Et si l’espoir d’une rémission prolongée après arrêt des traitements antirétroviraux était permis pour les patients atteints par le VIH ? C’est ce que laisse entrevoir la dernière Conférence internationale sur le Sida qui s’est penchée sur divers cas de patients en rémission prolongée après arrêt de leurs traitements. Un sujet d’autant plus important en cette période inédite d’épidémie mondiale de Covid-19.
Des cas de patients qui interpellent
A l’heure actuelle, il est possible de traiter de façon efficace les patients infectés par le VIH au moyen de médicaments antiviraux. Mais ce traitement doit être suivi à vie car leur système immunitaire est incapable de se débarrasser du virus qui recommencera à se répliquer si les soins s’interrompent.
Bien que l’édition 2020 de la Conférence internationale sur le Sida ait été entièrement virtuelle à cause de la pandémie de SARS-CoV-2, elle a confirmé l’intérêt toujours croissant de la communauté scientifique pour les cas de patients en rémission prolongée après arrêt des traitements antirétroviraux.
Depuis plusieurs années, ce sont en effet deux patients atteints par le VIH qui font l’objet de toute l’attention des chercheurs dans la mesure où ils présentent une charge virale totalement indétectable, et ce malgré l’interruption de leur traitement antirétroviral (depuis treize ans pour le premier sujet et depuis trois ans pour le second).
Ces deux patients ont en commun d’avoir reçu dans le cadre du traitement d’une hémopathie maligne (cancer du sang) une greffe de cellules souches hématopoïétiques particulières. Ces cellules souches étaient en effet issues de donneurs porteurs d’une mutation spécifique du gène CCR5 conférant une protection contre le VIH.
À savoir ! Les cellules souches hématopoïétiques sont des cellules issues de la moelle osseuse et qui donnent naissance aux différentes cellules sanguines (globules rouges, globules blancs, plaquettes) tout au long de la vie. En cas de maladie (comme l’hémopathie maligne), certaines cellules souches peuvent être prélevées et cultivées avant d’être réinjectées dans l’organisme du patient pour restaurer la fonction du tissu ou de l’organe défaillant.
Mais il faut se rendre à l’évidence : si ces résultats satisfaisants obtenus grâce à ces greffes de moelle peuvent laisser rêveurs, de telles interventions chirurgicales ne sont pas envisageables d’un point de vue éthique pour les patients ne souffrant pas d’hémopathie maligne. Les scientifiques explorent donc en parallèle d’autres pistes.
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De l’intérêt d’un traitement antirétroviral très précoce
Parmi ces pistes, celle d’une possible rémission après un traitement antirétroviral mis en place de façon très précoce après l’infection puis suspendu ou allégé par la suite.
Dans le cadre de la Conférence internationale sur le Sida, le cas d’un patient brésilien de 34 ans, atteint par le VIH depuis octobre 2012, a retenu l’attention. Bénéficiant d’un traitement de trithérapie dès décembre 2012, ce patient a intégré en 2016 un essai clinique comptant 30 participants. Il faisait partie des cinq sujets de l’étude à être l’objet d’un protocole ajoutant à la trithérapie habituelle deux autres médicaments antirétroviraux (un inhibiteur d’intégrase et un inhibiteur d’entrée) pendant 48 semaines deux fois par jour, ainsi que 500 mg de nicotinamide et de la vitamine B3. Il s’est finalement avéré que ce patient était le seul de la cohorte à présenter une charge virale indétectable 57 semaines après interruption du traitement en mars 2019.
Si la présentation de ce cas est porteuse d’espoir, la prudence reste cependant de mise pour deux raisons :
- Ce patient est le seul de l’étude à présenter de tels résultats.
- Plusieurs rémissions prolongées ont déjà été signalées dans le monde sans qu’une guérison puisse être affirmée.
Ricardo Diaz, expert en maladies infectieuses à l’université de Sao Paulo (Brésil), a d’ailleurs précisé à l’occasion de cette conférence internationale que les résultats de cette étude restaient préliminaires et que des analyses plus poussées étaient en cours.
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Un espoir face aux risques de ruptures des traitements médicamenteux
Aujourd’hui, la lutte contre le VIH enregistre d’importants succès avec une baisse mondiale des contaminations de 23 % depuis 2010, et un accès aux soins toujours plus large. Mais c’est sans compter la pandémie de Covid-19 qui vient chambouler ces belles avancées.
Cette crise sanitaire mondiale sans précédent perturbe en effet l’approvisionnement en traitements antirétroviraux dans de nombreuses régions du globe. L’Organisation mondiale de la Santé a d’ailleurs signalé des tensions d’approvisionnement dans près de 73 pays.
Dans ce contexte inédit de crise sanitaire mondiale, la confirmation du maintien d’une charge virale indétectable, même limitée à quelques mois, après interruption des traitements, constitue donc une nouvelle prometteuse.
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Déborah L., Docteur en Pharmacie
– Sida : un Brésilien pourrait être le premier patient séropositif en rémission après un traitement par antirétroviraux, avancent des chercheurs. France tv info. Consulté le 15 juillet 2020.