Un principe actif et son antidote dans un même comprimé !

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Rédigé par Estelle B. et publié le 29 juillet 2017

Contrôler la durée précise de l’effet d’un médicament et minimiser le risque d’effet indésirable grave constituent des enjeux importants pour le développement de nouveaux médicaments. Récemment des chercheurs français ont conçu un médicament contenant à la fois un principe actif et son antidote, capable de le neutraliser à tout moment !

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Principe actif et antidote

Les médicaments contiennent des substances actives, appelées les principes actifs, qui persistent dans l’organisme plusieurs jours, semaines ou mois, avant d’être totalement éliminés. Ces principes actifs exercent l’activité thérapeutique revendiquée par le médicament (effet antihypertenseur, action antibiotique, effet antalgique, etc.), mais aussi des effets indésirables variables selon les substances. L’activité thérapeutique et les effets indésirables du médicament se poursuivent tant que le principe actif n’est pas totalement éliminé de l’organisme.

Dans le cas de certains médicaments, des antidotes existent pour stopper l’activité du principe actif ou bloquer certains effets indésirables. Un antidote est un composé capable d’empêcher une substance d’exercer ses effets toxiques. Jusque-là, il fallait administrer au patient l’antidote dans deux grands types de situation :

  • Un surdosage du médicament ;
  • Des effets indésirables graves.

Mais le décalage entre l’administration du médicament et de l’antidote peuvent dans certains cas exposer le patient à un risque grave.

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Réunir principe actif et antidote dans la même formulation

Pour pallier à ce type de problème, des chercheurs français ont travaillé à associer dans le même médicament, le principe actif et son antidote. Ils ont concentré leurs efforts sur un principe actif : la warfarine, anticoagulant de la classe médicamenteuse des anti-vitamines K.

A savoir ! La warfarine exerce son effet anticoagulant, en empêchant la synthèse des formes actives de plusieurs facteurs de la coagulation. Ce médicament est prescrit dans le traitement de certaines pathologies cardiaques (cardiopathies emboligènes, infarctus du myocarde), des embolies pulmonaires et des thromboses veineuses.

Le principal effet indésirable de la warfarine, potentiellement fatal, est un risque hémorragique en cas de posologie inadaptée au patient. Les chercheurs ont tout d’abord synthétisé un antidote capable de neutraliser la warfarine. Puis ils ont incorporé dans la même formulation pharmaceutique à la fois la warfarine et son antidote.

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« Click and Clear »

Chez la souris, le médicament conçu par les chercheurs a permis de réactiver une coagulation normale, après neutralisation dans la circulation sanguine de la warfarine par l’antidote. La substance résultant de l’association entre la warfarine et l’antidote est inactive sur la souris (pas d’effet anticoagulant) et est rapidement éliminée dans les urines.

Ce procédé pharmacologique innovant, baptisé « Click and Clear » avait déjà été utilisé pour tracer d’autres types de composés, telles que les protéines et les lipides. Appliqué ici à un principe actif médicamenteux, il ouvre la voie vers de nouvelles approches médicamenteuses, particulièrement intéressantes pour les médicaments présentant des effets indésirables graves. De plus, les chercheurs ont synthétisé un antidote, capable de neutraliser non seulement la warfarine, mais aussi tous les principes actifs ayant une structure chimique similaire.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie

– An in vivo strategy to counteract post-administration anticoagulant activity of azido-Warfarin. Ursuegui, Sylvain and al. 2017. Nature Communications 8:15242. DOI: 10.1038/ncomms15242.
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