Maladie de Parkinson : un coupable nommé calcium ?

Actualités Neurologie Santé des séniors

Rédigé par Julie P. et publié le 28 février 2018

En France, 100 000 à 120 000 personnes sont touchées par la maladie de Parkinson. Et si le calcium jouait un rôle clé dans le développement de la maladie ? Une nouvelle étude menée par une équipe de chercheurs internationaux constate que des niveaux élevés de calcium dans certaines cellules du cerveau peuvent favoriser la formation d’agrégats toxiques retrouvés typiquement chez les patients atteints de cette pathologie neurologique. Focus sur ces résultats permettant de mieux comprendre les mécanismes neurophysiologiques de la maladie.

maladie de parkinson et calcium

Corps de Lewy et maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson est l’une des nombreuses maladies neurodégénératives causées par le dysfonctionnement de protéines contenues naturellement dans notre cerveau. En se repliant et en adhérant à d’autres protéines de manière destructurée, ces protéines finissent par former des fines structures nommées fibrilles amyloïdes. Des structures toxiques pour le neurone.

Dans cette maladie, c’est spécifiquement les neurones à dopamine de la substance noire qui sont détruits par des dépôts amyloïdes.

À savoir ! Les neurones à dopamine sont responsables de la sécrétion de dopamine dans le système nerveux central. Ce neurotransmetteur est impliqué dans la régulation des mouvements. La substance noire est un noyau du système nerveux situé au niveau du mésencéphale (région du tronc cérébral reliée au cerveau) et du diencéphale (une région du cerveau).

Ces dépôts anormaux sont constitués de protéine alpha-synucléine. On les nomme corps de Lewy, en hommage au médecin allemand qui les décrivit en 1912.

On sait que l’alpha-synucléine est impliquée dans :

  • Le flux régulier des signaux chimiques dans le cerveau ;
  • Le mouvement des molécules à l’intérieur et hors des terminaisons nerveuses.

Les fonctions remplies par l’alpha-synucléine ne sont pas encore toutes élucidées. Il a été montré qu’elle inhibait partiellement la communication entre les neurones quand elle était surexprimée.

schéma synapse chimique
Synapse chimique

Cependant, les données ne sont pas encore concluantes et son rôle régulateur, et son mode de fonctionnement, dans la transmission des messages neuronaux est encore débattue.

« L’alpha-synucléine est une très petite protéine très peu structurée et elle doit interagir avec d’autres protéines ou structures pour devenir fonctionnelle. Ceci a rendu l’étude difficile » déclare Gabriele Kaminski Schierle, chercheuse à l’université de Cambridge, en Angleterre, et responsable de la supervision de cette étude.

Etant donné que l’alpha-synucléine est localisée préférentiellement au niveau des zones présynaptiques et que c’est à ce même niveau que des variations importantes de concentration en calcium prennent place, les chercheurs ont émis l’hypothèse d’une interaction éventuelle entre eux.

À savoir ! Une synapse est une zone de contact entre deux neurones. La zone en amont de la synapse est nommée zone présynaptique et la zone en aval est appelée zone postsynaptique.  Dans les synapses chimiques, le signal électrique du neurone (un potentiel d’action) se transforme en signal biochimique (libération de neurotransmetteur) pour communiquer avec le neurone adjacent. La zone présynaptique contient des vésicules contenant différentes molécules appelées neurotransmetteurs. Le changement de polarité de membrane provoqué par l’arrivée de l’influx nerveux provoque la libération de calcium. En retour, une augmentation de calcium intracellulaire provoque la fusion de la vésicule synaptique avec la membrane du neurone et la libération de neurotransmetteur dans la fente synaptique. Ce phénomène s’appelle l’exocytose. Une fois le neurotransmetteur capté, un potentiel post-synaptique se déclenche alors dans le neurone adjacent.

Lire aussiRalentir la maladie de Parkinson grâce à l’exercice physique

Le calcium influence la formation des corps de Lewy

Avec l’aide de techniques de microscopie super-résolutive, les chercheurs ont pu observer le comportement de l’alpha-synucléine au contact de vésicules synaptiques isolées de rats et en présence de calcium.

Leurs observations ?

Lorsque les niveaux de calcium dans les cellules nerveuses augmentent, lors de l’arrivée d’un influx nerveux par exemple, l’alpha-synucléine se lie aux vésicules synaptiques en de multiples points pour provoquer, au final, la fusion des vésicules.

Pour les chercheurs, ce phénomène peut indiquer que le rôle normal de l’alpha-synucléine est d’aider la transmission chimique de l’information à travers les cellules nerveuses.

Cependant, lorsque les chercheurs augmentent la concentration de calcium dans le milieu de culture, l’alpha-synucléine ne remplit plus correctement son rôle.

Dans un communiqué de presse de l’université de Cambridge, Amberley Stephens qui a participé à cette étude précise que « Lorsqu’il y a trop de calcium, l’équilibre est basculé et l’agrégation de l’alpha- synucléine commence, menant à la maladie de Parkinson ».

Désormais, les chercheurs émettent plusieurs hypothèses quant à l’origine éventuelle de cette augmentation de calcium dans les neurones :

  • Une perturbation sur le gène impliqué dans l’expression de l’alpha-synucléine ;
  • Un déficit de la régulation biochimique de calcium dans ces neurones.

Pour les chercheurs, cette découverte est très prometteuse et il serait intéressant de mesurer les effets de médicaments inhibiteurs de calcium sur la formation des corps de Lewy.

Il suggère notamment de réaliser des essais avec la molécule isradipine utilisée notamment comme inhibiteur de calcium dans certaines pathologies cardiaques.

Lire aussiLe requin à l’attaque de la maladie de Parkinson

Julie P., Journaliste scientifique

– Calcium may play a role in the development of Parkinson’s disease. Science Daily. Consulté le 27 février 2018.
– C-terminal calcium binding of α-synuclein modulates synaptic vesicle interaction. Nature Communications. J. Lautenschläger et al.. Le 19 janvier 2018.