Mémoire humaine : une capacité de stockage de 1 pétaoctet

Neurologie

Rédigé par Julie P. et publié le 4 décembre 2018

Quelle est la capacité de stockage d’informations de notre cerveau ? Même s’il est difficile de réduire la complexité de notre mémoire à un équivalent clef USB ou disque dur externe, des chercheurs californiens du Salk Institute de La Jolla ont voulu répondre à cette énigme. Pour ce faire, ils ont décidé d’étudier, chez le rat, une partie du cerveau puis d’extrapoler ces résultats à l’ensemble de la surface cérébrale impliquée dans les différents mécanismes de mémoire. Bilan ? Nous aurions une capacité de stockage de 1 million de milliards d’octets sous la boite crânienne !

capacité mémoire

Un pétaoctet de mémoire

Tout d’abord, il est bon de rappeler que pour fixer un souvenir, les neurones renforcent leurs synapses c’est-à-dire leurs zones de connexion entre neurones. Cette plasticité synaptique est nécessaire aux apprentissages.

Selon l’équipe de neurologue, nous aurions, en effet, 1 pétaoctet (1015 octets). Autrement dit, l’équivalent de 1000 disques durs externes d’un Téraoctet !

Pour arriver à cette estimation, dix fois plus élevée que la précédente, les chercheurs ont reproduit, par impression 3D quelques micromètres d’hippocampe de rats.

« Quand nous avons reconstruit pour la première fois chaque dendrite, axone, processus glial et synapse d’un volume d’hippocampe de la taille d’un globule rouge, nous avons été déconcertés par la complexité et la diversité parmi les synapses« , confirme Kristen Harris, coauteur de l’étude.

À savoir ! L’hippocampe est une structure paire du cerveau des mammifères jouant un rôle clef dans la mémoire et la navigation spatiale. C’est une des premières structures atteintes dans la maladie d’Alzheimer entrainant ainsi des problèmes de mémoire et d’orientation. C’est le siège de la production de nouveaux neurones tout au long de la vie et il joue un rôle primordial dans la mémoire des événements (mémoire explicite). La mémoire implicite (mémoire de savoir-faire ou procédurale) dépend, quant à elle, d’autres structures du cerveau.

En étudiant de très près la structure et le fonctionnement de ce tissu cérébral composé de neurones, de synapses et de cellules de soutien, les chercheurs ont découvert que les synapses n’étaient pas différenciables les unes des autres pas leurs trois types (grandes, moyennes, petites) bien connus jusqu’ici, mais par 26 types et dont les tailles intermédiaires varient, en moyenne, de seulement 8%.

« Traduits en langage informatique, 26 tailles de synapses correspondent à 4,7 bits d’information. Or, auparavant, nous pensions que le cerveau n’était capable que de stocker l’équivalent d’un ou deux bits de mémoire de courte et longue durée dans l’hippocampe  » précise Tom Bartol, co-auteur de l’étude.

En plus de ce nombre de type de synapses multiplié par 10 (de 3 à 26 types), les chercheurs ont observé qu’elles augmentaient ou diminuaient d’une taille.

« Nos nouvelles estimations sont dix fois plus grandes que les précédentes », explique Terry Sejnowski qui a supervisé ces travaux.

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Des connexions cérébrales en remaniement perpétuel

En allant plus loin dans leurs recherches, les neuroscientifiques du Salk Institute, en collaboration avec des chercheurs de l’université du Texas à Austin et de l’université d’Otago, en Nouvelle-Zélande, ont constaté, en février 2018,  que les connexions dans le cerveau se développaient en fonction des besoins d‘apprentissage, mais qu’en contrepartie, d’autres connexions diminuaient.

Dans ce nouveau travail, les chercheurs ont stimulé l’hippocampe de souris pour mimer les effets d’une nouvelle expérience, d’un nouvel apprentissage.

En analysant ensuite des échantillons tissulaires d’hippocampe par microscopie électronique, ils ont observé que lorsque certaines synapses devenaient plus grandes, d’autres devenaient plus petites.

 » C’est une idée intuitive: à mesure que nous apprenons quelque chose de nouveau, les synapses se renforcent et s’agrandissent. Cela montre qu’il existe un équilibre: certains deviennent plus fortes et d’autres plus faibles «  souligne Terry Sejnowski.

Finalement, ces observations paraissent logiques, car si les synapses devenaient toujours plus grandes, elles finiraient par atteindre une limite et aucune nouvelle information ne pourrait être stockée.

Le travail a d’ailleurs montré qu’en augmentant la gamme des tailles des synapses, la capacité de stockage globale augmentait. C’est comme si les synapses voulaient atteindre une taille optimale pour faire transiter de l’information et la stocker la plus efficacement.

A terme, ces travaux vont probablement permettre de mieux comprendre les différents processus d’altération de la mémoire que l’on retrouve, par exemple, chez les patients atteints de dépression, de maladie d’Alzheimer .

A l’inverse, ces découvertes vont également offrir la possibilité de mieux appréhender les mécanismes cellulaires à l’origine de la persistance des souvenirs traumatiques que l’on retrouve notamment chez les personnes atteintes d’Etat de Stress Post-Traumatique (ESPT).

Lire aussiPourquoi nos souvenirs sont-ils modifiés ?

Julie P., Journaliste scientifique

-Making new memories is a balancing act. Site web Salk.edu. Consulté le 27 novembre 2018.

  • Athoumani Ahmed says:

    Tres instructif comme article et la recherche scientifique et surtout les scientifiques eux-mêmes

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