Selon Santé Publique France, les cancers représentent la première cause de décès chez l’homme, et la seconde chez la femme. Le développement de la technologie à ARNm avait largement fait débat lors du développement des vaccins contre la Covid-19. Pourtant, elle ouvre aujourd’hui la voie aux chercheurs vers la mise au point de vaccins contre le cancer. Explications.
Qu’est-ce qu’un vaccin à ARNm ?
Tous les vaccins développés avant cette nouvelle technologie étaient basés sur deux principes :
- L’injection d’un virus atténué ou inactivé. Il s’agit d’une part d’un virus privé de son pouvoir pathogène. D’autre part, le virus garde son pouvoir immunogène (c’est-à-dire capable d’induire la réponse immunitaire) ;
- L’injection de protéines de la bactérie ou du virus, pour provoquer la réponse immunitaire.
Dans les vaccins à ARNm, l’objectif est d’utiliser la machinerie cellulaire de l’organisme en injectant uniquement un ARNm. Soulignons que cet ARNm doit correspondre à une protéine de l’agent pathogène. L’ARNm est un acide nucléique copié à partir de l’ADN du noyau, puis traduit en protéine dans la cellule. En injectant l’ARNm comme vaccin, c’est la machinerie de la cellule de l’organisme elle-même qui va traduire cet ARN en protéine. C’est ensuite cette protéine qui va induire la réaction immunitaire. De ce fait, la technologie ARNm pour les vaccins présente plusieurs avantages :
- Premièrement, des vaccins plus faciles à produire ;
- Deuxièmement, l’absence de manipulation d’agents pathogènes ;
- Et enfin, l’absence d’adjuvants, dont certains sont décriés pour leurs effets sur la santé.
L’ARNm pour lutter contre le cancer
Avec le développement des vaccins ARNm contre la Covid-19, la technologie ARNm prend son essor et fait preuve de son intérêt et de son efficacité. Cependant, cette technologie est-elle utilisable pour mettre au point des vaccins contre le cancer ? Depuis la commercialisation des premiers vaccins à ARNm, plusieurs équipes de recherche dans le monde se sont lancées dans le développement de vaccins contre le cancer.
La société BioNTech a lancé en 2021 un essai clinique de phase II, pour évaluer l’intérêt du vaccin BNT111 dans le traitement des mélanomes avancés. Ce vaccin est basé sur la technologie ARNm. Il permet aux cellules de produire une combinaison de quatre antigènes habituellement associés à plus de 90 % des mélanomes. Ces quatre antigènes provoquent une forte réaction du système immunitaire dirigée contre les cellules cancéreuses. L’avantage de cette technologie serait de pouvoir personnaliser le vaccin en fonction des antigènes exprimés par les cellules cancéreuses du patient. En d’autres termes, le vaccin pourrait s’adapter à chaque type de tumeur.
Un vaccin pour mieux lutter contre le cancer
Plus récemment, des chercheurs américains ont testé sur des souris un vaccin contre le cancer en ciblant les ganglions lymphatiques et non le foie. En effet, ils sont partis de l’observation que les ARNm se retrouvent souvent dans le foie. Pourtant, la réponse immunitaire produite est plus efficace au niveau du système lymphatique (partie du système immunitaire). Ils ont donc développé des nanoparticules lipidiques permettant de diriger l’ARNm vers le système lymphatique.
A ce niveau, les cellules dendritiques et les macrophages (deux types de cellules immunitaires) absorbent le vaccin pour induire une réaction immunitaire particulièrement forte contre le cancer. Ce vaccin à ARNm a été testé chez des souris atteintes d’un mélanome métastatique, en association avec un traitement d’immunothérapie anticancéreuse (anti-PD1). Les chercheurs ont observé une rémission du mélanome chez 40 % des souris, sans récidive. De ce fait, la technologie ARNm pourrait permettre de développer des vaccins contre le cancer. Ils agiraient en stimulant la réponse immunitaire contre les cellules cancéreuses. En conclusion, il s’agit pour l’instant de vaccins thérapeutiques, adjuvants des autres traitements anticancéreux, et non de vaccins préventifs !
Estelle B., Docteur en Pharmacie
– Lipid nanoparticle-mediated lymph node–targeting delivery of mRNA cancer vaccine elicits robust CD8+ T cell response. pnas.org. Consulté le 29 août 2022.