La fatigue chronique, due à une bactérie intestinale ?

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Rédigé par Yasmine Z. et publié le 4 juillet 2016

fatigue chronique

Giloteaux et al., suggèrent dans leur étude parue le 23 juin 2016 dans Microbiome, que le syndrome de fatigue chronique pourrait être lié à une composition anormale de la flore intestinale, élément qui constituerait une méthode simple pour le diagnostic de la maladie.

La fatigue chronique, un diagnostic compliqué

Le syndrome de fatigue chronique est caractérisé par une fatigue persistante inexpliquée pouvant survenir soudainement, non rattachée à une maladie et non améliorée par le repos. Son diagnostic est compliqué et nécessite de nombreux tests médicaux afin d’éliminer toutes les autres causes possibles d’un épuisement extrême.
L’un des tests utilisé pour le diagnostic de cette maladie est un exercice cardio-pulmonaire où les patients font du vélo jusqu’à éprouver de la fatigue. Un patient atteint de cette maladie ne pourra habituellement pas reproduire sa performance le jour suivant.
L’étude de Ludovic Giloteaux et al., parue le 23 juin 2016 dans Microbiome, utilise une nouvelle méthode de diagnostic et identifie pour la première fois des marqueurs biologiques de la maladie : des bactéries intestinales et des agents inflammatoires dans le sang.

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Composition anormale de la flore intestinale

L’équipe a mis au point une méthode de diagnostic peu invasive (analyses d’échantillons de selles et de sang), testée sur 48 personnes atteintes de syndrome de fatigue chronique et sur 39 volontaires sains. Cette méthode a permis une détection correcte de la maladie chez environ 83% des malades. Les résultats ont montré une composition anormale de la flore intestinale chez ces patients : l’analyse de l’ADN microbien a révélé que les patients atteints du syndrome de fatigue chronique avaient moins de types de bactéries différents que les sujets sains.  Aussi, certaines espèces bactériennes connues pour être anti-inflammatoires étaient présentes en quantité réduite chez ces patients et d’autres connues pour être pro-inflammatoires étaient présentes en quantité élevée.
Ceci pourrait expliquer les symptômes inflammatoires et gastro-intestinaux de la maladie et démentirait le concept de « maladie d’origine psychosomatique », pour la fatigue chronique, souvent considérée ainsi en raison du manque d’informations disponibles pour cette maladie.
Les chercheurs ont également montré la présence de marqueurs de l’inflammation dans le sang chez ces patients, probablement due à « une perméabilité intestinale qui permettait aux bactéries d’entrer dans le sang », selon Ludovic Giloteaux, chercheur à Cornell University. La présence de ces bactéries dans le sang pourrait aggraver l’inflammation et donc les symptômes de la maladie.

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Pistes et progrès

Des recherches complémentaires pourraient amener à mieux comprendre le rôle de ces bactéries intestinales dans la fatigue chronique et pourraient aboutir à des pistes thérapeutiques permettant de rééquilibrer la flore intestinale.
A ce jour les chercheurs ignorent si l’altération de la flore intestinale est une cause ou une conséquence de la maladie. L’équipe compte poursuivre ses recherches en caractérisant les virus et champignons présents dans l’intestin de ces patients, ainsi qu’en étudiant leur éventuel rôle dans la maladie.

 

Yasmine Z., Journaliste Scientifique


Sources :
Indicator of chronic fatigue syndrome found in gut bacteria. MedicalXpress. 27 juin 2016.
Ludovic Giloteaux et al. Reduced diversity and altered composition of the gut microbiome in individuals with myalgic encephalomyelitis/chronic fatigue syndrome. Microbiome. 23 juin 2016. DOI: 10.1186/s40168-016-0171-4