Maladie d’Alzheimer : découverte d’une hormone protectrice libérée pendant l’activité sportive

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Rédigé par Julie P. et publié le 25 janvier 2019

Pour mieux comprendre les mécanismes de la maladie d’Alzheimer, les chercheurs étudient de près l’influence des différentes hormones sur le cerveau. Récemment, une équipe d’une vingtaine de chercheurs, encadrée par Fernanda De Felice de l’université de Rio de Janeiro au Brésil et de l’université Queen’s de Kingston au Canada, a montré, chez la souris, qu’une hormone libérée pendant la pratique d’un sport, l’irisine, protègerait des symptômes de la maladie d’Alzheimer. Retour sur ces travaux prometteurs publiés dans la revue Nature Medecine.

Irisine-et-maladie-dAlzheimer

L’irisine, l’hormone de l’exercice qui agit sur le cerveau

L’irisine est une molécule induite par l’exercice physique et découverte en 2012 par Bruce Spiegelman de l’université de Harvard. En étant libérée dans les muscles et le sang, elle augmente les dépenses énergétiques des cellules et contribue à diminuer l’obésité.

Ce n’est qu’en 2013 que le rôle de celle-ci sur les fonctions cérébrales a été, en partie, élucidé.

A cette époque, les chercheurs savaient que la pratique d’un sport était bénéfique pour le cerveau, car elle induisait la synthèse du facteur BDNF (Brain-derived Neurotrophic Factor ou facteur neurotrophique dérivé du cerveau), une neurotrophine favorisant la survie et la différenciation des neurones.

À savoir ! Une neurotrophine est une petite protéine (polypeptide) qui a rôle essentiel dans la survie, la croissance et la différenciation des neurones. Elle est exprimée dans le système nerveux central (cerveau et moelle épinière) et le système nerveux périphérique (ganglions et nerfs). Elle joue un rôle critique dans la plasticité synaptique du cerveau adulte.

À savoir ! La plasticité neuronale ou plasticité synaptique est la propriété qui permet aux neurones de lier étroitement leurs activités aux modifications de fonctions et de structure au niveau de la synapse (zone de communication entre les neurones).

En étudiant des souris en plein exercice d’endurance, les chercheurs de l’université d’Harvard se sont rendu compte qu’elles accumulaient dans leur hippocampe, l’irisine.

À savoir ! L’hippocampe est une région du cerveau impliquée de manière centrale dans l’apprentissage et la mémoire. Ce sont ces deux fonctions cognitives qui sont altérées dans la maladie d’Alzheimer.

Par une cascade de réactions chimiques, l’irisine activerait la synthèse du facteur BDNF et améliorerait les fonctions cérébrales.

Par ailleurs, ils ont montré que des souris génétiquement modifiées pour produire cette hormone présentaient une hausse de leur taux de BDNF dans l’hippocampe.

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Irisine et maladie d’Alzheimer : quels liens ?

Dans la continuité de ces travaux, les chercheurs de l’université de Rio de Janeiro ont montré, en analysant des cerveaux post-mortem, que les personnes ayant eu la maladie d’alzheimer (MA) avaient des niveaux réduits d’irisine dans leur hippocampe et leur liquide céphalo-rachidien par rapport aux personnes ne souffrant pas de cette maladie neurodégénérative ou souffrant d’un stade moins avancé de la MA.Chez les souris modèles de la MA, un défaut d’irisine altérait leur capacité à reconnaître de nouveaux objets.

Inversement, l’augmentation d’irisine dans leur cerveau leur permettait de récupérer une meilleure plasticité neuronale (formation de nouvelles connexions entre les neurones).

Ensuite, en faisant nager quotidiennement les souris, les chercheurs ont observé une augmentation de leur irisine dans l’hippocampe et de meilleures capacités cognitives.

Quand la signalisation de l’irisine vers le cerveau chez des souris atteintes de la MA était bloquée, les bienfaits de l’exercice physique pour leur cerveau étaient perdus.

«Nous savons que l’activité physique est liée à une meilleure santé cérébrale en vieillissant. Cette recherche met en évidence un mécanisme biologique pouvant contribuer à cet effet bénéfique » déclare Rosa Sancho, de l’organisation caritative Alzheimer’s Research UK, dans un article du Newscientist.

Des études complémentaires chez les personnes atteintes d’Alzheimer sont aujourd’hui nécessaires pour élucider le rôle de l’irisine dans cette pathologie.

Plusieurs questions sont soulevées : est-ce un niveau d’activité physique faible qui entraîne une chute de l’irisine et favorise le développement de la MA ? Est-ce les modifications de certaines voies biochimiques du cerveau chez les personnes atteintes de la MA qui aboutissent à la chute de l’irisine cérébrale ?

Les chercheurs veulent également comprendre dans quelles mesures la prise d’une molécule proche de l’irisine serait-elle efficace et sans danger ?

Sept ans après sa découverte, l’irisine n’a pas fini de révéler ses secrets.

Lire aussiMaladie d’Alzheimer : bientôt un traitement ?

– A hormone released during exercise might protect against Alzheimer’s. New Scientist. Consulté le 17 janvier 2019.
– Exercise-linked FNDC5/irisin rescues synaptic plasticity and memory defects in Alzheimer’s models. Nature. M.V Lourenco et al. Consulté le 16 janvier 2019.