Pourquoi va-t-on dérembourser 4 médicaments anti-Alzheimer ?

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Rédigé par Julie P. et publié le 8 juin 2018

En France, plus de 900 000 personnes sont touchées par la maladie d’Alzheimer. Dernièrement, la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a publié un arrêté précisant que quatre médicaments anti-Alzheimer présents sur le marché seraient déremboursés à partir du 1er août. Focus sur les raisons de cette initiative et les pistes de recherche pour développer de nouvelles molécules pharmaceutiques luttant contre la maladie d’Alzheimer.

Homme senior prenant des médicaments

Quels médicaments anti-Alzheimer vont être dérembourser ?

Depuis les années 1980, de nombreux traitements ont été prescrits aux patients atteints de la maladie d’Alzheimer. Ces traitements ne sont pas automatiques et leur prescription par un médecin dépend des symptômes de la maladie et de l’état de santé général du patient. Le manque d’efficacité des principales thérapies médicamenteuses laisse souvent les patients, les familles et les aidants dans le questionnement.

« La commission de la transparence (CT), composée d’experts indépendants de la Haute Autorité de Santé, a ainsi récemment réévalué le service médical rendu par les médicaments de la maladie d’Alzheimer. À partir de l’ensemble des données médicales et scientifiques disponibles, elle a mis en évidence que ces médicaments présentaient une efficacité faible, ainsi que des effets indésirables digestifs, cardiovasculaires et neuropsychiatriques pouvant être graves et nécessiter l’arrêt définitif du traitement (jusqu’à 30% d’arrêt dans les études cliniques) » précise un communiqué de presse du ministère de la santé et des solidarités datant du 1er juin 2018.

Les médicaments anti-Alzheimer en cause, prescrits dans le traitement des symptômes légers et modérés de la maladie d’Alzheimer, sont en majorité des molécules qui inhibent l’enzyme détruisant la production d’acétylcholine (acétylcholinestérase). Cette inhibition entraîne une augmentation du niveau d’acétylcholine dans certaines régions du cerveau.

À savoir ! L’acétylcholine est un neurotransmetteur c’est-à-dire une molécule de communication entre les neurones. Elle est impliquée dans la mémoire et l’apprentissage dans le système nerveux central (cerveau et moelle épinière) et dans la fonction musculaire dans le système nerveux périphérique. Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ont de plus faibles quantités d’acétylcholine dans le cerveau car la destruction de leurs cellules nerveuses réduit sa production.

Cependant, le donépezil (Aricept), la galantamine (Reminyl), la rivastigmine (Exelon) qui influent sur la teneur d’acétylcholine dans le cerveau ont, selon la HAS, peu d’impact sur le ralentissement de l’évolution de la maladie et sur le recul de la gravité des symptômes (comme les troubles de la mémoire et de la fonction exécutive).

De plus, ces médicaments sont souvent sources d’effets indésirables comme :

  • Des nausées et des vomissements ;
  • Une perte d’appétit et des maux de ventre.

Ces trois médicaments anti-Alzheimer (et leurs génériques) seront désormais déremboursés par l’Assurance Maladie qui prenait jusqu’ici en charge 15 % de leur montant.

Autre médicament concerné par cette décision de déremboursement : la mémantine (Ebixa) utilisé pour soulager les symptômes modérés et graves de la maladie neurodégénérative.

Globalement, cette molécule se fixe sur les récepteurs NMDA (N-méthyl-D-aspartate) des neurones pour prendre la place du glutamate, un neurotransmetteur contribuant à la maladie lorsqu’il est présent en trop grande quantité.

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Quels autres traitements pour la maladie d’Alzheimer ?

Cette interruption des remboursements de médicaments impliqués dans la pathologie neurodégénérative n’est cependant pas un « signe » laissant croire que la piste médicamenteuse est sans espoir.

Au contraire, des efforts importants sont et seront investis dans la recherche de nouveaux médicaments.

« Pour l’avenir, la recherche de traitements efficaces pour lutter contre la maladie d’Alzheimer reste un enjeu majeur. La France se mobilise pleinement sur ces travaux et consacre chaque année des ressources importantes aux recherches sur les maladies neurodégénératives et la démence » souligne le communiqué de presse du ministère de la santé et des solidarités.

 

Les principaux axes de recherche sont :

  • Détruire ou diminuer l’accumulation des plaques de protéines amyloïdes avec l’injection d’anticorps (protéines impliquées dans les réactions de défense de l’organisme) capables de les supprimer. Cette approche (immunothérapie passive et immunothérapie active) fait actuellement l’objet d’étude clinique ;
  • Activer certaines cellules immunitaires du cerveau (la microglie) pour qu’elles éliminent les plaques amyloïdes ;
  • Lutter contre l’agrégation des protéines tau par des molécules actives, des anticorps ou des vaccins immunisants.

À savoir ! L’étude du cerveau des patients atteints de maladie d’Alzheimer montre deux types de lésions qui signent le diagnostic de la maladie : les plaques amyloïdes à l’extérieur des neurones et la dégénérescence des neurofibrilles (des filaments soutenant la structure du neurone et assurant le transport des molécules qui s’y déroule). Ces deux types de lésions sont chacune associée à une protéine : le peptide bêta amyloïde donnant par clivage et accumulation, les plaques amyloïdes ou plaque séniles et la protéine tau dont la forme anormale donne naissance aux dégénérescences neurofibrillaires.

D’ici à 2020, on estime que 1,3 millions de personnes seront concernées par la maladie en France.

Lire aussiUne avancée capitale contre la maladie d’Alzheimer

Julie P., Journaliste scientifique

– Alzheimer : pourquoi prescrit-on des médicaments inefficaces ? Le Monde. Vidéo consulté le 6 juin 2018.
– Pourquoi les médicaments anti-Alzheimer font plus de mal que de bien. The conversation. Consulté le 6 juin 2018.
– Maladie d’Alzheimer. Une maladie neurodégénérative de mieux en mieux comprise. INSERM. Consulté le 6 juin 2018.
– L’intérêt thérapeutique des médicaments de la maladie d’Alzheimer n’est pas suffisant pour justifier leur prise en charge par l’assurance maladie. CP de la Direction Générale de la santé et de la direction de la sécurité sociale. Ministère des solidarités et de la santé. Consulté le 6 juin 2018.
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