Est-il dangereux de réveiller un somnambule ?

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Rédigé par Hadrien V. et publié le 2 février 2016

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La rumeur persiste encore et toujours dans les chaumières : réveiller un somnambule serait dangereux. Encore aujourd’hui, il n’est pas rare de lire qu’il est indispensable de reconduire un somnambule à son lit sous peine de l’exposer à un mal mystérieux. Santé sur le Net décrypte le phénomène.

Le somnambule dort debout

Vous pouvez le voir marcher, vous répondre, voire même obéir à des ordres, le somnambule est bien dans une phase de sommeil. Et pas n’importe laquelle. Le somnambulisme (à ne pas confondre avec la somnolence) apparaît toujours pendant la phase de sommeil profond, dans la première moitié de la nuit. Les plus atteints sont les enfants et adolescents de moins de 16 ans. Un épisode dure en général moins de dix minutes et peut se répéter deux à trois fois dans la nuit.

Le cortex, partie du cerveau responsable de la conscience et de la mémoire, est en activité lente. En effet, un somnambule ne se souvient pas (ou très mal) du fait qu’il se soit levé, qu’il ait déplacé tel objet ou parcouru sa maison. De plus, un somnambule ne reconnaîtra pas les visages, ne montrera pas de signes d’expression, sera très maladroit et ne sera pas capable de prononcer des mots de plus d’une syllabe – raison pour laquelle il répond souvent par « oui » ou « non ».

Le système thalamo-cortical, responsable de l’inhibition motrice, est quant à lui partiellement désactivé. Les neurones de cette région du cerveau sont très actifs pendant le sommeil. Ils permettent d’inactiver les mouvements que le cortex moteur envoie continuellement aux membres. Il n’est pas rare de voir « fuiter » des semblants de mouvement pendant le sommeil paradoxal chez n’importe quel dormeur – une grimace, un sourcil qui cligne, voire un membre qui sursaute. Cela vient simplement d’un mauvais shuntage par le système thalamo-cortical. Les enfants, dont les structures corticales ne sont pas arrivées à maturité, sont plus sujets que les adultes aux mouvements nocturnes. Dans le cas du somnambulisme, cette inhibition est simplement levée.

Une expérience menée en 1960 par Michel Jouvet (1) a permis de mettre en évidence ce phénomène. Après avoir détruit des neurones du système thalamo-cortical d’un chat, celui-ci a constaté que l’animal pouvait se lever et poursuivre des proies imaginaires…pendant son sommeil. Le chat vivait réellement son rêve.

Plusieurs types de somnambules

On définit classiquement trois types de somnambules. Ils sont différenciés par leur attitude pendant les épisodes de somnambulisme.

• Le somnambulisme classique est le plus répandu. Il atteint de façon régulière entre 1 et 6% des enfants. Le sujet est docile et obéira facilement quand il lui sera suggéré de regagner son lit.

• Le somnambulisme à risque dure entre dix et trente minutes et peut amener le sujet à des comportements dangereux pour lui-même et ses proches. Il n’est pas rare de voir chez eux des antécédents familiaux.

• Le somnambulisme de terreur associe un somnambulisme à risque à des terreurs nocturnes. S’il perçoit une oppression, le sujet pourra se montrer agressif, courir, crier. C’est une forme très impressionnante qu’il convient de surveiller de prêt par un médecin. Chez ces sujets, le risque de défenestration est doublé.

Plusieurs études (2) ont suggéré une forte composante génétique au somnambulisme – raison pour laquelle il existe des « familles de somnambules ». Le gène HLA-DQB05 serait impliqué dans ces troubles du sommeil. Autre indice sur le caractère génétique, il est désormais connu que la Suède a des proportions de somnambules bien plus élevées qu’ailleurs : 40% chez les adultes contre 10 à 20% dans le reste de l’Europe. (3)

Réveiller un somnambule : quelles conséquences ?

Réveiller un somnambule, c’est réveiller la partie corticale du cerveau. A proprement parler, il n’y a pas de risque neurologique pour le dormeur. Cependant le réveil peut être lent et le sujet peut trébucher ou chuter. C’est la raison pour laquelle il convient d’être doux et progressif. Prévenez la chute, redirigez l’individu avec tact, réveillez-le en douceur si vous le souhaitez, et le retour à la réalité se passera tout à fait normalement.

Dans le cas d’un somnambulisme à risque, la conduite à tenir sera différente. Les situations sont à évaluer au cas par cas par un médecin spécialiste du sommeil. Certains sujets peuvent être atteints d’autres troubles tels que la dépression ou l’anxiété, nécessitant une prise en charge globale et adaptée.

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Hadrien V. Pharmacien


Source
1. M. Jouvet & al. « Etude des mécanismes du sommeil physiologique ». Lyon Médical N 38. 18/09/60
2. M. Lecendreux & al. « HLA and genetic susceptibility to sleepwalking ». Molecular Psychiatry. 24/05/02
3. C. Camara & C. Gaston. « 150 idées reçues sur la science ». Editions Pocket. 2012

  • Je me suis rendu compte de mon somnanbulisme car une nuit je eu une conversation normale avec mon fils et le lendemain j’ai eu un flash de la scène et j’ai demandé à mon fils si j’avais eu une attitude normal et ce fut OUI.

Ou

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