En France, chaque année, 400 nourrissons décèdent du syndrome de la mort subite du nourrisson appelé désormais Mort Inattendue du Nourrisson (MIN). Cette première cause de mortalité entre 1 mois et 1 an est très redoutée par les nouveaux parents compte tenu du fait que son mécanisme reste encore inexpliqué. L’enjeu de la Recherche est toujours d’identifier précisément les causes de ce syndrome qui survient pendant le sommeil et touche deux fois plus les petits garçons. Deux études sont venues renforcer l’hypothèse des origines génétiques de ce syndrome. Explications.
Des modifications génétiques impactant le cœur du nourrisson
La première étude, menée par des chercheurs danois, a montré que des frères et des sœurs d’enfants décédés de la MIN ont 3 à 4 fois plus de risque de décéder de la même manière que leurs aînés.
Avant d’arriver à cette conclusion, les scientifiques du centre hospitalier universitaire (CHU) de Copenhague, ont analysé, à partir des registres nationaux, les dossiers médicaux de 2,5 millions nourrissons âgés de moins d’un an et nés entre 1978 et 2015.
Globalement, 90 % des décès sont survenus dans les 9 premiers mois de vie.
Pour les chercheurs cette observation pourrait s’expliquer par des mutations génétiques touchant la fonction cardiaque. « Nous savons que dans 5 à 15 % des cas de mort subite du nourrisson, nous pouvons identifier une mutation génétique associée à des troubles cardiaques héréditaires qui pourraient avoir contribué à une mort subite par arythmie » souligne Charlotte Glinge, auteure principale de l’étude et professeure à l’université de Copenhague.
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Mais aussi la fonction respiratoire
A la même période, une étude, sur 472 nourrissons américains et anglais décédés par la MIN et sur un groupe contrôle, a montré que de rares mutations génétiques causant un dysfonctionnement des muscles respiratoires sont davantage retrouvées chez les nourrissons décédés d’un syndrome de MIN.
Ces mutations touchent d’ailleurs le gène SCN4A qui est responsable de l’expression d’un du canal sodium nommé Nav et situé sur les cellules du muscle y compris les muscles respiratoires.
À savoir ! Les canaux sodium présents sur les cellules musculaires sont nécessaires pour générer une excitation de la fibre musculaire à l’origine de la contraction. La libération d’acétylcholine (neurotransmetteur) par le neurone induit l’ouverture des canaux sodium au niveau du muscle. Cette ouverture permet l’entrée d’ions sodium dans la fibre musculaire pour modifier sa polarisation.
Les mutations de ce gène sont associées à :
- Des troubles neuromusculaires comme la myotonie, la paralysie périodique, la myopathie et le syndrome myasthénique ;
- Des pauses respiratoires ;
- Des spasmes au niveau des cordes vocales rendant la respiration et la parole transitoirement difficile.
À savoir ! La myotonie est un trouble du tonus musculaire touchant tous les muscles et se caractérisant par une lenteur des mouvements et un relâchement musculaire très lent et difficile après la contraction.
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Comment mettre en application ces découvertes ?
Pour la mutation touchant le système cardiaque, les chercheurs recommandent de réaliser un suivi génétique et des examens médicaux cardiaques (électrocardiogramme et échographie du cœur) chez les nourrissons issus de familles victimes, par le passé, d’un ou de plusieurs événements de MIN.
Concernant la mutation du gène impliqué dans la fonction respiratoire, les chercheurs préconisent d’être vigilant quant à l’environnement de l’enfant et d’éliminer tous les facteurs qui pourraient aggraver sa difficulté ou son inconfort à respirer.
Ils conseillent ainsi de :
- Tenir la fumée de tabac éloignée de l’enfant ;
- Ne pas trop couvrir l’enfant ;
- Adapter le couchage de l’enfant selon les recommandations en vigueur (coucher sur le dos, utiliser un matelas ferme et retirer les objets mous aux alentours, installer le lit de l’enfant dans la même chambre que la mère etc..) ;
- Consulter rapidement un médecin ou un pédiatre si le nourrisson présente un encombrement respiratoire ou tout autres troubles.
Michael Hanna, co-auteur de l’étude, précise que : « Bien qu’il existe des médicaments pour les enfants et les adultes atteints de troubles neuromusculaires liés à des mutations du gène SCN4A, il n’est pas établi que ces traitements pourraient diminuer le risque de mort subite du nourrisson. D’autres recherches seront nécessaires avant que cette découverte puisse mener à un traitement ».
Pour les chercheurs, il n’existe pas une seule cause possible pour expliquer la survenue d’une MIN et c’est la conjonction de certains facteurs environnementaux et génétiques qui serait à l’origine de l’avènement d’un tel drame.
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Julie P., Journaliste scientifique
– Mécanismes cellulaires et moléculaires de la contraction. Institut de myologie. Consulté le 13 avril 2018.