A l’approche de la prochaine édition de Mois Sans Tabac, qui débutera le 2 novembre 2018, une étude américaine a analysé les effets d’une réduction de la quantité de nicotine présente dans les cigarettes. Les résultats viennent d’être publiés dans la revue scientifique JAMA et apportent un nouvel éclairage sur la dépendance au tabac.
Tabac, un fléau pour la santé publique
Le tabac et ses multiples conséquences sur la santé représentent l’un des enjeux majeurs de santé publique dans les pays occidentaux. Les autorités sanitaires, en France comme ailleurs, multiplient les initiatives pour tenter de réduire le fardeau du tabagisme.
Dans ce contexte, l’agence américaine du médicament, la FDA (Food and Drug Administration) a récemment proposé de réduire la quantité de nicotine de chaque cigarette. L’objectif final de cette démarche est de :
- Limiter la dépendance au tabac ;
- Faciliter le sevrage tabagique ;
- Réduire les conséquences du tabagisme sur la santé, notamment en termes de mortalité.
Pour mettre à bien cette nouvelle initiative, une question se pose : faut-il réduire brutalement la concentration en nicotine ou au contraire l’abaisser progressivement ? Pour répondre à cette problématique, des chercheurs américains ont mené une étude, dont ils viennent de publier les résultats dans la revue scientifique JAMA.
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Réduire brutalement ou progressivement la teneur en nicotine
Dans cette étude menée dans 10 villes américaines, les chercheurs ont inclus 1 250 personnes, fumant au moins 5 cigarettes par jour et ne souhaitant pas arrêter prochainement de fumer. Ces fumeurs ont été aléatoirement répartis en trois groupes :
- Un groupe dont les cigarettes avaient une concentration en nicotine fortement réduite d’emblée (0,4 mg par gramme de tabac) ;
- Un groupe dont les cigarettes avaient une concentration progressivement réduite en nicotine (de 15,5 mg à 0,4 mg de nicotine par gramme de tabac, avec une baisse de la concentration en nicotine toutes les 4 semaines sur 16 semaines) ;
- Un groupe dont les cigarettes n’ont pas été modifiées (soit un apport nicotinique de 15,5 mg de nicotine par gramme de tabac).
À noter ! Selon les marques de tabac disponibles actuellement, les teneurs en nicotine varient de 15 à 18 mg par gramme de tabac.
Trois marqueurs d’exposition au tabac ont été suivis toutes les semaines pendant 1 mois, puis toutes les 2 semaines pendant les 16 semaines suivantes :
- Le monoxyde de carbone dans l’air expiré ;
- L’acide 3-hydroxypropylmercapturique dans les urines (produit de dégradation d’un composé volatile présent dans le tabac) ;
- Le phénantrène tétraol (indicateur de l’exposition aux hydrocarbures aromatiques polycycliques).
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Bientôt des cigarettes allégées en nicotine ?
Les résultats de l’étude ont montré que les marqueurs d’exposition au tabac étaient significativement inférieurs dans le groupe des fumeurs dont les cigarettes ont subi une réduction brutale de la teneur en nicotine, par rapport aux fumeurs dont les cigarettes ont été progressivement réduites en nicotine. De plus, le niveau d’exposition aux toxiques était significativement réduit en cas de réduction brutale de la teneur en nicotine, par rapport au groupe contrôle, ce qui n’était pas le cas avec une réduction progressive de la nicotine.
Parallèlement, les fumeurs exposés à une réduction brutale de la teneur en nicotine ont moins fumé au cours des 20 semaines de suivi que les fumeurs soumis à une réduction progressive. Ils avaient également une dépendance moins forte à la nicotine. La différence de quantités de cigarettes fumées n’était pas significative entre le groupe contrôle et le groupe avec une teneur en nicotine réduite progressivement.
Les résultats de cette étude semblent largement plaider en faveur d’une réduction brutale de la teneur en nicotine des cigarettes, pour limiter les conséquences du tabac sur la santé et la dépendance au tabac. Toutefois, une telle démarche peut induire des symptômes de sevrage, qui incitent les fumeurs à rechercher d’autres sources de nicotine.
Suite à la volonté de l’agence américaine du médicament, les industriels du tabac pourraient prochainement réduire la teneur en nicotine des cigarettes. Une mesure destinée à limiter le tabagisme, mais dont il faudra observer les effets à grande échelle et sur le moyen-long terme pour en évaluer la réelle efficacité.
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Estelle B. / Docteur en Pharmacie