Chaque année, environ 45 000 enfants naissent en France avant le terme de la grossesse. La prématurité peut-elle avoir des conséquences sur la fonction rénale de ces enfants ? Une vaste étude suédoise s’est penchée sur cette question et révèle que le risque d’insuffisance rénale chronique est fortement augmenté chez les enfants prématurés.
Prématurité et insuffisance rénale chronique
En France, environ 7 % des naissances sont des naissances prématurées, c’est-à-dire des naissances survenant avant 37 semaines d’aménorrhée. La prématurité des enfants peut-elle avoir un impact sur leur fonction rénale ?
Les scientifiques ont montré que près de deux tiers des néphrons, les unités fonctionnelles du rein, se forment au cours du dernier trimestre de la grossesse. Une naissance avant le terme de la grossesse stoppe donc la maturation rénale normale. Les enfants nés avant terme ont donc un capital de néphrons plus faible que les enfants nés à terme, et ce pour toute la durée de leur vie.
De précédentes études ont mis en évidence que les enfants nés prématurés ont un risque majoré d’insuffisance rénale au cours de la petite enfance. Pour aller plus loin, des chercheurs suédois se sont intéressés au risque d’insuffisance rénale jusqu’à l’âge adulte. Ils ont ainsi compilé les données de plus de 4 millions d’enfants nés en Suède, entre 1973 et 2014.
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Un risque triplé en cas d’extrême prématurité
L’analyse des résultats a montré que l’incidence globale de l’insuffisance rénale chronique au cours de l’étude était de 4,95 pour 100 000 personnes-années, quelle que soit la classe d’âge. Cette incidence s’avérait différente selon le terme de la naissance :
- 9,24 pour les enfants nés prématurés, avant 37 semaines d’aménorrhée ;
- 5,90 pour ceux nés entre 37 et 38 semaines d’aménorrhée ;
- 4,47 pour ceux nés à terme, entre 39 et 41 semaines d’aménorrhée.
D’une manière générale, les données révèlent que plus l’âge gestationnel à la naissance est faible, plus le risque d’insuffisance rénale chronique est élevé, avec une réduction du risque de 8 % à chaque semaine de gestation supplémentaire.
Sur l’ensemble de la période de suivi (entre 0 et 43 ans), le risque de développer une insuffisance rénale chronique était, par rapport à une naissance à terme :
- Triplé en cas de prématurité extrême (naissance entre 22 et 27 semaines d’aménorrhée) ;
- Doublé en cas de prématurité (naissance avant 37 semaines d’aménorrhée) ;
- Multiplié par 1,3 pour une naissance entre 37 et 38 semaines d’aménorrhée.
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Une surveillance de la fonction rénale jusqu’à l’âge adulte
Le risque d’insuffisance rénale chronique chez les enfants prématurés varie selon la période de la vie. Il est multiplié par 5 dans l’enfance, entre 0 et 9 ans. Ensuite, le risque tend à diminuer avec les années, mais il reste toujours supérieur à celui des enfants nés à terme :
- Presque doublé entre 10 et 19 ans ;
- Augmenté de 30 % entre 20 et 43 ans.
Parallèlement, le risque d’insuffisance rénale chronique apparaissait similaire quel que soit le sexe. Néanmoins, il serait majoré à l’âge adulte, chez les femmes nées avant le terme.
Ces nouvelles données confirment que la naissance prématurée augmente fortement le risque d’insuffisance rénale chronique, non seulement pendant l’enfance, mais aussi jusqu’à l’âge adulte. Plus la prématurité est importante, plus le risque s’avère élevé. Les enfants nés prématurément doivent ainsi bénéficier d’une surveillance rapprochée de leur fonction rénale, dès la naissance et jusqu’à la fin de leur vie.
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Estelle B., Docteur en Pharmacie