque des démangeaisons intenses et des rougeurs sur le visage, le cou ou le ventre. Les symptômes sont souvent observés au niveau de zones humides comme les plis des coudes, les plis des genoux ou l’intérieur des couches.
Également connue sous le nom de dermatite atopique, cette pathologie chronique n’est pas contagieuse et évolue par poussées pouvant affecter sérieusement la qualité de vie et le sommeil du bébé.
A ce jour, les scientifiques s’accordent à dire que l’eczéma survient chez les enfants avec un terrain génétique particulier favorisant le développement d’allergies. Mais force est de constater que les véritables causes de la maladie restent à éclaircir.
Un lien entre stress durant la grossesse et eczéma du nourrisson ?
Dans ce contexte, des scientifiques du CNRS, de l’Inserm et de l’université de Toulouse ont cherché à mieux cerner l’origine des symptômes de cette maladie. Ils se sont ainsi appuyés sur un constat émanant de plusieurs études selon lesquelles le stress important ressenti par une femme durant sa grossesse était associé à un risque accru pour son enfant de développer de l’eczéma. Mais les raisons d’un tel lien restaient encore à éclaircir.
Pour ce faire, les scientifiques ont exposé des souris femelles gestantes à des lumières désagréables plusieurs fois par jour entre le 13e et le 18e jour de leur grossesse.
Les chercheurs ont alors observé que le stress subi par les femelles gestantes a immédiatement entraîné chez elles une hausse du taux de cortisol (l’hormone du stress). Et après la naissance, les bébés rongeurs ont vu leur barrière cutanée altérée avec une évaporation accrue de l’eau à travers la peau, ce qui est un facteur favorisant l’eczéma. Les chercheurs ont ensuite reproduit sur les rongeurs les conditions de frottement et d’humidité familières aux bébés (couches, plis). Il en ressort que les souris dont les mères avaient été stressées ont développé des éruptions cutanées et une hypersensibilité, signes de lésions d’eczéma profondes.
Après séquençage de l’ARN des fibres nerveuses innervant la peau, les chercheurs ont par ailleurs observé :
- Une activation accrue des neurones percevant la sensation de toucher chez les souriceaux issus de mères stressées (preuve d’une sensibilité exacerbée au toucher).
- Des modifications au niveau des gènes des mastocytes avec activation de ces cellules au repos, ce qui témoigne d’une prédisposition de la peau à développer l’inflammation.
Ces observations ont conduit les scientifiques à penser que la hausse du taux de cortisol chez les mères stressées dérégule à la fois le système nerveux sensitif et le système immunitaire fœtal en cours de développement.
Origine prénatale de l’eczéma : des recherches à approfondir
Cette hypothèse a ensuite été confirmée par l’analyse de prélèvements sanguins de 58 femmes enceintes. Les mères souffrant d’eczéma ont en effet présenté des taux de cortisol élevés pendant le deuxième trimestre de la grossesse (qui correspond au moment où les systèmes immunitaires et nerveux se développent dans la peau chez l’être humain).
Publiés dans la revue Nature, les résultats de cette étude in vivo sur souris suggèrent ainsi le rôle de l’hormone du stress pendant le deuxième trimestre de grossesse dans la dérégulation du système immunitaire fœtal et l’hypersensibilité de la peau à la naissance. Pour les auteurs, ces résultats démontrent clairement et de manière inédite que l’eczéma du nourrisson pourrait avoir des causes prénatales.
Prochaine étape pour les chercheurs ? Approfondir ces travaux de recherche sur les systèmes immunitaires et nerveux in utero dans le but de mieux comprendre comment le vécu des femmes pendant la grossesse peut impacter la santé de l’enfant.
– Maternal stress triggers early-life eczema through fetal mast cell programming. www.nature.com. Consulté le 17 septembre 2025.
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