Aujourd’hui, les nouveaux médicaments sont souvent développés grâce au drug design (conception de médicaments), qui fait notamment appel à la chimie combinatoire. Pour déterminer quelles sont les substances les plus intéressantes à tester sur le plan pharmacologique, l’intelligence artificielle (IA) peut être d’une aide précieuse. Explications.
Du drug design au candidat médicament
Avant de devenir un médicament, un principe actif passe par de multiples étapes de développement. Mais avant tout, les chercheurs doivent choisir quels principes actifs ils vont tester pour leur activité pharmacologique. Et ce choix ne se fait pas au hasard. Les chimistes utilisent notamment la chimie combinatoire pour générer des gammes de substances à tester, en fonction de certaines activités biologiques.
À savoir ! La chimie combinatoire combine des molécules ou différentes structures chimiques pour former de nouvelles substances susceptibles de présenter des activités biologiques intéressantes.
Une illustration de drug design, ou conception de médicaments, est la mise au point de nouvelles substances antibiotiques, à partir de la pénicilline découverte dans les années 1930. En modifiant seulement certaines parties de la molécule, les chercheurs ont pu développer de nouvelles générations de pénicillines.
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L’intelligence artificielle pour développer de nouveaux principes actifs
L’une des grandes difficultés rencontrées par les scientifiques dans la conception de principes actifs est la multitude de données disponibles à analyser. L’intelligence artificielle (IA) peut les aider sur ce point. Créée en 2016, la société française Iktos s’est notamment spécialisée dans l’IA appliquée à la conception de nouveaux médicaments. Le logiciel d’IA utilisé permet d’identifier rapidement des molécules répondant simultanément à plusieurs critères de bio-activités. Ces molécules constituent alors de bons candidats pour les recherches en développement clinique.
La société Iktos développe actuellement différentes collaborations avec des laboratoires pharmaceutiques pour les aider à accélérer et optimiser leurs étapes de drug design. En décembre 2019, Iktos a ainsi annoncé une collaboration avec Almirall, une entreprise pharmaceutique globale spécialisée en dermatologie. L’objectif de cette collaboration est de concevoir de nouvelles substances optimisées et d’accélérer l’identification des substances prometteuses qui pourraient devenir des candidats médicaments.
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Un nouveau candidat médicament en seulement 46 jours
Autre démonstration de l’intérêt de l’IA dans le drug design, la collaboration entre l’université de Toronto et la startup Insilico Medicine. Ensemble, ils ont combiné deux approches d’IA pour créer un nouveau médicament :
- Les réseaux antagonistes génératifs (GAN) ;
- L’apprentissage par renforcement (RL).
En pratique, la première étape a généré 30 000 modèles de molécules grâce aux systèmes d’intelligence artificielle, en seulement 21 jours. Ces molécules devaient cibler une protéine liée à la fibrose rénale (remplacement d’un tissu rénal normal par du tissu conjonctif fibreux, non fonctionnel). Six de ces molécules ont été synthétisées en laboratoire, et seulement deux d’entre elles ont été testées sur des cellules souches. La molécule la plus prometteuse a pu être testée chez l’animal, après seulement 46 jours de conception.
Ces deux exemples illustrent les potentialités de l’intelligence artificielle pour concevoir plus rapidement et à moindre coût de nouveaux principes actifs, qui pourront devenir les médicaments de demain.
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Estelle B., Docteur en Pharmacie
– 46 jours : c’est le temps qu’il aura fallu à une IA pour créer un médicament. Siècle digital. Consulté le 5 janvier 2020.