Un jumeau part dans l’espace, l’autre reste sur Terre

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Rédigé par Estelle B. et publié le 16 février 2017

Jumeau espace terre

Les effets de l’apesanteur sur l’organisme suscitent l’intérêt des scientifiques depuis le premier voyage de l’Homme dans l’espace. Récemment, un astronaute a passé près d’un an dans la station spatiale internationale, tandis que son jumeau était resté sur Terre. Depuis son retour, la NASA mène une étude sans précédent sur les changements biologiques provoqués par un séjour dans l’espace.

Des jumeaux pour analyser l’effet de l’apesanteur sur l’organisme

Un astronaute américain, Scott Kelly, a séjourné près d’une année (340 jours) dans la station spatiale internationale, tandis que son jumeau, Mark Kelly, est resté sur Terre. Cette situation sans précédent a constitué une opportunité unique pour la NASA de pouvoir analyser précisément les effets de l’apesanteur sur l’organisme humain.

Durant toute la durée du voyage en orbite puis après le retour sur Terre, de nombreux examens et analyses ont été menés sur les jumeaux pour déterminer l’effet du séjour dans l’espace sur :

  • Le fonctionnement du cerveau et les capacités cognitives (connaissances) ;
  • La structure et le fonctionnement (métabolisme) des cellules ;
  • Le système cardiovasculaire ;
  • La flore intestinale ;
  • Le système immunitaire ;
  • La structure de l’ADN et les mutations génétiques.

Les différences observées entre les deux frères pourraient révéler comment l’organisme humain s’adapte dans les environnements extrêmes. Les résultats préliminaires ont mis en évidence des différences plus ou moins importantes entre les deux frères. Plusieurs années seront nécessaires pour comprendre les mécanismes associés à ces divergences.

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Une expression génétique modifiée

Les génomes (ensemble du matériel génétique) des deux hommes ont été totalement séquencés, et l’expression de leurs gènes comparée. Les premiers résultats sur ces analyses génétiques ont révélé plusieurs changements, qui pourraient être attribués au temps passé dans l’espace :

  • Une modification de l’expression des gènes, plus importante que celle qu’il est possible d’observer sur Terre en lien avec des facteurs environnementaux (alimentation, sommeil) ;
  • Une diminution de la méthylation de l’ADN (changement chimique réversible de l’ADN ayant des conséquences sur l’expression des gènes) ;
  • Une augmentation de la taille des télomères (extrémités des chromosomes).

Très rapidement après le retour sur Terre, ces différences s’estompent et disparaissent. Les scientifiques réalisent actuellement des recherches complémentaires pour comprendre l’origine de ces différences et par quels mécanismes le voyage en orbite influence l’ADN et l’expression des gènes. Ils ignorent pour l’instant quelles conséquences ont ces modifications sur la santé des astronautes.

Cependant, la totalité des résultats génétiques pourrait ne jamais être publiée, car les jumeaux s’opposent formellement à la divulgation de certaines données génétiques les concernant, telles que le risque de développer certaines maladies.

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L’effet sur la flore intestinale

Par ailleurs, l’analyse de la flore intestinale des jumeaux pendant et après le séjour dans l’espace de Scott Kelly a mis en évidence une modification de sa composition en orbite. A son retour sur Terre, les flores des deux frères redeviennent rapidement équivalentes.

Plus précisément, la flore intestinale est affectée par une perturbation de l’équilibre entre les deux groupes bactériens majoritaires. En revanche, la diversité de la flore intestinale n’a pas été impactée, alors que la nourriture dans l’espace est uniquement lyophilisée et contrôlée. Les chercheurs espèrent désormais mieux comprendre les mécanismes à l’origine de ces changements.

Toutes les données recueillies au cours de cette étude sans précédent ne sont pas encore analysées et il faudra encore attendre plusieurs années pour en évaluer toutes les retombées. Ces résultats sont d’une importance capitale pour préserver la santé des astronautes, effectuant des missions de plus en plus longues dans l’espace. Mais ils permettent aussi de mieux comprendre comment l’organisme humain s’adapte en fonction de son environnement.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie


Sources :
Nature News & Comment. Astronaut twins study raises questions about genetic privacy, Alexandra Witze, 26 mars 2015, doi:10.1038/nature.2015.17199
Nature News & Comment. Astronaut twin study hints at stress of space travel, Alexandra Witze, 26 janvier 2017, doi:10.1038/nature.2017.21380.

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