Formulation plus naturelle, diminution des conservateurs, sécurité et traçabilité renforcées, procédés de fabrication écoresponsables… l’industrie cosmétique doit relever une quantité importante de défis tout en poursuivant ses recherches pour développer de nouveaux principes actifs. Quelle place occupe ce secteur en France ? Quelles sont les pistes de recherche actuelles et futures ? Éclairage.
L’industrie cosmétique en France
La grande industrie cosmétique ne connait pas la crise. Pour preuve, l’industrie génère un chiffre d’affaires de 200 milliards d’euros par an dans le monde et une croissance moyenne de 4 % par an.
À savoir ! Selon l’article 2 de la réglementation CE 1223/2009, un « produit cosmétique » désigne toute substance ou tout mélange destiné à être mis en contact avec les parties superficielles du corps humain (peau, poils, cheveux, ongles, lèvres, organes génitaux externes) ou avec les dents et les muqueuses buccales en vue, exclusivement et principalement, de les nettoyer, de les parfumer, d’en modifier l’aspect, de les protéger, de les maintenir en bon état ou de corriger les odeurs corporelles ».
En France, on distingue d’un côté, les grands groupes de luxe et de l’autre, un canevas de 1 500 entreprises et start-ups, représentant un chiffre d’affaire global de 16 milliards d’euros.
En terme de balance commerciale, le secteur est le troisième, en France, après l’aéronautique et les vins et spiritueux. La très bonne réputation française dans les domaines du luxe, de la haute couture et de la beauté séduit toujours plus de consommateurs à travers le monde.
Selon le syndicat du secteur, la FEBEA (Fédération des Entreprises de la Beauté), la France est le premier exportateur mondial de cosmétiques avec 13,6 milliards d’euros de produits dans le monde, dont la moitié en Europe.
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Mieux comprendre la nature et le fonctionnement de chaque peau
On pourrait dire que le Graal des laboratoires de recherche en cosmétique est toujours le même depuis des années : mettre au point une molécule qui fait reculer dans le temps la survenue des rides et des ridules.
Pour toucher de près ce mythe de la jeunesse éternelle, les chercheurs tentent de mieux comprendre les mécanismes cellulaires à l’œuvre dans l’épiderme (vieillissement cellulaire, hydratation, élasticité) et développer de nouveaux principes actifs.
Par exemple, au sein du Laboratoire de biologie tissulaire et d’ingénierie thérapeutique du CNRS, les chercheurs s’intéressent aux mécanismes de régénération de la peau dans le cas de la cicatrisation des plaies ou du vieillissement. Ils étudient des protéines de la matrice extracellulaire (MEC), un milieu dans lequel les cellules sont baignées et qui joue un rôle clef dans leur renouvellement. « Sur ces grandes protéines, nous avons identifié des zones “cibles” très réduites, mais très intéressantes. Lorsque ces cibles sont accessibles, elles jouent un rôle prépondérant dans le renouvellement de la cellule en réaction aux signaux de l’environnement extérieur », précise Patricia Rousselle dans un article du Journal du CNRS.
Autre piste très prometteuse : un diagnostic personnalisé de votre peau avec l’aide du séquençage génomique.
Ici, il est question d’analyser précisément le microbiote présent à la surface de la peau via un séquençage de tout l’ADN présent sur la peau.
À savoir ! Le microbiote de la peau est constitué d’environ 1 000 espèces bactériennes appartenant à 19 groupes. La plupart d’entre eux résident dans les couches superficielles de l’épiderme et dans les follicules pileux. Leur proportion varie en fonction de la zone et du type de peau (sèche, humide ou sébacée). Le genre Propionibacterium est celui qui regroupe le plus de bactéries suivi par les genres Streptococcus, Staphylococcus et Corynebacterium. Certaines bactéries du microbiote cutané sont associées à des maladies de la peau comme Propionibacterium acnes, Staphylococcus epidemidis et les corynébactéries dans le cas de l’acné. La bactérie S. epidermidis est aussi liée au développement de la rosacée (ou couperose).
Ainsi, et avec l’appui des biotechnologies, il sera alors possible de proposer des produits sur mesure avec des molécules actives correspondant parfaitement aux besoins de chaque individu.
Comme dans les autres secteurs, la cosmétique sera de plus en plus personnalisée.
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Un secteur plus écoresponsable
L’industrie cosmétique innove massivement puisque ses dépenses de recherche et développement ont représenté 1,27 milliard d’euros dans l’Union européenne en 2015 tout en intégrant plus de 26 000 scientifiques.
Face à la défiance grandissante des citoyens sur la qualité des produits cosmétiques (conservateurs, rôle dans la perturbation du système endocrinien, agents allergènes, etc.), le secteur de la cosmétique recherche désormais à développer des actifs biosourcés.
Autrement dit, des composés issus de l’environnement et non plus synthétisés artificiellement par génie chimique.
Désormais, les entreprises du secteur axent leurs recherches sur :
- La caractérisation des enzymes et des molécules produites par certains microorganismes retrouvés dans l’environnement (océans, forêts, plantes traditionnelles ou médicinales, vigne, glaciers, etc.) ;
- La création de banques de nouvelles molécules biosourcées (polysaccarides, coenzymes, etc.) générées par ces enzymes, et par extension, ces microorganismes ;
- Le développement de systèmes de libération contrôlée des principes actifs (nanoémulsions, micro- et nanoparticules, patchs, etc.) ;
- Le développement de peau imprimée en 3D sur laquelle il est possible de tester l’efficacité des principes actifs ;
- La diminution de l’utilisation de molécules de synthèse (solvants, silicones, conservateurs, PEG, etc.) et de rejets de dioxyde de carbone dans les procédés de fabrication ;
- Le développement d’emballages totalement biodégradables ou recyclables.
Reste désormais à savoir si ces axes de développement vont permettre au secteur cosmétique de reconquérir progressivement la confiance des consommateurs.
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Julie P. Journaliste scientifique
– Les biotechnologies, l’avenir de la filière cosmétique en France? – L’Usine Santé. Consulte le 29 novembre 2018.