La dépendance aux opioïdes toucherait en France près de 180 000 personnes. Si la buprénorphine représente une molécule de référence dans le traitement d’une telle dépendance, une étude menée par des chercheurs canadiens suggère que le risque d’interruption du traitement de substitution des addictions aux opioïdes s’avère plus faible avec la méthadone. Zoom sur les conclusions de cette étude inédite.
Les opioïdes, des substances dangereuses
Les opioïdes désignent un groupe de substances psychotropes utilisées comme antalgiques de palier II et III dans le traitement des douleurs sévères. Ces substances interagissent directement avec les récepteurs morphiniques et présentent des effets similaires à ceux de l’opium.
Mais ces substances (morphine, buprénorphine, fentanyl, hydromorphone, oxycodone) sont également des drogues dures, utilisées par les toxicomanes chez qui elles provoquent un état de dépendance important. En France, on estime à 180 000 le nombre de personnes dépendantes aux opiacés. Et les risques encourus sont graves et nombreux, engageant le pronostic vital de la personne en cas de surdosage.
Quel traitement privilégier dans le trouble de l’usage des opioïdes ?
S’agissant de la prise en charge d’une telle dépendance, la buprénorphine représente une molécule de référence dans le traitement de substitution des addictions aux opioïdes par voie orale. Elle fait néanmoins l’objet d’abus et d’une mauvaise observance de la part des patients en phase de sevrage.
A l’échelle internationale, les recommandations relatives aux agonistes d’opioïdes dans le traitement du trouble de l’usage des opioïdes (TUO) sont quant à elles disparates. Le niveau de preuve relatif à l’efficacité des différentes options thérapeutiques s’avère en effet faible.
À savoir ! Le trouble de l’usage de substance désigne un comportement pathologique où le patient continue à utiliser une substance malgré des problèmes considérables (personnels, familiaux, socioprofessionnels, etc.) liés à son utilisation.
Dans ce contexte, des chercheurs canadiens ont entrepris de faire la lumière sur le sujet en comparant la méthadone au duo buprenorphine/naloxone dans le traitement du trouble de l’usage des opioïdes (TUO).
Une meilleure observance du traitement avec la méthadone
Cette étude rétrospective s’est ainsi appuyée sur les données d’un panel de près de 31 000 patients ayant débuté un premier traitement pour trouble de l’usage des opioïdes entre 2010 et 2020. Il s’agissait du duo buprenorphine/naloxone pour 39 % de ces patients. L’objectif d’une telle étude ? Mesurer l’observance au traitement et la mortalité des patients à 2 ans.
Après analyse des données, les chercheurs ont pu noter un intérêt thérapeutique significativement supérieur pour la méthadone avec :
- Une meilleure observance du traitement pour les patients sous méthadone (66 jours en médiane contre 30 jours pour les patients sous buprenorphine/naloxone avant une interruption de plus de 5 jours).
- Un risque d’arrêt de 81,5% pour la méthadone contre 88,8 % pour la buprenorphine/naloxone.
- Un risque d’interruption aux doses optimales de traitement de 30,7 % pour la méthadone contre 42,1 % pour la buprenorphine/naloxone.
S’agissant du risque de mortalité, les chercheurs ont constaté :
- Un risque de mortalité faible pour les deux traitements chez les usagers d’opioïdes commençant leur premier traitement (0,08 % pour la buprenorphine/naloxone et 0,13 % pour la méthadone).
- Un risque de mortalité faible chez l’ensemble des patients qu’il s’agisse de leur premier traitement pour trouble de l’usage des opioïdes (0,08 %) ou non (0,09 %).
Notons que la cohérence de ces résultats s’est maintenue après avoir pris en compte une molécule plus puissante, le fentanyl dans l’usage d’opioïdes.
À savoir ! Le fentanyl possède un effet analgésique environ 100 fois plus puissant que celui de la morphine. Ses principaux effets thérapeutiques sont analgésiques et sédatifs.
Forts de ces résultats publiés dans la revue Jama, les auteurs de cette étude invitent ainsi à réviser les recommandations internationales relatives au traitement du trouble de l’usage des opioïdes pour favoriser une meilleure observance de la part des patients.
– Dépendance aux opiacés (traitement de substitution). . www.vidal.fr. Consulté le 27 octobre 2024..
– Diagnostic du trouble de l’usage d’opioïdes. Haute Autorité de santé. . www.has-sante.fr. Consulté le 27 octobre 2024..
Rédigé par Déborah L.