Seniors et polymédication : déprescrire grâce à une application ?

Par |Publié le : 30 juin 2025|Dernière mise à jour : 30 juin 2025|4 min de lecture|

Population particulièrement fragile, les personnes âgées souffrant de diverses pathologies peuvent se voir prescrire de nombreux médicaments. Or en pratique, ces traitements sont peu réévalués et la polymédication multiplie les risques d’effets indésirables. Et s’il était possible de déprescrire des médicaments inappropriés grâce à une application ? C’est ce que suggère une récente étude canadienne selon laquelle un outil électronique augmenterait significativement les chances de déprescrire des médicaments inappropriés au sein d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Seniors et polymédication

Du fait de leur vulnérabilité, les personnes âgées souffrent souvent de plusieurs maladies chroniques et se voient donc prescrire divers traitements médicamenteux. C’est ce que l’on appelle la polymédication. Parfois prescrits de longue date, ces traitements sont généralement peu réévalués.

À savoir !L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la polymédication comme « l’administration de nombreux médicaments de façon simultanée ou l’administration d’un nombre excessif de médicaments ».

A ces prescriptions peuvent s’ajouter des prescriptions médicamenteuses potentiellement inappropriées que l’on peut notamment observer chez des résidents d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Ces prescriptions peuvent être motivées par des troubles du comportement pour lesquels des antipsychotiques ou des sédatifs sont souvent prescrits hors autorisation de mise sur le marché (AMM).

Or, ces prescriptions potentiellement inappropriées augmentent le risque de survenue d’événements indésirables. Les patients âgés se voient donc exposés à des risques accrus de chutes, de fractures, d’hospitalisations, de troubles cognitifs voire de décès prématurés.  D’où l’importance de trouver des leviers pour réduire le nombre de ces prescriptions chez les personnes âgées. 

Une application pour déprescrire des médicaments inappropriés

Dans ce contexte, des chercheurs canadiens ont conçu une innovation numérique pour aider les médecins à déprescrire des médicaments potentiellement inappropriés chez les résidents en Ehpad. Cette innovation se compose :

  • D’un logiciel analysant les données propres à chaque patient et identifiant les opportunités de déprescription.
  • Et d’une application permettant au médecin d’avoir accès à ces données lorsqu’il se trouve au chevet du patient.

Les scientifiques ont ensuite mis sur pied une étude contrôlée. L’objectif de cette étude ? Evaluer la pertinence d’un tel outil d’aide à la décision pour déprescrire dans cinq établissements d’Ehpad comptabilisant 1 228 résidents dont 59 % recevaient au moins un médicament potentiellement inapproprié.

Pour cela, les cinq établissements ont été répartis en trois groupes. Après une phase initiale minimale de trois mois, un premier groupe a commencé l’intervention. Puis trois mois plus tard, le second groupe et encore trois mois plus tard, le troisième groupe.

 Un outil d’aide à la décision pertinent

Sur les 725 patients (âge médian 84 ans) qui prenaient au moins un médicament potentiellement inapproprié, les scientifiques ont pu faire les observations suivantes :  

  • Nombre médian de médicaments prescrits : 10 par patient.
  • Nombre de médicaments potentiellement inappropriés : 3.
  • Médicaments potentiellement inappropriés les plus fréquents : inhibiteurs de la pompe à protons (55,6 %), anticoagulants (37,1 %) et benzodiazépines ou hypnotiques sédatifs (39 %).
  • Au cours de la phase initiale, déprescription d’un ou de plusieurs médicaments potentiellement inappropriés chez 12,7 % des patients contre 36,4 % ensuite à l’aide du logiciel.
  • Outil d’aide à la décision associé à une plus grande probabilité de déprescription.
  • Médicaments les plus fréquemment déprescrits au cours de la période d’intervention :  opioïdes, antipsychotiques, docusate (laxatif), benzodiazépines ou hypnotiques.

Publiés dans la revue JAMA Network Open, les résultats de cette étude montrent que l’outil électronique d’aide à la décision au chevet du patient est pertinent et augmente significativement les chances de déprescrire des médicaments inappropriés en Ehpad.

Pour les auteurs, cet outil électronique d’aide à la décision pourrait donc être intégré à la routine clinique des Ehpad bien qu’ils aient observé des chutes significativement plus fréquentes au cours des périodes d’intervention. Ils supposent qu’elles sont liées à une moins forte sédation et à une plus grande mobilité des résidents.

Sources
– Une application utile pour la déprescription de médicaments potentiellement inappropriés en Ehpad. Vidal. . www.vidal.fr. Consulté le 18 juin 2025.
– Prévalence de la polymédication chez les personnes âgées en France : enquête de l'IRDES. Vidal. . . Consulté le 18 juin 2025.

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Deborah L.
Pharmacienne. Spécialisée dans les domaines de la santé, de la nutrition et de la cosmétologie. Passionnée par l'écriture, elle sait allier la rigueur scientifique à la beauté de notre langue. Rédige un contenu scientifique fiable avec des sources vérifiées en respect de notre charte HIC.