Réduire la mortalité due à l’hémorragie du post-partum

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Rédigé par Estelle B. et publié le 16 mai 2017

Malgré les progrès thérapeutiques, l’hémorragie du post-partum reste la première cause de mortalité maternelle suite à l’accouchement et concerne entre 5 et 10 % des accouchements. Comment limiter les conséquences de cette complication ? Une récente étude suggère que l’administration précoce d’acide tranexamique pourrait réduire la mortalité due à cette hémorragie.

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L’hémorragie du post-partum

L’hémorragie du post-partum se définit comme une perte sanguine supérieur à 0,5 litre après l’accouchement. Les spécialistes parlent d’hémorragie sévère au-delà d’un litre de sang perdu.

Survenant dans 5 à 10 % des accouchements, l’hémorragie du post-partum peut survenir aussi bien après un accouchement par voie basse qu’après une césarienne. Elle est principalement due à l’atonie utérine (contractions insuffisantes ou inefficaces de l’utérus), mais aussi à des plaies au niveau de l’appareil génital. Elle demeure dans les pays développés la principale cause de décès maternel suite à l’accouchement, même si la majorité des cas sont recensés dans les pays en voie de développement.

La prise en charge de l’hémorragie du post-partum est étroitement liée au cas spécifique de chaque patiente et peut comporter plusieurs aspects :

  • L’administration de médicaments, en particulier d’oxytocine pour stimuler les contractions utérines ;
  • Des transfusions sanguines ;
  • Une révision utérine (exploration de la cavité utérine pour détecter d’éventuels résidus placentaires non éliminés lors de la délivrance) ;
  • Une hystérectomie (ablation chirurgicale de l’utérus).

A savoir ! L’oxytocine est un dérivé de synthèse d’une hormone, l’ocytocine, produite par  l’organisme pour déclencher les contractions utérines lors du travail. Elle est administrée au cours de l’accouchement pour augmenter les contractions et ainsi réduire la durée du travail.

Outre le risque mortel, cette hémorragie expose les femmes aux complications de la transfusion sanguine et de la réanimation, ainsi qu’à un risque de stérilité en cas d’hystérectomie.

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Et l’acide tranexamique ?

Récemment, des chercheurs se sont intéressés de plus près à l’intérêt de l’acide tranexamique dans la prise en charge de l’hémorragie du post-partum. L’acide tranexamique est un médicament qui possède une action antihémorragique, en inhibant la fibrinolyse (phénomène de dissolution des caillots sanguins). Il est principalement indiqué dans la prise en charge d’accidents hémorragiques dus à une fibrinolyse.

Actuellement, selon les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’acide tranexamique n’est pas prescrit en première intention dans la prise en charge de l’hémorragie du post-partum. Il est indiqué en seconde intention, après échec des autres traitements.

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Un réel intérêt en cas d’administration précoce

L’étude, menée sur 20 060 femmes dans 21 pays principalement d’Afrique et d’Asie, met en évidence l’intérêt de l’acide tranexamique dans la prise en charge des hémorragies du post-partum.

Les participantes de l’étude, ayant eu une hémorragie après l’accouchement, ont été réparties aléatoirement en deux groupes :

  • Un groupe recevant 1 g d’acide tranexamique par voie intraveineuse ;
  • Un groupe recevant un placebo.

Le reste de la prise en charge était strictement équivalent entre les deux groupes. Si le saignement se poursuivait après 30 minutes ou s’il recommençait dans les 24 heures, une seconde dose (d’acide tranexamique ou de placebo) était administrée.

Les résultats montrent que l’acide tranexamique pourrait réduire d’un tiers les décès maternels dus à des hémorragies du post-partum (155 décès dans le groupe traité contre 191 décès dans le groupe placebo). L’efficacité du médicament est maximale, lorsqu’il est administré dans les 3 heures qui suivent les premières pertes sanguines. En revanche, l’utilisation de l’acide tranexamique n’influence pas le taux d’hystérectomie (358 cas dans le groupe traité contre 351 cas dans le groupe placebo). Les complications, notamment les accidents thromboemboliques (accidents cardiovasculaires), ne diffèrent pas significativement entre les deux groupes.

Ces résultats mettent en évidence que l’acide tranexamique est un traitement efficace et sûr pour réduire la mortalité des hémorragies du post-partum. Les auteurs suggèrent qu’il soit considéré dans les recommandations de l’OMS comme un traitement de première intention, à administrer le plus rapidement possible après le diagnostic.

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Estelle B. / Docteur en Pharmacie

– Les hémorragies du post-partum. Recommandations pour la pratique clinique. Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français. 2014. 20 pages.
– Effect of early tranexamic acid administration on mortality, hysterectomy, and other morbidities in women with post-partum haemorrhage (WOMAN): an international, randomised, double-blind, placebo-controlled trial. Woman trial collaborators. 2017. The Lancet